Chapitre 8 - Manon

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Léa se rapproche de Marc.

- Dis, Marc, on compte sur toi pour nous faire découvrir la meilleure spécialité du coin !

- Oui les filles, justement je dois aller voir Feng li, Madee m'a demandé de prendre des Kung Chub (Beignets de crevette) chez lui pour ce soir. Il prépare également le meilleur Massaman de Pattaya, vous allez vous régalez.

Nous suivons Marc dans un dédale de petites ruelles dans cette ville, où Il y règne une grande agitation, les cris des femmes qui invitent les passants à venir voir leurs produits sur les étals, les locaux avec leurs vélos surchargés de marchandises qui se fraient un chemin dans cet enchevêtrement de vendeurs. Des plats mijotent sur des barbecues à roulettes improvisés.

Je suis surtout interpelée par cette multitude d'affiches publicitaires, sur les murs ou suspendues au-dessus de la rue, montrant des images de femmes nues. Là, je réalise que, certes la Thaïlande est un pays magnifique par ces temples, cette végétation luxuriante, ces maisons traditionnelles et cette culture bouddhiste, mais à Pattaya, dans ces rues, il n'y a rien de féerique, les reportages que j'avais pu voir il y a quelques années me reviennent en mémoire et les mots horribles de prostitution, tourisme sexuel, abus de jeunes filles... m'éclatent au visage ! Oui, à cette heure de la journée ce sont des étals de vêtements, de nourriture ou de souvenirs, qui sont mis en avant pour les touristes du jour. Mais à la nuit tombée, ce ne sera plus des étalages de fruits exotiques qui seront proposés mais des jeunes filles.

Léa a passé son bras sous le mien et me guide à la suite de Marc. Je lui lance un regard, choqué.

- Oui Manon, la première fois que l'on vient ici et que l'on comprend ce qui s'y passe là nuit, ça peut choquer.

- Mais comment, si ouvertement, toute cette publicité... Elles ne sont pas des marchandises.

- Je suis d'accord avec toi, mais on n'y peut pas grand-chose. Il y a la misère d'un côté et l'argent des touristes de l'autre. C'est un moyen de subsistance rapide.

- C'est à vomir !

Nous nous arrêtons devant une boutique d'alimentation. Dans le fond, il y a quelques tables et chaises. Marc nous invite à nous asseoir. Il se dirige vers le comptoir où je l'entends parler en thaï, je suppose, à un vieil homme de petite taille, le dos voûté, le visage marqué par les rides, sûrement M. Feng li.

Marc pose trois bouteilles d'eau sur la table, prend place en face de nous, et nous indique qu'il a passé la commande. Il voit ma tête sûrement décomposée et me demande :

- Tout va bien Manon ?

Avec un sourire crispé, je répond :

- Le thème "Tourisme sexuel" vient de m'éclater à la figure !

- Oui, j'aurais sûrement dû te prévenir !

- Non, c'est juste que je réalise aussi la chance que j'ai eu de te rencontrer et que tu m'aies proposé de m'accueillir dans ta maison. Car si tu m'avais posée en ville comme ça, je ne sais pas comment, je me serais débrouillée. J'ai fait preuve d'inconscience, en débarquant ici comme je l'ai fait.

- Tu n'as pas à t'inquiéter pour ça ! Nous sommes ravis de t'avoir à la maison, le temps que tu voudras. Justement, Maï m'a dit qu'elle t'adorait et Madee est plus qu'heureuse que tu sois avec nous.

- Je ne pourrai jamais vous remercier assez pour ce que vous faites pour moi !

- Tu n'as pas à le faire...

Nous sommes interrompus par le vieux monsieur qui nous apporte trois bols. Marc le remercie en thaï, puis il nous explique le plat. C'est du Massaman, un curry doux au poisson cuisiné avec des pommes de terre, des oignons, des cacahuètes, le tout mijoté dans du lait de coco et du curry. Je redoute l'épicé, mais tout va bien : la saveur est relevée mais elle ne brûle pas. À la fin de notre plat, on nous apporte une salade de fruits exotiques. La fraîcheur des fruits aide à atténuer le curry.

Le vieux monsieur pose à côté de Marc un sac. Ce sont des Kung Chub, des beignets de crevette pour ce soir. Après avoir payé, il nous dit qu'il a encore quelques courses à faire et Léa lui répond que nous allons chercher des vêtements pour moi. Nous nous séparons, mais il nous rappelle de rester prudentes et surtout ensemble.

Léa me fait rentrer dans une friperie et après quelques minutes me montre des shorts courts, des mini-jupes et des hauts. Elle me pousse dans une sorte de cabine d'essayage de fortune pour me faire essayer. Je suis agréablement surprise de noter que ces vêtements sont plutôt sympas et à ma taille. Pour les hauts, c'est un peu plus étroit avec ma poitrine, qui est plus généreuse comparée aux formes des femmes thaïes. La jeune vendeuse s'y met aussi à la demande de Léa pour l'aider à trouver des hauts à ma taille .

J'ai choisi une dizaine de pièces, Léa aussi, mais je réalise que je n'ai que des euros, je l'explique à Léa qui me répond qu'elle s'en occupe et que je la rembourserai ; elle m'indique également qu'il font le change à la réception de l'hôtel au besoin. Elle se met à négocier pour elle et moi en anglais le lot de vêtements que l'on a trouvé. Elle conclut : 8 € pour mes vêtements. Je suis plus que ravie de la bonne affaire et valide.

Je lui explique que j'aurais également besoin d'un maillot de bain et elle m'emmène dans une autre boutique. Je regarde des maillots une pièce mais Léa me présente des bikinis. Je teste, mais le problème "poitrine" se fait sentir.

- C'est quoi ça ? me demande Léa qui vient de tirer le rideau et regarde mon dos où les bleus sont toujours visibles.

- Ça va, ce n'est rien !

- Rien ! répète-t-elle choquée, mais il t'est arrivé quoi ?

- C'est compliqué ! je réponds en fuyant son regard.

- C'est ton mec qui t'a fait ça ?

- Une dispute... Il a perdu le contrôle ! Je réponds gênée.

- Là, ce n'est pas qu'une perte de contrôle, il t'a battue !

- Non...

- Ah mais oui ! Bien sûr ! C'est pour cela que tu as débarqué ici, sans réservation, sans vêtements...

- ... Oui !

- Bon là, on va finir nos achats ! On va te prendre deux maillots de bain et on va te trouver aussi un tee-shirt que tu pourras porter pour te baigner version "le soleil est trop dangereux pour ma peau blanche", Ok ! me dit-elle en mimant les guillemets.

Je la regarde : - Merci !

- Mais ne crois pas que je vais passer là-dessus, tu vas tout me raconter, je crois que tu en as besoin !

- Il n'y a pas grand chose...

- Tut tut... Plus tard !

Nous trouvons ce qu'il me faut et payons.

En sortant, nous repartons en direction du parking du Big Bouddha, le temps a filé rapidement. Nous devons rejoindre le minibus.

Échappée vers la passion [ Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant