Chapitre 58 - Émergence (partie 1)

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Janet entendit frapper à la porte de la maison.

Elle cessa de remuer son ragoût en râlant, s'il accrochait au fond de la cocotte la baronne serait furieuse. Enfin si elle était en état de le remarquer. Des semaines que cette bête s'incrustait comme de la moisissure. Et il semblerait qu'il était épuisant de garder lord Blake sous sa coupe. Lorsqu'il était conscient mais aussi alors qu'il était endormi et que Margaret devait se livrer sur lui à ses "rituels".

Elle refusait qu'il retourne dans sa demeure londonienne. Elle le voulait à sa merci même si cela sous entendait l'abrutir d'alcools et de drogues.

Décidément Janet n'y comprenait rien. Quel plaisir pouvait-on trouver à partager la vie d'un homme qui arrivait à peine à aligner deux pensées cohérentes ?

Elle l'avait surpris à regarder, l'œil vide, la lune en silence durant deux longues heures en faisant tournoyer une pièce entre ses doigts. Deux heures ! Sa maîtresse avait fini par lui griller le cerveau.

Elle jeta son torchon sur la console de l'entrée et ouvrit la porte à la volée, agacée de perdre son temps avec une livraison de vêtements sans doute. Des vêtements, toujours des vêtements et toujours plus de travail pour la pauvre Janet.

– Oui !

Son visage s'adoucit avant de se couvrir d'un sourire béat. Voilà un homme. D'une taille normale de six pieds, des cheveux bruns parfaitement coiffés, des yeux gris rieurs, un sourire à faire fondre le cœur d'une nonne.

– Bonjour mon p'tit, la salua-t-il d'une voix caressante en touchant son haut-de-forme du pommeau en argent de sa canne. Lord Blake est ici ?

– Bonjour, roucoula-t-elle. Oui, monsieur. Milord est ici.

– Parfait.

Sans attendre, il entra dans la maison.

– Mais monsieur !

– Est-il à l'étage ? Demanda le gentleman en indiquant le plafond de sa canne.

– Oui. Mais la baronne quant à elle, n'est pas à la maison !

– Quel dommage ! J'aurais tant voulu lui présenter mes hommages. Par chance cependant, c'est lord Blake que je veux voir.

Il monta les marches quatre à quatre, devançant ainsi toute tentative que la femme de chambre aurait pu entreprendre pour lui barrer la route.

– Mais je ne vous ai pas annoncé !

– Votre conscience professionnelle vous honore... miss ? Quel est votre nom mon petit ?

– Janet.

– Miss Janet ! N'ayez crainte chère enfant, Joshua et moi sommes de grands amis. Cette porte, je suppose ? Demanda-t-il en désignant la première.

– Oui. Mais ce n'est peut-être pas une bonne idée. Je crois qu'il dort. Et il peut être... bougon au réveil.

– Bougon, Blake ! C'est ridicule ! Lui qui est toujours de si charmante humeur. Et il est deux heures de l'après-midi. C'est un lève-tôt, vous savez ?

Apparemment il ne l'était plus pensa Aidan en entrant dans ce qui devait être la chambre de la baronne Mannings plongée dans l'obscurité. Il ferma derrière lui et tira le verrou afin que la femme de chambre ne le suive pas. La pauvre petite semblait absolument horrifiée par ce qui était en train de se passer.

Cela sentait le fauve et la luxure ici. Il porta son mouchoir parfumé à son nez, accessoire vital lorsqu'on vivait à Londres. Puis à tâtons, il se dirigea vers les fenêtres et les ouvrit toutes, les unes après les autres, à la volée après avoir tiré les lourds rideaux de velours pourpre qui les obstruaient.

Quand les loups se mangent entre euxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant