Chapitre 8, Partie 1

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Ce n'est ni mon réveil, ni la lumière du couloir, ni un mauvais rêve qui me tire de mon sommeil le lendemain matin, mais une brusque alarme qui retentit dans la pièce à m'en faire exploser les tympans. Incapable de supporter le son plus longtemps, je peste et atteins la porte à tâtons.

Passant la tête à l'extérieur, je m'aperçois que toutes les autres sont closes mis à part celles d'Alyssa et de Tyler, qui dévoilent leurs visages endormis.

— Quelqu'un pourrait-il m'expliquer ce que c'est que ce raffut ? grogne mon ami.

Je m'apprête à répondre lorsque le bruit assourdissant cesse enfin, rétablissant un silence presque irréel.

— Bon, je suppose qu'il est inutile de se rendormir maintenant.

— Rendez-vous au réfectoire dans dix minutes, soupire Aly en faisant demi-tour.

— Alors les gars, on apprécie le réveil en douceur ?

Un blondinet moqueur lance la remarque lorsque nous nous asseyons et je comprends l'origine de l'alarme.

— Sérieusement ?

L'intéressé rigole avec son voisin, un homme un peu plus âgé, et frappe la table du plat de la main.

— C'est notre réveil, explique le premier. Ils ont installé ce système il y a un an ou deux. Ils devaient en avoir assez qu'on arrive en retard à l'entraînement. Il sonne six jours par semaine, et uniquement dans le couloir de la section combative. Ça fait souvent son petit effet aux nouveaux.

Ils rient une fois de plus et je ne peux m'empêcher d'esquisser un sourire discret. Tyler, entre autres, manquait régulièrement le début des exercices. Cela lui valait des remontrances et des punitions auxquelles il avait l'habitude. Il rigole d'ailleurs de bon cœur, en se sentant concerné, et passe sa main dans sa tignasse, la décoiffant un peu plus. Je croque dans mon petit pain et observe les tables alentour.

Comme les autres sections ne demandent pas d'entraînement spécifique, aucun réveil ne sonne dans leur couloir, et les deux tiers des places sont libres. J'aperçois Florence, installée devant un café et lisant le journal du matin, à une table quasiment vide.

Quelques agents discutent devant une tasse fumante, ou avalent rapidement leur petit-déjeuner, ne prenant même pas le temps de s'asseoir. Une odeur de café embaume la pièce ponctuée de raclement de chaises, de tintement de vaisselle et d'éclats de voix. La salle est vivante et conviviale, bien qu'elle soit loin d'être remplie.

Mes yeux s'égarent vers la table de la section principale, la seule complètement pleine. Les directeurs se doivent d'être matinaux et de montrer l'exemple, à l'égal de Kristina qui semble ne jamais dormir. Elle est déjà apprêtée et coiffée, et mâche un beignet tout en écoutant avec attention Karl Thomas, le responsable de la section informative. C'est un homme grand et fort, à la peau d'ébène, coincé dans un costume bleu nuit, abordant des anneaux à son oreille gauche et une chaîne d'argent autour du cou. Il a l'air assuré et expérimenté que requiert la section principale, mêlé à une touche d'arrogance. Je l'ai toujours beaucoup apprécié, à l'instar de la directrice de la section administrative : une petite femme âgée à l'allure suffisante, avec sa bouche serrée peinte en rouge vif, et ses iris bleus de faucons, répondant au nom de Nancy van Dielbler.

Mon regard divague à nouveau et croise son regard à lui. Il est face à moi, et lève ses yeux sombres de sa tasse en rencontrant les miens avec tant de facilité que je me demande s'il ne m'observait pas déjà. Non, bien sûr que non Am.

Aaron avale une gorgée de café, puis se détourne pour s'adresser à Kristina. Persuadée qu'il ne m'interceptera plus, je prends tout mon temps pour détailler ses cheveux bruns ébouriffés et son tee-shirt blanc qui dévoile son cou et une partie de ses épaules musclées. Sa peau est pâle, et je m'égare dans les dessins que forment les ombres et les courbes sous sa mâchoire, qui ne se desserre que peu. Soudain il tourne résolument la tête vers moi et je retiens mon souffle, comme il vient de me surprendre. Il me lance un regard d'avertissement on ne peut plus clair, suivi d'un imperceptible sourire narquois, avant de retourner à sa tasse fumante.

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