for him. - idy 1

Chapitre 10

Chapitre 10

                Je ne sais pas pourquoi mais je n'ai pas raccroché et lui non plus. On est resté comme ça sans se parler encore un moment jusqu'à ce que je me décide enfin à me lever. Si George me dit où il se trouve, c'est qu'il a accepté mon semblant d'excuses et que ça ne le dérange pas que je le rejoigne. En tout cas, je l'espère parce que je suis en train de traverser l'appartement avec difficulté vu que les gens sont tous entassés les uns sur les autres. Malgré le bruit qui m'entoure et qui m'empêche d'entendre le souffle de George, je garde quand même mon portable à mon oreille.

                J'atteins la porte-fenêtre, l'ouvre lentement et pose un pied à l'extérieur. Le balcon est minuscule mais il est là, à ma gauche, assis par terre, le dos contre le mur de l'immeuble, son portable visé à son oreille, me cachant ainsi son visage. Il n'a pas encore remarqué ma présence alors je l'observe en silence. Il a ramené ses jambes contre son torse, l'endroit étant trop exigu pour une toute autre position de toute façon. Il a posé les coudes sur ses genoux. Ses cheveux sont attachés négligemment en hauteur. Je remarque alors que pour une fois, il a mis de la couleur dans sa tenue. Une chemise à carreaux bordeaux.

« J'aime bien. » dis-je toujours au téléphone. « Ta chemise. »

                Cependant, il comprend que ma voix ne vient pas que du combiné et il tourne enfin la tête vers moi, baissant en même temps son téléphone. Ses yeux ont retrouvé leur couleur verte et il n'y a plus aucune trace de colère ou de déception. Je détourne les yeux en sentant un grand soulagement s'emparer de moi. Je raccroche et enfouis mon iPhone dans une de mes poches. En silence, je m'approche et m'installe à côté de lui, dans la même position. Je note inconsciemment qu'il est plus grand et plus fin que moi.

Comme lorsque nous étions au téléphone, nous laissons le silence nous envelopper, nos regards fixés devant nous. Pour m'occuper, je compte le nombre de fenêtres se trouvant sur la façade de l'immeuble d'en face. Mais il y en a trop et j'aurais l'air stupide à lever la tête pour compter celles à partir du septième étage. Avec la paume des mains, je frotte mes genoux, mal à l'aise. On ne va peut-être pas rester ainsi toute la nuit... Mais je ne sais pas quoi dire et puis les mots de Mary me reviennent. Peut-être que je devrais expliquer ma réaction calmement, ici. Je dois au moins prendre le risque d'essayer. Je prends une grande inspiration et chuchote presque :

« Je... Je n'ai jamais pensé que tu étais un monstre ou quoique ce soit de ce genre. Vraiment. »

                George, à côté de moi, ne dit rien et ne me donne même pas l'impression de m'avoir entendu parler. Je passe une main sur ma nuque et continue, ne voulant pas retomber dans le silence :

« Tu n'y es pas du tout quand tu dis que je suis homophobe. Tu couches avec le mec que tu veux même si c'est ce crétin de D.J. ! »

                Je ne sais pas d'où me vient cette fin de phrase. Peut-être du fait que je n'apprécie pas ce D.J. qui lui-même ne m'apprécie pas non plus. C'est sorti tout seul mais au moins, cette déclaration aura fait tourner la tête de George dans ma direction. Son regard me semble rieur.

« Je veux dire... Tu couches avec qui tu veux. » Je me reprends. « J'ai juste été surpris. »

                George reprend sa position initiale et n'ouvre pas la bouche. Je déglutis.

« Alors, je m'excuse sincèrement si ce que j'ai dit, ou ce que j'ai fait... ou encore la façon dont j'ai dit les choses t'ont... Blessé. Ce n'était vraiment pas mon but. »

Je me fais craquer le cou avant de poser mon menton sur mes bras pliés sur les genoux. Ainsi je ne le vois plus et je pense que c'est mieux pour moi parce que là, j'ai envie de le secouer pour lui demander de dire quelque chose. S'il m'a dit où le trouver et s'il ne m'a pas encore sauté à la gorge, c'est que je ne le dérange pas, non ? Alors pourquoi rester muet maintenant que je me suis excusé ?