"J'ai peur"

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Après avoir demandé conseil à Émile, j'en viens à prendre une décision cruciale. Je vais confronter Johnson, de but en blanc, sans cacher notre relation à Chris et moi. Il est temps d'arrêter de regarder mon amour se faire toucher par un autre enseignant en chaleur. Alors que nous tournons un corridor, je distingue au loin la tignasse de mon blond partir en furie et sa main dépasser un peu du mur. Il se trame quelque chose de bizarre mais je n'en suis pas sûr. J'ai seulement eu le temps de la voir filer rapidement. Où peut-il bien aller? Quelque temps plus tard, Émile m'annonce qu'il doit se rendre au boulot et me plante là. Pourtant, il ne travaille pas lui aujourd'hui! Où est ce qu'il peut bien aller alors? Pris d'une incommensurable solitude, je pensa à Chris qui s'était enfuit rapidement il y a peu. J'arpenta alors dans les couloirs et alla à son bureau. Je toqua trois coups et ouvris la porte. Personne. Je me rendis alors vers la salle des profs. Je fis comme précédemment et scanna l'intérieur du local. Curieusement, il n'y était pas. Une autre et horrible possibilité me vint à l'esprit, ravivant ma brûlante envie de le récupérer rapidement. Le bruit de mes pas accélérait, au même rythme que les battements de mon coeur. Je devais me dépêcher, je le sais, je le sens. Je ne suis pas un superhéros comme dans les comics ou à la télé, sentant le danger quand il y en a un et part combattre le méchant. C'est rare que je fais confiance à mon instinct, mais présentement j'en ressent le besoin. Mes pieds commencèrent d'eux mêmes à s'impatienter, trouvant la cadence trop lente. Je leur donnèrent alors la permission de se défouler et aussitôt, me voilà à courir dans les couloirs. Peut-être que je m'en fais pour un rien, qu'ils ne font que discuter et comme à l'habitude Johnson a fait tomber les dossier de Chris et profite de la vue. Pourtant il y a quelque chose de plus, quelque chose qui me tracasse. Je repense à la façon qu'il s'est fait traîner par Mickaël, je repasse cette scène dans ma tête et soudain, comme une énorme gifle, je comprends tout. Mon mauvais pressentiment et ma course pressante. La main du blond qui s'accroche au vide comme si celui-ci allait lui tenir la main et le sauver. Je réalise que j'ai été un sale con et que j'aurais dû planter Émile dès l'instant où j'ai perçu la scène. À présent que je suis devant la porte du local, dans un petit corridor isolé et loin des autres, je peux entendre ce qu'il se trame. J'ouvris la porte et entra, sans cogner. Pas la peine, j'ai pas de temps à perdre. Je posa un pieds dans la classe puis, vit mon pire cauchemar se dérouler sous mes yeux.

Des gémissements.
Des grognements.
Des claquements.
Des mots.
Mickaël.

J'arrive trop tard. Une queue qui n'est pas la mienne, dans l'antre de MON amant. Je resta figé là, regardant le corps ballant de celui que j'aime basculer au mouvement répétitif des hanches de celui qui l'agresse. Johnson ne se prit même pas la peine d'arrêter, il se contenta plutôt de me regarder longuement et me faire son sourire démoniaque qui dévoila ses dents blanches. Mon coeur me pinça, mes yeux me brûlèrent, mes poings se serrèrent et ma haine explosa. Je ferma la porte et avança, non, courus à lui et lui décrocha un crochet de droite. Il sortit de Chris et bascula par en arrière. Sans lui laisser le temps d'encaisser, mon poing alla s'enfoncer violemment dans son ventre, le faisant tomber à genoux au sol. Alors que cela devrait me suffire, mon regard glissa sur le blond, étendu sur le bureau, celui que j'aime, souffrir ainsi et être détruit mentalement et physiquement au point de s'évanouir. J'hurla, faisant exploser mes poumons tandis que je décrocha un incroyable coup de pied dans l'estomac du châtain. Couché à plat ventre au sol, il haletait et gémissait de douleur. Dégoûtant. Il est dégoûtant. Je le retourna avec mon pieds et je pus voir dans son regard qu'il ne comprenait pas ma réaction. J'embarqua sur l'ordure et lui donna un, deux puis trois coups dans la mâchoire. Je me pencha ensuite à son oreille et lui résuma ce que j'étais venu lui dire au départ.

-On touche pas à ce qui m'appartient.

Me sentant épuisé de gaspiller mon temps pour ce déchet, je me releva, me rendit au bureau et observa mon bel ange. Son pantalon était retombé à ses genoux et on pouvait voir du liquide blanc qui coulait entre ses jambes. Ses yeux étaient clos et des sillons de larmes rougies traçaient leur chemin sur ses douces joues. Cette vision d'horreur me secoua et je ne perdis plus de temps, je pris un mouchoir dans la petite boîte sur le bureau et essuya ses jambes sans laisser aucune trace de Mickaël. J'en pris un autre et effaça les larmes qui avaient coulées et occasionnées des sillons d'eau sur ses pommettes. Je remonta ensuite son pantalon, ramassa sa ceinture par terre et alla la lui passer autour de la taille. Je l'attacha à la hâte, commençant à perdre mon sang froid. Une main me caressa le bras, me faisant sursauter. La main douce de mon amant prit la mienne et la serra faiblement. Aussitôt, je la lui pris aussi et encra mes yeux dans les siens, entrouverts et emplis de larmes.

-J'ai peur.

Sa voix se fit comme un murmure, tremblante et faible. Une larme coula, puis deux. Cette fois je craqua, je n'en pu plus, je laissa sortir mes émotions. Je pleura, chaque larme plus douloureuse que la précédente. J'entoura mon amant dans mes bras, le serrant comme possible. Je m'accrocha à lui, comme s'il dépendait de ma vie, ce qui est sans doute le cas en fait. Ma prise se referma de plus en plus autour de celui qui partage ma vie.

-Je sais mon coeur, je sais. Je suis là maintenant, n'ai plus peur bébé.

Je le pris dans mes bras et ensemble nous sortîmes du local. J'appela un taxi et attendis un peu plus loin de l'école là où je lui ai dit de venir. Il arriva quelques minutes plus tard. À peine était-t'il garé que j'ouvrais déjà la portière. Une fois dans la voiture, Chris couché sur mes genoux, je donna mon adresse au chauffeur et lui dit de ne pas perdre de temps. Celui-ci comprit, aligna son rétroviseur et se hâta à appuyer sur la pédale. Accroche toi bébé, on vas y arriver, je suis là maintenant.

Mon tuteurWhere stories live. Discover now