Chapitre 14.I : Un, deux, trois points de sutures

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  Téo sortit son odomax, le tournant distraitement entre ses mains. Il s'agissait d'une drôle de machine. De forme cylindrique, couleur de rouille, l'odomax faisait à peine la longueur de sa main. Il semblait lisse en apparence, à part que l'on pouvait retrouver deux petites fentes, de la largeur d'un ongle, opposée sur cette surface lisse. Sur un des rebords ronds, plusieurs trous étaient bouchés, mais Téo savait que c'était à cet endroit que l'on remettait de l'encre dans la machine. Sur l'autre, on voyait une sorte de carré grillagé.

  L'odomax fonctionnait de la façon suivante. On le déposait dans la pièce dont ou voulait connaître l'odeur. L'air était aspiré par le carré grillagé, avant d'être analysé. Ensuite, on glissait une bandelette de papier dans une des fentes, qui ressortait à l'opposée, coloriée par les encres. Chaque couleur correspondait à une plante qu'il fallait utiliser pour créer un parfum à l'odeur de la salle.

  Lors de l'épreuve de l'Odorat, un Apprenti devait montrer qu'il savait utiliser l'odomax. Il retrouvait la composition de l'air pour pouvoir ensuite la reproduire, en apprenant par cœur la correspondance des couleurs de l'odomax. C'était Nylo qui leur avait apprit à utiliser ce dernier, car il se trouvait qu'avant d'être guérisseuse, elle avait été parfumeuse.

  Après cette épreuve, il y avait eu celle sur la capacité à changer d'identité. Téo s'était découvert, durant ces cours, un talent d'actrice qu'elle ne soupçonnait pas. Puis il y avait eu l'épreuve d'Histoire des Espions, sur laquelle elle avait beaucoup travaillé — si elle n'avait pas la moyenne, elle ne comprenait pas. Et juste avant, elle avait passé l'épreuve d'Art et Défense, matière dans laquelle elle s'en sortait bien mieux depuis qu'elle prenait des entraînements avec Renard. Même si elle restait encore une catastrophe.

  Des cris retentirent. Téo sursauta en reconnaissant la voix de Saleann.

  Le lendemain, il ne lui resterait plus que les épreuves sur son don de force, sur les Corvées (tout bon Espion devait être capable de savoir cuisiner, balayer, et faire toutes sortes de corvées, au cas où il devrait se faire passer pour un domestique), sur les Bonnes-Manières (elle ne se faisait aucune inquiétude), l'Endurance et le Physique (s'il fallait s'échapper, elle ne devait être dérangée par rien), et la Stratégie (là, par contre, cela risquait d'être compliqué de s'en sortir, car visiblement, elle créait des plans trop irréalisables).

  Quelle était donc l'épreuve que Saleann était en train de passer, et dont Téo serait la suivante ? Rien que son nom donnait des frissons à cette dernière. Il s'agissait tout simplement de la Résistance à la Torture.

  Si un Espion se faisait attraper, il ne devait rien dévoiler. Pour cela, on l'entraînait à résister. Téo savait qu'on ne les torturait pas pour de vrai. Les Espions possédaient un produit, créé aux environs de leurs débuts, appelé « soffrace-un », qui donnait à l'illusion à celui qui le consommait de souffrir atrocement.

  Téo n'en avait pas encore absorbé une dose d'examen, celle la plus forte, elle supportait tout juste celle d'entraînements aux Apprentis de onze ans. Elle craignait donc cette épreuve.

  Cependant, elle souhaitait avoir les meilleurs résultats possibles. Pourquoi donc ? Tout simplement parce les résultats de ses examens seraient consultés par Arysia Taureau, revenue d'Ylthenas la veille, et qu'elle voulait lui prouvait qu'elle était loin d'être mauvaise. Elle ne voulait pas l'impressionner – elle n'en avait que faire – mais elle souhaitait juste lui montrer qu'un jour, elle parviendrait à devenir la meilleure Apprentie.

  Saleann cessa de crier. Quelques instants plus tard, la porte se rouvrit, Téo retint un hoquet de choc en voyant le visage verdâtre de son amie.

  – Téo, à toi.

  Elle releva les yeux vers Fennec. Déglutissant, elle rangea son odomax, avant de se lever de sa chaise, pour suivre le Mentor dans la salle d'examen. Celle-ci était toute simple. Uniquement meublée d'une table et de deux chaises, elle ne servait qu'aux épreuves qui se passaient individuellement. Les rideaux, fins, étaient tirés, mais laissaient passer la luminosité extérieure. Téo songea qu'elle aurait préféré être dehors, pour profiter de la chaleur de l'été, même si elle n'aimait pas cette saison, d'ordinaire.

L'Astriale - Les Ombres de l'Hiver T1 [TERMINÉ]Where stories live. Discover now