L'Astriale - Les Ombres de l'Hiver T1 [TERMINÉ]

Chapitre 15.I : La trêve

Le conseil d'Amrynen possède douze sièges à pourvoir, sans compter les places qui reviennent de droit au sénateur Poisson et au maire de la cité. Chaque siège représente une catégorie d'Amrynois, et chaque siège a le même pouvoir, pour préserver l'égalité de tous.
La Solyn, région de l'Astriale, partie 3 « Amrynen », d'Absolyn Laampe, an 1404.

𝓚an cilla. Une fois, puis deux, juste avant de se frotter les yeux. Avait-il une hallucination, où l'Originale – aujourd'hui était un jour pair – était-elle installée à la table du petit déjeuner ?

  Après sa rencontre de la veille avec l'étrange personne et le petit Milho, Kan ne s'était pas attendu à revoir l'Originale avant au moins deux jours (le temps que sa migraine liée à leur discussion disparaisse). Visiblement, c'était sans compter sur le fait que sa mère adoptive, Noal, avait eut besoin de l'aide de l'Originale dès le matin.

  En temps normal, le petit déjeuner était prit uniquement entre Noal, Thyllineg Orgel, Kan, et parfois un invité ou un conseiller. Et encore, cela restait rare, car son père adoptif souhaitait passer au moins un repas avec uniquement sa famille, et pas ces « hypocrites d'aristos », comme il le disait si bien.

  Sauf que sa mère semblait ne pas avoir respecté cette condition ce matin.

  Kan dévisagea l'Originale, assise face à une assiette emplie de viennoiseries, l'air ravi. Toutefois, il savait que les mimiques de l'Originale étaient toutes aussi mystérieuses que leur propriétaire. Il se fit la réflexion que c'était bien la première fois qu'elle était invitée dès le matin, car d'après ce qu'il avait entendu dire, on laissait l'Originale faire la grasse matinée, sous risque qu'elle passer tout le reste de sa journée à embêter les Monoclais.

  — Bonjour, marmotta Kan avant de s'installer à sa place, entre ses parents, juste en face de l'Originale qui déclarait dans le même temps :

  – Si le chasseur place son piège à la sortie du terrier du lapin, le lapin ne sera pas pris au piège tant qu'il ne sort pas du terrier.

  Sa mère sembla méditer ces paroles quelques temps, après avoir rendu son salut à Kan. Ce dernier, encore grognon à cause du matin, se tourna vers son père, qui était en train de se servir. Kan se demanda s'il l'avait remarqué, jusqu'à ce qu'il lui dise :

  – Crois-moi, je suis tout aussi perdu que toi lorsque je les entends parler toutes les deux.

  – Mais alors, comment Noal fait-elle pour la comprendre ? questionna Kan.

  – Je n'en sais rien. Peut-être que, finalement, ces d'énigmes qu'elle lisait sans cesse quand nous étions plus jeunes ont servi à quelque chose, ou alors la rumeur affirmant que les vierges femmes sont plus perspicaces que les hommes est peut-être fondée. Dans tous les cas, je ne comprends sa passion à ruiner notre petit-déjeuner en discutant par énigme.

  Sa mère, ayant tourné les yeux vers eux à la mention de son prénom, ne put retenir un sourire. L'Originale remarqua que l'attention de son interlocutrice n'était plus sur elle, haussa les épaules pour elle-même en s'arrêtant de parler, et en profita pour manger un peu.

  – Ou alors, peut-être que je ne décrypte pas ses paroles, mais que j'écoute ce qu'elle dit, répondit sa mère. Et puis, n'est-ce pas agréable de faire jouer son cerveau dès le matin, Thyll ? Tu savais bien qu'il s'agissait d'un de mes passes-temps favoris en m'épousant.

  – Oh non, par pitié, ne vous mettez pas à parler par devinettes, s'il vous plaît ! geignit Kan en massacrant accidentellement sa brioche.

  Lui n'était pas du genre bien réveillé dès le matin. Aux Merveilles, il était toujours le dernier à se lever, et ne supportait pas que l'on parle trop sérieusement avec lui avant au moins neuf heures.