P - Présidents

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Brice Rabaste, Chef de cabinet

Valérie Lubrioli a de la mémoire et elle ne souffre pas que l'on abaisse la France. D'où son Panthéon et son « Enfer », cette partie de la bibliothèque où l'on range les ouvrages qui ne doivent pas être vus. Si elle avait trouvé le moyen, je sais qu'elle aurait fait débaptiser bon nombre de rues à qui on a donné le nom d'hommes politiques qui n'ont réussi que leur carrière et, in fine, à laisser leur nom mais en oubliant la France quand ils ne l'ont pas abîmée. Selon elle, que des villes communistes aient donné à leurs rues les noms de vedettes du PC du passé se comprend mais que les plaques restent aujourd'hui est une incongruité. Que chaque Président de la République se voit dédicacer rues ou monuments quel que soit son bilan, bon ou mauvais, simplement parce que c'est la tradition, la hérisse. Elle m'a d'ailleurs suggéré au moins deux fois de faire débaptiser l'avenue François Mitterrand à Chelles, attribution qui remonte bien sûr à mon prédécesseur socialiste. A l'écouter, il faudrait aussi rebaptiser, comme à l'origine, la Bibliothèque François-Mitterrand « Bibliothèque de France » - « Ca a plus d'allure, vous ne trouvez pas ? » - et le Musée du Quai Branly – Jacques Chirac « Musée du Quai Branly » - « Au moins, Branly a été un scientifique qui a nous laissé quelque chose de tangible, la radio. »

La Présidente n'a bien sûr pas engagé de chasse aux sorcières, aucune plaque n'a été descendue, alors qu'elle a revu par ailleurs les règles d'attribution de la Légion d'Honneur, agacée de constater ces promotions pléthoriques, les personnes promues et les motifs de ces promotions. De fait, trois fois moins de personnes sont promues aujourd'hui. Néanmoins, par petite touche, la Présidente sait rectifier l'histoire à titre posthume. Les décès des anciens Présidents Giscard d'Estaing et Jacques Chirac en ont donné une illustration. A observer comment elle est intervenue alors, on a nul mal à voir qui elle juge avoir dignement dirigé le Pays, qui elle voue à l'oubli. Cruelle parfois.

8 mai 2020 : décès de VGE à 94 ans dans son hôtel particulier de la rue de Bénouville

Allocution télévisée de Madame la Présidente de la République.

Mes chers compatriotes, le Président Valéry Giscard d'Estaing est décédé aujourd'hui.

Près de 39 ans jour pour jour après son départ de l'Elysée, pour beaucoup de jeunes Français, il ne reste peut-être qu'un nom dans un livre d'histoire et peu de souvenirs de l'homme qu'il était et du Président qu'il a été. Peut-être se souviennent-ils de ce vieux monsieur qui portait beau, à l'esprit vif, toujours pertinent quand il commentait l'évolution du monde ou parlait littérature, une passion qui l'a amené à l'Académie Française.

Avant, il y a ce 8 mai 1945, il y a 75 ans aujourd'hui : c'est sur son char, arrivé jusqu'en Autriche que le jeune Valéry Giscard d'Estaing, 19 ans, qui avait quitté ses études pour libérer Paris et s'engager pour poursuivre la guerre, apprend la nouvelle de la victoire. C'était son premier engagement pour la France. Ce n'était qu'un début.

Pour ma part, le privilège de l'âge, je me souviens adolescente avoir découvert ce Président, jeune, grand, d'une grande intelligence qui représentait si bien la France sur la scène internationale et qui avait su nouer des liens privilégiés avec les dirigeants du monde pour faire avancer les grands dossiers de l'époque :

           o la poursuite du rapprochement franco-allemand avec le Chancelier Helmut Schmidt ;

          o la construction européenne avec la création du Conseil européen, l'élection du Parlement européen au suffrage universel, la création du système monétaire européen ;

          o la concertation mondiale pour faire face aux deux chocs pétroliers avec la création du G5, devenu depuis le G7.

La France de Valéry Giscard d'Estaing était une voie écoutée. De cela j'étais fière.

NAO, Dictionnaire amoureux du quinquennatWhere stories live. Discover now