Chapitre 80 (Partie 4)

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Arcas quitta l'ancien chai.

Cerberus semblait avoir parfaitement repris ses esprits et se tenait aux côtés de son maître plus grand et massif qu'il ne l'avait jamais été. Sous son poil bringé ses muscles tressaillaient et le froid n'y était pour rien. Il était sans doute conscient du danger au-devant duquel ils courraient tous les deux. Et Arcas ressentait dans chaque particule de son propre corps, son impatience grandir en échos à la sienne.

Le meneur de loups se dirigea vers l'armurerie du camp, là où Darmain avait affirmé que Bosquet et l'état-major s'étaient retranchés pour échapper aux morts.

Suite à son hurlement, la brume avait reculé sur plusieurs dizaines de mètres autour de la prison et dévoilait, comme une plage à marée basse, des vestiges macabres. Hommes et chevaux gisaient, morts, mutilés, imbriqués et grotesques. Il y avait encore quelques temps, Arcas aurait pu être horrifié par ce spectacle. Il y a encore quelques heures, il aurait eu un mot, éventuellement une prière pour ces pauvres hères. À présent c'est à peine si son esprit notait leur présence tant il était anesthésié. Il trouva un sabre planté dans le corps déchiqueté d'un marin anglais. Sans doute avait-il fait parti de l'escorte d'un officier britannique, sans une pensée de plus pour le mort, il arracha la lame de son corps, puis la brume l'avala de nouveau. Il cessa de se fier à ses yeux et se laissa guider par l'odeur du sang frais au parfum métallique qui saturait l'air, plus il avançait plus s'y mêlait des relents de chair putride. Il était sur la bonne voie à n'en pas douter.

Quelqu'un s'approcha.

Cerberus gronda.

Arcas le ressentit mais n'entendit rien, le brouillard surnaturel faisait de nouveau son œuvre.

Le chien bondit. Sa mâchoire se referma sur le cou de sa proie qui n'eut pas le loisir d'esquisser un mouvement avant que le molosse ne lui broie les cervicales.

Le corps cessa de s'agiter.

Arcas rejoignit le molosse et se pencha sur sa victime. Il fronça le nez, l'odeur de pourriture qu'il dégageait était atroce. De son vivant, de ce que laissait deviner ses vêtements cet homme avait dû être un paysan. Il semblait être mort depuis plus d'une semaine. Il y avait donc plus qu'une escouade à combattre, les portes avaient été ouvertes et tout ce que les strygoïs avaient pu ramener à la vie dans cette péninsule se trouvait peut-être dans le fort à présent.

Après qu'il lui ait tranché proprement la tête pour plus de sécurité, Arcas reconstitua le probable déroulé des événements.

L'escouade miraculeusement réapparue avait été menée à l'infirmerie.

À la nuit tombée, les morts étaient passés à l'attaque. Ils avaient atteint les portes, sans doute tué les gardes et laissé entrer leurs frères d'infortune et leurs réanimateurs.

Et s'ils les contrôlaient, était-on en droit de se supposer que tuer les maîtres renverrait leurs créatures dans la tombe ?
Cela allait dans le sens de certaines légendes transcrites dans les carnets de Ludmilla. Il lui fallait tenter le coup, sinon la péninsule serait bientôt envahie par les morts-vivants. Il ignorait combien parcouraient déjà ces terres, prêts à frapper. Son seul réconfort était de savoir Diana et Jimmy pour l'instant à l'abri avec Spider à Balaklava. Mais s'il ne faisait rien, ils pourraient bientôt subir un sort encore pire que celui de sa pauvre petite Toula et il ne le tolèrerait pas, il en avait assez qu'on lui prenne les siens.

Il se releva et continua sa progression.

Avec un peu de chance les strygoïs avaient décidé de s'en prendre en personne à l'état-major.

Si ce n'était pas le cas, il n'avait aucune chance de les retrouver dans cette purée de pois, ils pouvaient être n'importe où.

Une vingtaine de pas plus loin, un pressentiment lui fit lever la tête et un homme lui tomba littéralement dessus. Il s'était jeté sur lui du haut d'un mirador surplombant le camp. Ils roulèrent au sol et Arcas tenta de repousser loin de sa gorge ses mâchoires qui claquaient avec tant de violence que des éclats de dents brisées lui griffèrent le visage.

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⏰ Dernière mise à jour : Feb 16 ⏰

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Quand les loups se mangent entre euxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant