Chapitre 71

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Lorsque je sors, il n'est plus présent et j'en profite pour retrouver mon petit coin tranquille. J'ai besoin de souffler tous cela, c'est trop, beaucoup trop. Je rentre dans la serre et me met au travail, la musique dans les oreilles m'aide à me concentrer uniquement sur mon travail.

Elle commence enfin à ressembler à quelque chose de plus ordonnée, elle me plait de plus en plus. Je l'organise comme je le souhaite et avec la neige qui tombe dehors cela donne une vision totalement différente qui me plait bien plus.

Des pas se font entendre, très rapide. La personne qui monte est très pressée. Je quitte mes écouteurs et j'entends.

- Lynn ?!

- Dans la serre. Répondis-je en reconnaissant la voix du prince.

Il entre et ferme la porte avant de se rapprocher de moi doucement comme si il avait peur de ma réaction.

- Tu vas mieux ? Je... Je

- Ecoute Adriel, si je ne te parle pas de mon passé c'est que cela donne des choses comme tout à l'heure... Je ne sais plus me contrôler quand on me parle de cela... Je vais faire des choses que je ne contrôle pas... je veux pas faire du mal à qui que ce soit...

- Tu ne me feras pas de mal Lynn...

- Si, tu ne me connais pas sous cette facette. Personne ne le sait...

- Il faut que tu en parles, que tu t'ouvres sinon cela va te travailler toute ta vie Lynn...

Je baisse la tête, je ne me sens pas prête à lui dire. Pas prête à faire tout ce que cela demande. Je lui tourne le dos et regarde la fleur dont je m'occuper avant son arrivée.

Sa main attrape doucement celle que j'avais posé sur l'une des feuilles.

- Lynn... Si tu veux pas m'en parler, je ne le prendrai pas mal... Je veux juste être avec toi pour le peu de temps qu'il nous reste... Tu vas partir et j'ai l'impression que nous sommes toujours séparés...

Je ne retourne et le regarde. Mes chaussures plates et mon mètre soixante-six ne suffisent pas à ce que j'atteigne ses épaules. Dans ses yeux je peux voir la peine, la tristesse. Cependant il y a aussi autre chose de plus, quelque chose que personne ne m'a jamais adressé.

- Je veux juste être proche de toi, prendre soin de toi, te protéger et pourtant j'ai l'impression de ne jamais y arriver. Comme si le monde entier voulait nous séparer. Il nous reste six jours, seulement six et après nous nous faisons nos adieux... J'aimerai que durant ces six jours nous arrêtions de nous disputer pour un rien... Je voudrais pouvoir passer des beaux moments avec toi. Te voir sourire, t'entendre rire et me parler de la magie de cette forêt que tu aimes tant... C'est nos six derniers jours Lynn...

Je l'écoute, ce qu'il dit me touche, beaucoup. Je le regarde, et je ne sais pas quoi répondre. Soudain j'entends quelqu'un souffler.

- Mais vous attendez quoi pour vous embrasser ?

Je me retourne vers la porte et vois Annastassia qui tente de se cacher. Adriel soupire alors que je rigole.

- Tu peux sortir de ta cachette Maman.

Cette phrase intensifie encore plus mon rire et je peux voir du coin de l'œil la femme venir vers nous. J'ai l'impression d'être face à une adolescente qui espionne sa meilleure amie. Lorsque je me calme enfin je leur fais un petit sourire. Adriel semble pas très heureux d'avoir été coupé et moi je ne peux m'empêcher de la remercier silencieusement. Qu'est-ce que je pourrais bien lui répondre ?

Que j'en ai aussi envie de passer ce temps-là avec lui mais, que nous ne savons pas faire autrement qu'en nous hurlant dessus. Que son envie de me protéger n'est pas utile, car je sais déjà que Stephan ne me fera aucun mal. Qu'il devrait plutôt se concentrer sur le traiter et non sur moi. Mais tout cela ne ferait que créer une nouvelle crise et je n'en ai pas l'envie.

- Et si nous descendions Lynn.

Je me contente de sourire à Anastassia et d'attraper la main que me tend son fils pour finalement quitter les lieux.

Encore une fois notre trajet se fait dans le silence et nous allons vers ''nos'' appartements. Lorsque nous entrons le silence devient plus pesant et je ne peux m'empêcher de voir le piano. Si cela peut détendre un peu l'atmosphère je ne vais pas m'en priver.

Adriel me tourne le dos et je me place discrètement derrière le clavier. Je pose mes mains dessus et commence à jouer. Le prince se retourne et me regarde jouer comme si je lui offrais le plus beau cadeau du monde. Je me contente de regarder la partition me sentant rougir.

Je me laisse porter par la musique oubliant le monde qui m'entoure et pourtant je sens encore son regard sur moi. Comme si, pour une fois quelqu'un faisait partie intégrante de ma bulle, de mon refuge.

La musique vient à se terminer mais je n'ai pas envie. Cependant mes doigts s'arrêtent sur la dernière note. Je relève le regard et constate que le fils du roi reste bloqué sur moi. Après quelques secondes il déclare.

- C'est magnifique...vraiment.

Je me contente d'hausser les épaules et de me relever. Je ne sais plus rien, ni le jour, ni quelle heure il est. Juste qu'il se trouve à mes côtés et que je me sens apaisée.

- Il est quatorze heures passées et tu n'as encore rien mangé...

- Je n'ai pas faim Adriel. le coupe je.

- Et je ne te laisse pas le choix. On va aller dans les cuisines et je suis certain que Marie sera ravie de te faire quelque chose.

Il m'attrape le bras et nous descendons dans les cuisines. Nous avons toute juste le temps de poser le pied dans la cuisine que la chef nous a déjà installé à la table qui sert à éplucher les légumes.

Elle pose devant nous des assiettes et nous laisse tous les deux. Je dois avouer que cela m'étonne elle a pris l'habitude d'engager la conversation et de ne pas me quitter lorsque je viens ici.

Un nouveau silence s'installe, le prince me fixe et attend que je commence à manger. Je souffle signe de reddition et commence à manger. Comme toujours le repas est délicieux mais le regard que le prince pause sur moi est vraiment perturbant. Je me contente de fixer mon assiette et de ne jamais relever le regard.

- Excuse-moi si j'ai été trop direct tout à l'heure...

- Non...je... non ce n'est pas ce que tu penses... Je ne me suis tout simplement jamais retrouvée dans une de ces situations. Lorsque j'ai dû partir à chaque fois c'était... rapide.

Je sais que tu souhaites que l'on soit vraiment proche et ce que je vais dire ce n'est pas pour créer de nouveaux problèmes. Mais, il faut que tu prépares ce traiter et je ne devrai pas te prendre se temps...

- Je fais mes propres choix Lynn et si je choisi de te consacrer un peu plus de temps, je le fais.

- Mais si tout n'est pas prêt à temps ils vont croire que c'est un refus de coopération et nous allons avoir des ennuis.

- Tout sera prêt en temps et en heure ne t'inquiète pas pour cela.

Son ton est sans appel et je sais que quoi que je fasse il ne changera pas d'idée. Je me contente d'opiner et nous continuons de manger. Très vite il aborde le sujet de la forêt et je lui explique pourquoi elle me passionne tant et tout ce qui m'attache à elle.

Il m'écoute simplement posant toujours plus de questions et j'arrive même à le faire rire une première pour moi. 

Linéaire : Le Royaume perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant