NAO, Dictionnaire amoureux du quinquennat

H - Hollande (François)

Brice Rabaste, Chef de Cabinet

Valérie Lubrioli a construit son attitude présidentielle pour partie en contrepoint de ses prédécesseurs. C'est vrai quant à la séparation stricte entre sa fonction et sa vie privée dont rien n'a jamais filtré pendant cinq ans ; vrai aussi dans ses réactions aux moments d'émotions nationales pour lesquels, jusqu'alors, nous nous étions habitués à voir le Président, le Premier Ministre et une nuée de ministres se précipiter aussitôt sur place devant les caméras pour nous dire combien ils étaient touchés et en empathie avec les victimes, leurs proches et les Français en général. Cette mise en scène des sentiments et des larmes que les Politiques avant elle utilisaient jusqu'à la corde pour redresser leur image est à mille lieux de la conception de la politique de Valérie Lubrioli. Elle n'assiste pas aux matchs de foot simplement parce que ce sport ne l'intéresse pas ; hormis l'attentat du Zénith, elle ne se déplace pas sur le lieu d'un accident routier ou ferroviaire parce que sa présence n'apporte rien. Cette absence de faux-semblants a pu amener certains media à lui reprocher une certaine froideur. Loin s'en faut. Elle est juste authentique. Elle ne joue pas un rôle ; elle exerce une fonction, elle assure ses responsabilités, elle agit : voilà tout ce qu'elle donne à montrer et ce sur quoi elle veut être jugée.

L'anti-Hollande. Un homme politique de carrière et non un homme d'Etat, un communiquant et non un « faiseur », un faux « Président normal » et un vrai « Prince » dans les faits, un homme affable, jouant la fausse proximité, et non un chef d'Etat, « Monsieur petites blagues » et non « Monsieur le Président ». Hollande, le contre-modèle de Valérie Lubrioli. Dans un certain sens, il aura beaucoup contribué au succès du présent quinquennat.

Un souvenir daté du 3 mai 2017, au lendemain de l'investiture :

- Brice Rabaste : Comment s'est passé la discussion avec Hollande.

- Valérie Lubrioli : Il faut que je vous raconte, c'est horrible. J'ai failli avoir un fou rire, c'est atroce. Il y avait un ordre du jour que nous avons déroulé, j'ai fini par me décontracter. J'ai été surprise. Quant à la fin il m'a demandé : « Si maintenant, vous avez des sujets que nous n'avons pas déjà abordés sur lesquels vous voudriez des conseils, c'est bien naturellement, dans la tradition républicaine de la continuité des pouvoirs, que je me prêterais à l'exercice en vous apportant le fruit de mon expérience ». J'ai failli éclater de rire ! François Hollande voulait me donner des conseils ! Je ne connais rien à la politique, je ne sais pas comment fonctionne un gouvernement, je ne sais pas comment je vais me débrouiller dans une rencontre internationale menée en dix langues, mais ce n'est pas vers Fran-çois-Ho-llan-de que j'irai prendre conseil ! J'ai eu du mal, je vous assure. Mais je ne pouvais quand même pas lui dire « Monsieur le Président, l'observation de votre quinquennat m'a déjà appris la moitié du métier : tout ce qu'il ne fallait pas faire » !