Chapitre 27, Partie 3

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Deux jours plus tard, les deux médecins, un homme et une femme en blouses blanches me rendent visite, alors que je joue aux échecs en compagnie d'Aaron. Ils m'examinent une fois de plus, avant de rendre leur verdict.

— Vous êtes maintenant apte à quitter l'infirmerie. Cependant, il serait préférable que vous restiez tranquille encore quelques jours, et que vous ménagiez vos efforts. Nous vous ferons parvenir des médicaments et vous organiserons des soins à votre studio...

— Elle dormira dans ma chambre, les coupe Aaron. Je m'en occuperai moi-même. Il faut que quelqu'un puisse veiller sur elle. Enfin, si tu le veux bien, ajoute-t-il à mon égard.

Je tente de ne rien laisser paraître du rouge qui me monte aux joues et hoche la tête.

— Alors la question est réglée.

Les deux infirmiers n'ont d'autres choix que d'acquiescer. Évidemment. Il est le vice-directeur du Centre, il a tous les pouvoirs.

C'est ainsi qu'Aaron m'aide à débarrasser mes affaires de l'infirmerie et que nous nous rendons tous les deux jusqu'à sa chambre. Grâce à son poste important, il possède un logement bien plus grand et confortable que le mien, un étage plus haut.

Il ouvre la porte grâce à son badge, et je découvre pour la première fois son studio. Je reste bouche bée tant je suis surprise par ce que je vois.

Sa chambre déborde de plantes, de fleurs disposées un peu partout dans la pièce. Les murs crème rendent l'espace encore plus grand qu'il ne l'est déjà. Son logement se compose d'un immense coin salon au canapé en cuir blanc, séparé par des portes en verre coulissantes d'une chambre au lit d'une largeur démesurée. Dans le fond, on peut apercevoir l'entrée de la salle de bain aux cloisons en béton ciré. Des tapis molletonnés couvrent le sol, de petits guéridons et paniers en osier sont disséminés ici et là et des lampes originales éclairent les divers tableaux accrochés au mur. On peut y voir de somptueuses photos de villes aux couleurs extravagantes. Je crois reconnaître l'Italie, et La Nouvelle-Orléans, et j'en déduis qu'il s'agit des nombreux endroits où il a vécu. L'un des autres murs est couvert d'étagères supportant une considérable quantité de livres en tout genre.

— Tu plaisantes...

Il rit tout bas.

— Surprise ?

— C'est là que tu vis ?

— Tu imaginais des murs noirs et des têtes de mort un peu partout ?

J'élude sa question et parcours la pièce avec curiosité. Je passe le bout de mes doigts sur les feuilles d'une magnifique plante grasse.

— Le vivant me fait du bien. Il me réconforte, et me rappelle mes voyages.

— Comment est-ce que tu parviens à entretenir ces plantes sans lumière naturelle ? je demande, médusée.

— Qui t'a dit qu'il n'y en avait pas ? il répond avec un sourire.

Il appuie sur un interrupteur à côté de son lit. Le plafond commence alors à s'ouvrir et révèle un puits de lumière, éclairant toute la pièce.

— Wow..., je souffle, à court de mots.

Je m'approche de l'ouverture et sens les rayons du soleil filtrer à travers la vitre. Je distingue les nuages défiler paisiblement au gré du vent, et aperçois même quelques branches des arbres bordant la plaine en me penchant un peu. Cela n'a rien à voir avec nos chambres dépourvues de lumière naturelle de l'étage du dessous.

— J'adore cette fenêtre. Que ce soit en plein soleil, durant une averse, sous la neige, ou de nuit, je ne m'en lasse jamais, explique-t-il.

Moi qui ne suis pas une grande fan de l'hiver, je ne peux m'empêcher de songer au bonheur de contempler les flocons tomber sur la vitre.

Je finis mon examen de la pièce, et Aaron intercepte mon regard fixé sur le lit.

— Tu vas l'avoir rien que pour toi. Je dormirai sur le canapé.

