Elle le sait : la vie est une bataille. Ses décisions sont ses seules armes et elle a choisi de ne plus céder à la tentation pour ne pas perdre un nouveau combat.
À vingt et un ans, Harmonie quitte la France pour oublier la tragédie qui a boulevers...
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Je n'ai pas croisé Chase de la semaine et pour cause, je l'ai évité autant que possible. Dès qu'il entrait dans mon champ de vision, je faisais demi-tour, faisant mine de ne pas l'avoir vu, de ne pas l'entendre ou de ne pas avoir de temps à lui accorder. Il a redoublé d'efforts pour se rapprocher de moi. J'ai l'impression qu'il me suit. Il est toujours là, partout où je vais, et plus j'essaye de l'éviter, plus je le croise. Depuis notre virée nocturne en début de semaine, je me sens terriblement mal, bien plus qu'auparavant. J'ai envie d'être avec lui autant que je rêve qu'il disparaisse de ma vie. J'aimerais pouvoir l'embrasser, le toucher, me coucher près de lui. J'aimerais vraiment, mais je n'y arrive pas et toutes ces envies inassouvies commencent à me peser. Je me sens oppressée, un poids bien plus lourd que moi pèse sur mes épaules. J'étouffe dès que je le vois. Il est le fruit défendu. Il est tout ce dont j'ai envie, mais tout ce qui me fera replonger, tout ce qui m'anéantira à jamais. Je ne me suis pas encore totalement relevée de ma chute, il va m'achever avant que je ne retrouve enfin mon équilibre. Alors je lutte depuis une semaine et le fuis autant que je le peux. Parce qu'il a raison, putain ! Je vais craquer !
J'enfile ma tenue noire et rejoins la caisse du cinéma. Je travaille ici, le soir, depuis quelques jours, à un quart d'heure à peine à pied de l'université. J'ouvre la caisse à côté de celle d'Ethan et lui souris. J'ai été surprise de retrouver l'étudiant en art, rencontré la semaine passée, en arrivant ici. Il m'avait envoyé un texto la veille pour me revoir et je ne lui avais pas répondu. Ça m'apprendra, mon karma m'a rattrapée ! C'est gênée que je l'ai salué, partagée entre le soulagement de ne pas bosser en compagnie d'un inconnu et l'embarras de passer mes soirées avec lui. Je ne sais pas si passer autant de temps avec lui est une bonne chose, mais ce n'est pas comme si j'avais le choix.
- Tu as passé une bonne journée ? me demande-t-il. - On peut dire ça, et toi ? - Pas mauvaise.
Il encaisse l'argent des deux adolescents, rend la monnaie et après leur avoir donné les tickets, il se tourne vers moi. Il est encore trop tôt pour qu'il y ait foule mais ça ne devrait plus tarder. D'après mon collègue, les vendredis soir sont mouvementés. J'espère parvenir à gérer ma caisse et à ne pas mettre trop de temps à servir les clients.
- Ça te dirait qu'on se voit, un de ces soirs ?
La proposition d'Ethan me surprend bien plus qu'elle ne le devrait. Pourquoi suis-je surprise ? Ce n'est pas comme si je n'avais pas remarqué qu'il m'apprécie un peu, voire même beaucoup. Son regard est fuyant, il lui a sûrement fallu beaucoup de courage pour me le demander, surtout après le vent que je lui ai mis par message. Le pauvre, il est gêné et c'est de ma faute.
- Pourquoi pas, me contenté-je de répondre.
Ni oui, ni non. Ne pas se mouiller, c'est un peu devenu ma spécialité ces derniers mois. Et après tout, comme je l'ai si bien fait tatouer sur ma cheville droite : « pas de promesse, pas de déception ».
