Chapitre vingt-deux

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— Détrompez-vous.Tout cela n'est qu'un jeu pour moi. Les otages pourraient m'être arrachés qu'ils perdureraient sous mon joug, tels des pantins exauceurs de désirs inassouvis.

— Vous êtes un grand malade... Je vous internerai de force.

Randy ne se vexa pas. Il avait la ferme intention de stopper tout individu qui oserait lui barrer la route vers la gloire.

— Mon acte a laissé une marque indélébile dans leur mémoire et il les hantera jusqu'à la dernière seconde, jusqu'à leur dernier souffle. À l'aube de la mort, ils supplieront le Tout-puissant d'en finir le plus vite possible pour oublier... Oublier ces horreurs qu'ils auront vues, entendues et pour lesquelles ils culpabiliseront, faute d'avoir choisi la lâcheté à l'affrontement.

— Vous vous entendez parler ?! s'égosilla Tremblay, le souffle court. Évidemment que je me ferais un plaisir de vous coffrer, espèce d'enflure !

Je retins ma respiration. La sergente s'était levée, le regard démuni de compassion. Seul un mépris incontestable transgressait la grâce de ses traits. La conversation s'envenimait à vue d'œil. J'ignorais où elle nous mènerait.

— Je comprends pourquoi Aaricia a réclamé le divorce, s'emporta-t-elle finalement. Vous êtes imbu de votre personne, impassible et effronté. Je suis sûre que votre physique s'accorde avec votre force d'esprit : sec et pusillanime !

Je fronçai les sourcils, observant Clémence à la dérobée qui traduisait ce jargon trop soutenu pour moi : « sec et qui manque d'audace ».

— Vous me manquez de respect ? Vous me prenez pour votre putain de proie ? vociféra Randy.

Un silence lourd de sens plana. À cet instant, le ministre de l'Intérieur entra discrètement dans la pièce. Il semblait ne pas comprendre ce revirement de situation.

— Rien ne me fera me jeter en pâture ! À partir de maintenant, à chaque nouvelle heure qui passera, un otage subira mes atteintes.

Il interrompit brutalement la communication. Laissé coi, j'espérais de tout mon être qu'il n'ait pas le temps de toucher à qui que ce soit avant que nous nous pointions sur les lieux.

L'inspectrice tremblait de tout son long tant elle fulminait. Nous ne pûmes en discuter, comme un appel nous tira de notre transe :

— Le ravisseur détient les otages au centre pénitentiaire d'Astwick ! Il se trouvait à un quart d'heure de Cambridge depuis tout ce temps !

Je restai bouche bée. Mon regard s'illumina, Tremblay comprit l'allusion.

— Les hélicoptères ont atterri, m'informa l'enquêteur en charge des investigations. Le groupe d'intervention reste sur place, on attend vos instructions.

*

18:44

En cette fin de journée qui m'avait paru durer une éternité, nous atteignîmes le Saint Graal : un endroit tout à fait abominable, fermé de toutes parts.

Sur le trajet, j'avais perfectionné la négociation qui suivrait – la plus décisive et la plus ardue de toutes. Si j'avais été au contact direct du criminel, à présent j'allais la mener avec mon binôme.

Tremblay et moi portions une double casquette : négociation et intervention – ce qui s'avérait rare au sein de la police britannique. Ainsi nous réussissions, la plupart du temps, à mener nos missions à bien.

D'abord, nous transformâmes le lieu de la prise d'assaut en bulle. Dans mon oreillette demeurait la voix rauque de Randy Oloveiros. Sa future ex-femme se tenait près de nous, le regard mortifié par l'angoisse.

FugaceWhere stories live. Discover now