Pensive, j'ai bien du mal à garder mes objections pour moi.

Nous passons une fin d'après-midi et une soirée paisible. Soucieux de mon bien-être, Aaron me confie le choix du programme et nous rapporte du réfectoire un plat délicieux, que nous dégustons devant un film. Affalée sur le canapé, le ventre rempli, blottie sous un plaid, je me laisse aller à la quiétude du moment. La présence d'Aaron à quelques centimètres de moi m'apaise terriblement. Une fois de plus, nous n'avons pas besoin de parler beaucoup. Il veille simplement à ce que je sois installée le plus confortablement possible, et que j'ai tout ce qu'il me faut. L'unique ombre au tableau est qu'il prend un grand soin à mettre juste assez de distance entre nous pour que nos deux corps ne se touchent pas un seul instant, ce que je ne manque pas de remarquer. Bien qu'il agisse ainsi pour respecter mon choix, cela me contrarie et me tend plus qu'autre chose. Ce vide nous séparant emplit mon esprit.

Quand vient l'heure d'aller dormir, Aaron me laisse la salle de bain tandis qu'il prépare son lit. La douche brûlante, la première depuis des jours, détend tous mes muscles. Lorsque je reviens finalement dans la chambre, vêtue de mon pyjama, il est déjà couché, et les lumières sont éteintes. Je me glisse sous la couette, délicieusement douce et moelleuse. Je suis tellement mieux installée qu'à l'infirmerie que j'ai l'impression de m'enfoncer dans du coton.

— Bonne nuit, Amber, me lance Aaron depuis l'autre côté de la pièce.

— Bonne nuit Aaron.

Je ferme les yeux. Pourtant, impossible de dormir. Les minutes passent, mais la présence d'Aaron si près de moi m'entête. Tournant encore et encore dans mon lit, je guette le moindre bruit, tentant de percevoir s'il dort. Je pèse le pour et le contre pendant ce qui me paraît être une éternité. Un combat semble se jouer dans mon cerveau, tandis que je suis attirée inexorablement vers lui.

Et puis finalement, je prends mon courage à deux mains.

Je me lève, traverse la chambre sur la pointe des pieds, et me dirige vers lui dans l'obscurité. Il se retourne lorsqu'il me sent grimper sur le lit, mais je le surprends en écrasant mes lèvres sur les siennes.

Le sentiment de soulagement qui m'étreint est une pure drogue. Tout se remet enfin en ordre dans ma tête. J'ai l'impression d'être à la maison ; d'être exactement à l'endroit où je dois être. Alors je l'embrasse encore. Ses doigts caressent doucement mon dos et mes cheveux.

— Viens dormir avec moi, je souffle contre ses lèvres.

— Amber...

— Je ne veux plus lutter. Je t'aime. S'il te plait, viens dormir avec moi.

Face à mes supplications presque désespérées, il grogne de plaisir et me rend mon baiser. Finalement, il me hisse dans ses bras et m'emporte jusqu'à mon lit... son lit.

Nous nous écroulons sur le matelas et nous blottissons instantanément l'un contre l'autre. Ses mains parcourent respectueusement mon corps, traçant le dessin de ma colonne vertébrale, et il m'embrasse passionnément. La chaleur qui émane de sa peau, de son torse nu m'embrase. Je pars à la découverte des somptueuses courbes de son dos, ses épaules, sa nuque. Il me serre contre lui. Ses lèvres ne quittent pas les miennes. Tout est parfait. Je le désire autant qu'il me désire, et en cet instant, l'univers tout entier pourrait sombrer sans que nous nous en apercevions.

Il m'offre finalement uneplace au creux de ses bras, où je me glisse avec bonheur, enivrée, grisée parla passion. Les battements affolés de mon cœur peinent à se calmer. Dans moncou, le souffle d'Aaron finit par s'apaiser, et je m'endors enfin, mon corpscollé au sien. 

Les ChasseursWhere stories live. Discover now