24 Joyeux Noël (1/2)

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Ce soir, c'est Noël : le Réveillon, plus exactement.

Jour de fête, joie et bonheur partout dans la maisonnée. Le feu crépite dans la cheminée, le sapin brillant de mille feux est éclatant dans un coin du salon, les décorations chaleureuses infestent la maison tout en la colorant, l'habillant de lumière, et l'agitation règne. De la cuisine s'échappent de douces odeurs, chaudes, sucrées, salées aussi. Tout se mélange et stimule les sens. Les yeux en prennent pour leur grade avec toute cette ornementation scintillante et clignotante, les oreilles aussi — chants de Noël obligent —, le nez et les papilles frétillent face à ces effluves — signe de festin —, et les mains sont fort occupées.

Nous — les plus jeunes —, sommes en train de dresser la table en suivant les indications de Marianne, tandis qu'elle et son mari s'affairent en cuisine ; avec force de rires et de bonne humeur.

L'entente entre Sarah et moi est très superficielle. Elle se limite aux politesses de base, sans aucun mauvais esprit de sa part. Ça fait désormais un bon mois que ça dure, et si les premières semaines ont été très difficiles pour moi, je commence — tristement — à m'y faire.

Cette fois, pour changer d'angle d'attaque, j'ai été très dans l'action, et pas tellement dans la réflexion ; à l'évidence, ça ne me réussit pas. Je n'ai pas non plus eu envie de le faire, à vrai dire. Les derniers mots sincères de Cédric ou de Sarah à mon égard étaient tout sauf rassurants concernant ma santé mentale et mon attitude, mais il m'a semblé inutile de remettre une énième fois toute ma vie en cause : je ne sais pas comment faire, je suis seul, bien enfoncé dans ma merde. Depuis que je suis arrivé ici, il ne s'est pas passé une semaine — ou presque —, sans que je ne me pose des questions et que je ne revoie ma façon d'agir. Et j'ai constaté qu'il m'est impossible de plaire à tout le monde. Ce qui leur semble être un souci chez moi n'en est pas forcément un pour moi, alors autant que je taise la réalité et que je m'efforce de faire des changements là où je le peux. Être un jeune homme sympathique envers les gens, studieux, poli, motivé et impliqué. Le reste, on verra plus tard. On évite les prises de tête, et on se concentre sur ce que l'on a sans chercher à s'éparpiller.

C'est donc ainsi que je me comporte face à Sarah. Je lui parle normalement, sans chercher à récupérer son amitié. Du coup, elle est plutôt aimable, et même si notre plus longue discussion a duré vingt secondes — une histoire concernant la couleur des guirlandes qu'on allait placer sur le sapin cette année —, j'apprends à me contenter de ça et à faire en sorte que discuter avec moi ne soit plus un chemin de croix pour les gens.

C'est aussi l'avantage d'avoir une vie très calme et de ne fréquenter personne. Je peux librement parler sans avoir à mentir et à me cacher, et comme ce que je raconte est très banal, aucun risque que l'on me prenne pour un parasite. Au pire, les gens se disent que je suis un type insipide, mais certainement pas un dingue. C'est peut-être mieux, à terme ; toutefois seul l'avenir me le dira.

Il y a eu des choses très positives aussi ces dernières semaines. Tout d'abord, j'ai concentré mon énergie sur les cours, et j'ai tout cartonné avant les vacances. J'ai même pris de l'avance, et presque tous mes professeurs se sont montrés épatés par l'énorme progression effectuée. J'en suis fier, je me raccroche pas mal à ça, dès que j'ai un instant de doute, dès que des pensées que j'essaie de chasser se manifestent.

Ensuite, ça m'a permis de faire plus ample connaissance avec Francis et avec Marianne, que j'avais considéré et traité comme de gentils étrangers jusque-là. Je ne m'étais pas du tout intéressé à eux, et j'ai eu le temps — depuis le début du mois —, d'apprendre des éléments à leur sujet. Je confirme qu'ils sont adorables. Peut-être parce que mon comportement — en surface —, est sans reproches, mais qu'importe.

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