L'Astriale - Les Ombres de l'...

By MarieEBlue

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« Ils sont quatre. Certains ne se connaissent pas. Et pourtant, les fils de leur vie sont indéniablement nou... More

Avant-propos
Lexique
Les personnages
Autres informations
Prologue
Chapitre 1.I : Les Merveilles
Chapitre 1.II
Chapitre 1.III
Chapitre 1.IV
Chapitre 2.I : Les deux étrangers d'Opaltys
Chapitre 2.II
Chapitre 2.III
Chapitre 2.IV
Chapitre 3.I : Un bal de capes
Chapitre 3.II
Chapitre 3.III
Chapitre 4.I : La Cité du Commerce
Chapitre 4.II
Chapitre 5.I : Rien qu'un bras cassé
Chapitre 5.II
Chapitre 5.III
Chapitre 6.I : L'Histoire des Espions
Chapitre 6.II
Chapitre 6.III
Chapitre 7.I : L'Antre du Corbeau
Chapitre 7.II
Chapitre 8.I : Capriner enneigé
Chapitre 8.II
Chapitre 9.I : Le retour de la sénatrice
Chapitre 9.II
Chapitre 9.III
Chapitre 10 : L'Attentat de Genibel
Chapitre 11.I : Joyeuse Aneylanh
Chapitre 11.II
Chapitre 12.I : La voix de la sagesse
Chapitre 12.II
Chapitre 12.III
Chapitre 13.I : Monocle
Chapitre 13.II
Chapitre 14.I : Un, deux, trois points de sutures
Chapitre 14.II
Chapitre 15.I : La trêve
Chapitre 15.II
Chapitre 15.III
Chapitre 16.I : La curiosité est un vilain défaut
Chapitre 16.II
Chapitre 16.III
Chapitre 16.IV
Chapitre 17.I : Ah, le sale gosse !
Chapitre 17.II
Chapitre 17.III
Chapitre 17.IV
Chapitre 18.I : La tombée de la Chouette
Chapitre 18.II
Chapitre 18.III
Chapitre 18.IV
Chapitre 19.I : L'Ombre Blanche
Chapitre 19.II
Chapitre 19.III
Chapitre 19.IV
Chapitre 19.V
Chapitre 20.I : Les maires
Chapitre 20.II
Chapitre 20.III
Chapitre 20.IV
Chapitre 20.V
Chapitre 20.VI
Chapitre 21.I : Reprendre confiance en soi
Chapitre 21.II
Chapitre 21.III
Chapitre 22.I : L'épreuve de la Décision
Chapitre 22.II
Chapitre 23.I : L'incendie
Chapitre 23.II
Chapitre 23.III
Chapitre 24.I : L'épreuve de la Représentation
Chapitre 24.II
Chapitre 25.I : Fait comme un Rat
Chapitre 26.I : Cérémonie funèbre
Chapitre 26.II
Chapitre 26.III
Chapitre 27.I : L'épreuve de l'Éducation
Chapitre 27.II
Chapitre 27.III
Chapitre 27.IV
Chapitre 27.V
Chapitre 28.I : Amie ou ennemie ?
Chapitre 28.II
Chapitre 29.I : Qui est Madame Draner ?
Chapitre 29.II
Chapitre 29.III
Chapitre 30.I : La fin de l'Apprentie...
Chapitre 30.II
Chapitre 30.III
Chapitre 31.I : ...et la naissance de l'Espionne
Chapitre 31.II
Chapitre 31.III
Épilogue
Remerciements
Bonus
Tome 2

Chapitre 25.II

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By MarieEBlue

– « 𝓔dala du Feu s'est fait empoisonnée lors de la dernière bataille de la Deuxième Grande Guerre, en 1092. Les théories divergent quant au poison utilisé, cependant, tous les historiens sont en accord sur le fait qu'Edala du Feu a souffert. Dans certains manuscrits, il est même dit qu'Absolyn du Soleil est resté aux côtés d'Edala jusqu'à ce qu'elle rende son dernier souffle. Ce qui peut très bien être possible, étant donné que les deux ont combattus côte à côte. Edala du Feu s'est éteinte le 21 Versiner 1092, au milieu de la nuit », lut à voix haute Renard.

Téo l'applaudit. En deux ans, il avait fait d'excellents progrès. Satisfait, il releva la tête vers elle.

– Tu vois, je t'avais bien dit que tu y arriverais. Maintenant, tu parviens à lire sans buter sur aucun mot ! Je suis vraiment une excellente professeur, affirma-t-elle en relevant le menton.

– C'est vrai que tu y es pour beaucoup. Jamais je n'aurais pensé être capable de lire correctement un jour. Même mon orthographe n'est plus aussi catastrophique qu'avant. Merci.

Elle haussa les épaules, l'air désinvolte, même si elle sentait ses joues rosir devant le regard reconnaissant de Renard. À force de rester avec lui – avec ces cours du matin, de combat pour elle, de lecture pour lui – il s'était ouvert petit à petit à elle.

Pas la peine de le nier, elle l'avait dévisagé pendant dix bonnes secondes la première fois qu'elle l'avait vu lui sourire, juste après avoir lu un paragraphe sur lequel il avait à peine buté.

Pour elle, Renard était son supérieur, son professeur — et aussi son élève. Elle ne pouvait pas le voir comme un ami. Pourtant, c'était ce qu'ils étaient : des amis.

– La moitié du travail te revient quand même, déclara-t-elle en se déplaçant dans la bibliothèque. D'accord, je suis fantastique, et sans moi, tu ne te serais certainement pas amélioré. Mais c'est toi qui as fait les efforts nécessaire pour évoluer. Ce n'est pas moi qui lisais à ta pl...

Elle ne termina pas sa phrase, s'étant encore emmêlée les pieds. Elle tomba dans un grand bruit, et grogna de douleur tandis que son coude avait frappé contre le pied de la table.

– Encore par terre ? fit Renard en se penchant sur le côté pour l'apercevoir.

– Mes pieds ont de nouveau comploté contre moi. Ils sont sacrément traîtres. J'ai envisagé de les dénoncer, sauf que j'ai réalisé que sans eux, je ne pourrais plus marcher. Alors j'ai opté pour la solution la plus simple : garder ces deux traîtres. Ils pourraient être reconnaissants, pourtant, ils ont le chic pour me ridiculiser.

Elle se releva d'un bond, s'épousseta. Elle fusilla du regard Renard, qui osa se moquer d'elle en riant doucement. Elle posa ses mains sur ses hanches.

– Non mais oh ! Je t'interdis de rire de ma maladresse !

– Tu m'interdis, toi ?

Renard ferma le livre, se mit debout. Il faisait facilement une tête de plus que Téo, qui se retrouva à lever la sienne pour ne pas détourner son regard. Puis elle rosit violemment en se rappelant ce qu'elle venait de dire.

– Euh, ce n'est pas ce que je voulais dire, bredouilla-t-elle. Bien sûr, je n'ai pas le droit de te donner des ordres. C'est logique ; je suis Apprentie, tu es Espion, bientôt Mentor. Je suis navrée, et je te présente mes excuses.

Elle en avait assez des punitions. Les corvées de vaisselle l'agaçaient au plus haut point. Surtout depuis que Saleann et Wuly étaient devenus Espions – ils portaient désormais les noms de Papillon et Canard – , et qu'ils n'étaient plus là pour l'accompagner dans ses punitions. Certes, il restait Sarpentyn, qui était un de ses amis proches. Sauf qu'il se trouvait qu'elle avait fait une bêtise, l'année précédente, avec lui.

Saleann et elle avait trouvé la cave des Espions. En douce, elles avaient organisé une fête, avec les Apprentis. C'était la première fois que Téo buvait, et elle avait été si saoule, qu'elle avait oublié toute la soirée. Le lendemain, elle avait appris qu'elle avait séduis Sarpentyn, avant de l'embrasser devant tous.

Depuis, il était amoureux d'elle. Embêtant, car elle, elle l'aimait comme un ami. Ainsi, elle se sentait parfois mal à l'aise avec lui, ce qui était dommage.

Elle se retrouvait ainsi à passer de plus en plus de temps seule. Et, ayant mis en œuvre le conseil de Nylo, elle tentait de créer deux trois choses. Sa meilleure réussite était une résine, qui ne faisait aucun bruit en tombant au sol. Elle n'en avait pas encore parlé, mais Nylo insistait pour qu'elle la présente à un Mentor. Elle verrait plus tard.

Donc, pour en revenir à son affaire, ce n'était pas le moment de se faire punir pour un manque de respect supplémentaire à un supérieur.

Elle remarqua alors le sourcil légèrement haussé de Renard, signe de malice.

– Ce n'est pas vrai ! Tu es encore en train de me faire tourner en bourrique ! pesta-t-elle en levant les bras au plafond.

– Il faut dire qu'il est facile de te faire sortir de tes gonds, Téonary. C'est fascinant de voir que tu réagis toujours excessivement.

Au lieu de se vexer, elle lui offrit un grand sourire. Elle avait prit cette habitude, avec tout le monde, sachant que c'était déconcertant.

– Merci, ce compliment me va droit au cœur. Je suis une comédienne née.

– Tu ne changeras jamais, à ce que je vois.

– Pourquoi changer quand on est moi ?

Cette fois-ci, Renard s'esclaffa franchement. Il se laissait de plus en plus souvent aller, avec elle. Cela lui plaisait bien.

– Allez, on devrait aller à la salle d'entraînement, si tu veux avoir ton cours avant le petit-déjeuner, fit-il en rangeant le livre.

– C'est vrai : je dois encore m'améliorer, répondit-elle avec férocité.

– C'est bien d'avoir des objectifs, mais tu sais que je t'ai presque tout appris de ce que je savais ?

Elle fronça les sourcils, fit la moue, sans répondre.

— Quoi ? demanda Renard en voyant son air.

— Il y a une chose que tu ne m'as pas apprise.

Il attendit qu'elle poursuive. Elle réfléchit à la façon de la formuler.

— Souvent, avança-t-elle, tu sais qui arrive avant même que je le vois ou l'entende. Regarde : hier matin, alors que tu m'entraînais, tu savais que Fennec allait entrer dans la salle pour préparer son cours. Or, il est impossible que tu l'aies vu ou entendu. Comment as-tu fait ?

L'air de Renard se referma, comme s'il était contrarié. Était-il gêné qu'elle s'en soit rendue compte, ou s'agissait-il d'une technique qu'il ne voulait pas lui enseigner ?

— Ça, je ne peux pas te l'apprendre, fit-il lentement.

À son ton, il ne voulait pas développer. Pas de chance : il venait de titiller la curiosité de Téo. Elle voulait vraiment comprendre.

— Pourquoi ?

— Tu ne lâcheras pas le morceau, hein ?

Elle secoua la tête. Renard soupira, en rangeant sa chaise, comme pour gagner du temps.

— Je sais qui arrive parce que je sens les ombres, finit-il par avouer.

Téo cilla plusieurs fois, croyant à une plaisanterie. Or ce n'était pas le genre de Renard. Comprenant cela, sa bouche forma un « o ».

— Comment cela, tu sens les ombres ? Tu as un talent, comme Saleann ? Comment fais-tu ?

— C'est compliqué à expliquer. (Un silence, puis il reprit :) Imagine que chaque ombre a une texture, un poids. À partir d'un certain périmètre, je parviens à sentir cette ombre. Si je la connais, je sais à qui elle appartient. C'est assez fatiguant, mais ça fonctionne sans arrêt.

Téo le dévisagea, stupéfaite, alors que Renard évitait résolument son regard. Il avait un talent, et il ne l'avait dit à personne, à part à elle.

— Je ne dirai rien, je te le jure, déclara-t-elle. Mais pourquoi n'avoir dit à personne que tu avais un talent ? Tout le monde le sait, pour Saleann, tu ne serais pas le premier ! Surtout que, pour le coup, ton talent est plus utile que celui de Sal !

Il se gratta derrière l'oreille, comme gêné.

— Je n'ai pas envie d'attirer l'attention. C'est difficile à maîtriser. Je ne veux pas que ça se sache. Sissi ?

— Étoile. Renard ?

— Quoi ?

— Mon ombre, elle ressemble à quoi ?

— Elle est fine, et légère. Un peu comme de la soie. Je la trouve facilement reconnaissable.

Téo fit la grimace.

— Je déteste la soie, grogna-t-elle.

— Je ne peux rien y faire, désolé. Et maintenant, tu comprends pourquoi je ne peux pas t'apprendre cette technique.

— En effet. Je n'ai aucun talent, moi. (Elle secoua sa tête, décida de changer de sujet, et sourit). C'est vrai ce que tu as dit ?

Il lui jeta un regard, en haussant légèrement un sourcil, comme pour dire « à propos ? ».

— Que tu n'as plus rien à m'apprendre.

— Étoile.

– Vraiment ?

Sa suspicion n'était pas feinte. Certes, cela faisait longtemps qu'il l'entraînait, et elle passerait son Espionnage l'an prochain, mais tout de même ! Elle n'avait pas la sensation d'être la meilleure, et cela était dérangeant.

Renard acquiesça, après avoir jeté un dernier regard à la bibliothèque et s'être dirigé vers la sortie. Téo le suivit.

– Étoile. Me fais pas ce regard ; le nie pas, tu es en train de te dire que ça ne suffit pas, je te connais assez pour le voir. Écoute, tu dois être la meilleure Apprentie. Tu bats tout tes camarades, non ?

– Hum hum.

– Et c'est déjà excellent. Est-ce que tu te rappelles tes débuts ? Tu étais une vraie catastrophe, incapable de tenir correctement une épée. Toi aussi, tu as fait des progrès exceptionnels. Je pense que les Mentors ne s'attendaient pas à une telle amélioration. Je suis certain que tu es aussi capable de battre les Espions qui étaient en Espionnage avec toi. Tu te rends compte de tes progrès, quand même ?

– Étoile, bien sûr. Je ne suis pas une cervelle d'oiseau.

– Bien. Alors contente-toi de ça pour l'instant. Et si tu veux vraiment écraser les autres Espions, tu n'auras qu'à perfectionner les techniques que je t'ai appris, voire en apprendre de nouvelles. Sissi ?

– Étoile. Mais ne t'étonne pas si vous ressemblez tous à des crêpes, plus tard.

– C'est plutôt le contraire qui me surprendrait.

– De toute façon, je suis une surprise à moi toute seule.

Téo sentit qu'il se détendait, loin de la conversation sur son talent, alors qu'il refermait la porte de la bibliothèque. Cela la tranquillisa : elle ne souhaitait pas le mettre trop dans l'embarras.

– Quoi ? C'est la vérité, déclara-t-elle en le frappant sur le bras. Tu connais peut-être une personne plus surprenante que moi ?

– Ah ! Ça m'étonnerait beaucoup ! Personne n'a un ego aussi développé que le tiens !

Il s'esclaffe enfin devant son air outré. D'accord, il n'avait pas tord. Elle était sacrément orgueilleuse, et elle aimait beaucoup complimenter sa propre personne. Elle essaya de se mettre à la place de Renard pour comprendre ce qu'il y avait de drôle. Elle se vit soudain, en train d'affirmer haut et fort qu'elle était la plus belle, la plus forte, la plus intelligente, la plus maladroite, la plus drôle, et cetera... et elle devait bien avouer qu'elle était vraiment drôle, si bien qu'elle avala la goutte à son tour.

– Il se passe quoi ici ? On vous entend rire à l'autre bout du couloir...

Téo se tourna vivement, son rire s'étrangla dans sa gorge. Emyria avait l'air vraiment contrariée. Soudain, elle se remémora ce qu'elle avait découvert. Emyria était clairement amoureuse de Renard, et elle les découvrait tous deux, seuls, à une heure matinale, en train de rire ensemble, alors que Renard restait fermé avec tout le monde. Sauf elle.

Téo fut surprise de ne pas être encore morte sous le regard empli de jalousie d'Emyria.

– Ahu, Emyria, comment tu vas ? demanda Renard.

Difficile de croire au fait qu'il y avait encore dix secondes, il avait un sourire aux lèvres. La transformation était fascinante.

Emyria lui offrit un sourire crispé. Elle ignora superbement Téo, ce qui blessa cette dernière. Après tout, elle considérait Emyria comme une amie, et elles avaient été Apprenties toutes les deux pendant un petit moment.

– Ahu. Très bien, Jill, merci de t'en inquiéter.

– Tu es bien matinale. Tu as une mission de prévue ?

– Pas pour l'instant. Je me suis réveillée plus tôt à cause de Saleann ; elle a la chambre à côté de la mienne, et elle a dû faire un cauchemar au vue des papillons qui ont attaqués ma fenêtre. Il faut vraiment qu'elle ait plus de maîtrise sur son talent.

Téo pinça les lèvres. Elle ne savait pas ce qu'il prenait à Emyria pour être aussi désagréable. Tout le monde savait que Saleann avait du mal, avec son talent, et pour cause ! Personne ne pouvait lui apprendre à le maîtriser. Puis, même si elle le niait, Téo se doutait que son amie avait peur de dormir seule, dans sa chambre d'Espionne.

Elle avait envie de le dire à Emyria, mais cela ne ferait qu'envenimer les choses.

Et maintenant, elle comprenait un peu mieux la répulsion de Renard à reconnaître qu'il avait un talent : cela lui épargnait les remarques de ce genre.

– Ah, c'est bien dommage. J'espère que Saleann ne fera plus de cauchemars, pour que tu puisses bien dormir. On se voit plus tard.

Renard tourna les talons sans autre procédé, faisant sursauter Téo, qui hésita deux secondes avant de le suivre.

– Tu te rappelles que ce soir, on fête le départ prochain de Louisiam ? cria Emyria.

Renard s'arrêta, Téo faillit lui rentrer dedans. Il tourna la tête.

– Avec toi, je sais que je ne raterai pas le départ d'Otocyon.

Emyria rougit, certainement de contrariété. Louisiam – Otocyon – était tombé amoureux d'une bélier Denataise qu'il avait rencontré en mission. D'après ce qu'on disait, c'était réciproque, et ils avaient échangé par lettres depuis plus d'un an. Désormais, il voulait la demander en mariage. Or, pour cela, il devait quitter la confrérie.

Cela avait peiné Téo, car elle appréciait beaucoup Louisiam. Mais en même temps, elle était heureuse pour lui. Il lui manquerait. Elle n'eut pas le temps d'y réfléchir plus amplement, car tous trois entendirent un cri. Renard fut le premier à reconnaître la voix.

– C'est Serval. Quelque chose de grave a dû se passer.

Téo, toujours aussi impulsive, courut dans la direction du cri de Serval. Elle jeta un coup d'œil derrière elle, vit qu'Emyria et Renard la suivaient. Bien qu'elle n'en avait pas le droit, elle tourna dans les quartiers des Espions, tandis que ces derniers sortaient de leur chambre, l'air endormi.

Une personne bondit hors de sa chambre, Téo ne parvint pas à l'éviter. Ainsi, elle rentra dans Saleann, dont les cheveux partaient dans tous les sens.

– Sal ! Je crois que quelque chose est arrivé à ta mère !

– Alors je me suis pas trompée ; c'était bien sa voix !

Téo se releva, suivit son amie, qui connaissait bien mieux les lieux qu'elle. Elles tournèrent dans un nouveau couloir. Tandis que Saleann fonçait vers sa mère, Serval, et sa sœur, Beryna, Téo s'arrêta, le temps d'observer l'étrange scène se déroulant sous ses yeux.

Pour une fois, Nylo était passée de l'autre côté de la Porte des Secrets. Des fois, quand il y en avait, elle amenait du courrier aux Espions, même si cela était plus que rare. Visiblement, il devait en avoir aujourd'hui, à la lettre que serrait Serval contre-elle, prostrée au sol devant une boîte assez étrange.

– Il se passe quoi ?

Téo faillit sursauter. Wuly venait de la rejoindre, les yeux bouffis de sommeil, les cheveux décoiffés.

– Je ne sais pas, mais je crois que c'est grave.

Elle sut ce qu'était la boîte au moment où Saleann et Beryna lisaient la lettre. Il s'agissait d'une urne funéraire. Et aux cris que lâchèrent à leur tour les deux sœurs, Téo devina quelles cendres elle contenait. Celles de Rat, le compagnon de Serval, et le père de Saleann et Beryna.

Choquée, elle mit ses deux mains sur sa bouche. Derrière elle, elle sentait que des Espions les rejoignaient, jetant un regard curieux, avant de s'éclipser en comprenant qu'il serait bien indiscret de leur part de rester. Téo aurait fait de même, si elle était en état.

Un de ses camarades avait trouvé la mort en mission. C'était impossible.

Nylo tentait de relever Serval, mais celle-ci refusait, serrant désormais l'urne contre elle, en larmes. À ses côtés, ses filles ne cessaient de pleurer, dans les bras l'une de l'autre.

Les Mentors arrivèrent alors à leur tour. Téo se décala pour les laisser passer, rentra dans Wuly, qui était resté. Fennec et Dytal s'entretinrent avec Nylo, tandis que Chouette et Loup s'accroupissaient près de Serval.

Téo ne pouvait laisser son amie seule. Elle s'empressa d'aller la rejoindre. Elle ne pouvait la laisser maintenant, alors que son monde s'écroulait.

– Paty, mon paty à moi, gémit Saleann.

En remarquant Téo, elle se laissa tomber dans ses bras, serrant toujours sa sœur contre-elle. Téo l'attrapa de justesse, alors que les deux Espionnes pleuraient de plus belle.

Emyria les rejoignit à son tour. Téo leva un regard désemparé vers elle : ce n'était pas le moment pour qu'elle lui fasse une crise de jalousie. Mais Emyria ne lui accorda même pas un regard, s'accroupit, avant de tirer doucement Beryna vers elle. Évidemment. Téo avait oublié qu'elles étaient aussi proches que Saleann et elle-même.

Sans sa sœur, cette dernière serra Téo, en hurlant contre-elle. Serval et Beryna lui firent écho, juste à côté.

– Allez, Ada, pleurer ne ramènera pas Rat. Pense qu'il est désormais en Infernyn, en sécurité, et qu'il t'attend, affirma Chouette.

La Mentor releva de force Serval, Loup s'empressa de les aider. Téo les regarda faire, avant de voir Dytal lui faire signe de relever Saleann (tout en poursuivant sa discussion avec Nylo, Fennec, et désormais Renard et Wuly), alors qu'Emyria faisait déjà de même avec Beryna.

– Je vais t'aider à te mettre debout, murmura Téo. Tu m'entends, Sal ?

Son amie acquiesça tout contre elle, et Téo la soutint tout en se mettant debout, puisant dans ses forces. Toutefois, Saleann était plus grande qu'elle, si bien qu'elle avait du mal à garder l'équilibre.

Elle avait la force nécessaire, mais vacilla à cause de la grande taille de son amie. Elle serait très certainement tombée si Renard n'avait par remarqué sa grimace, et s'était précipité pour l'aider. Elle le remercia, puis il lui fit signe qu'il s'en occupait.

Chouette et Loup soutenaient Serval, tandis qu'Emyria avait passé un bras sous celui de Beryna, et que Renard prenait Saleann dans ses bras, tant elle était incapable de tenir debout sous le poids de la douleur. Téo se doutait qu'ils allaient les mener à un endroit calme, elle leur faisait confiance, même si elle les aurait bien suivi.

Ainsi, elle rejoignit Nylo, Dytal, Fennec et Wuly. Elle devait bien l'avouer, elle était assez secouée par ce qu'elle venait de voir.

En jetant un coup d'œil au dehors, elle vit qu'un grand soleil brillait déjà. C'était injuste. Il devrait pleuvoir. Ce jour était triste.

– Qui est-ce qui lui a fait cela ? demanda-t-elle, maussade, en ayant un vague geste vers l'urne qu'avait reprit Nylo.

Cela ne parut surprendre personne qu'elle pose cette question, certainement parce que sa curiosité était connue de tous. De plus, elle se trouvait toujours là où elle ne devrait pas être.

À son plus grand étonnement (même si rien ne le laissait deviner), Fennec lui tendit la lettre, que Serval avait laissé tomber. Elle la prit, et fronça les sourcils en la lisant à voix haute :

J'ai surpris l'Espion Rat à me suivre. Comme il de notoriété que je suis un ancien Assassin, je peux vous affirmer que c'est bien grâce à moi que votre compagnon n'est plus de ce monde. Et je tiens à vous faire savoir que chaque membre de votre confrérie subira le même sort si je croise son chemin. En espérant m'être bien fait comprendre, Synolab Enwel, associé de Telia Marlpe, maire d'Amrynen.

Elle rendit la lettre à Fennec. Elle se souvint de la conversation qu'elle avait eu avec Saleann, Dytal, Sarpentyn et Wuly, lorsque le Mentor avait constaté qu'il n'y avait presque aucune information sur lui ; visiblement, il semblait être encore plus dangereux que ce qu'ils avaient pensé.

– Et maintenant, qu'allons-nous faire ? questionna-t-elle.

Nylo soupira, passa une main qui se voulait réconfortant dans son dos. Même ses cheveux violets avaient triste mine.

– Rendre des hommages à Rat, enfant, affirma Fennec. Puis on aura plus qu'à prier pour que l'une de nos missions nous envoie vers Amrynen, pour qu'on puisse venger Rat.

Téo se souvint alors de la règle quatorze de la Charte des Espions, qui était une légère variante de l'article 44.5 de la Constitution d'Astriale.

Tout Espion tué par un Garde, un Voleur, ou un Assassin pourra être vengé par un autre Espion si celui-ci se rend sur le lieu du meurtre lors d'une de ses missions.

Téo se promit d'être cette Espionne. Cet homme, Synolab Enwel, venait de blesser à jamais sa meilleure amie. Elle ne serait pas en paix tant qu'elle ne lui aura pas rendu la pareille.
___
Publié le 21/08/2021

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