CHAPITRE 63

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Nous sommes fin novembre et ça fait déjà plus d'un mois que Tya a emménagé chez moi. Je donne régulièrement de ses nouvelles à Monica et à son père, avec qui j'ai bien sympathisé. Je serai un jour son gendre, alors il valait mieux.

Tya a repris le travail deux semaines plus tôt et tout se passe relativement bien. Nous avons dû passer dans le bureau des RH pour "officialiser" notre relation, comme le souhaitait Monsieur Carter. Cassidy n'était pas spécialement ravie, argumentant que ce serait la porte ouverte à toutes les liaisons possibles au sein de l'entreprise, que cela gênerait au bon fonctionnement de la boîte, qu'il n'était pas normal de créer ainsi une exception pour une femme qui n'était rien d'autre au sein de Carter Corp qu'une "gratte-papier" insignifiante.

— Non mais qu'est-ce qui justifie qu'on lui donne un tel passe-droit ? s'était-elle exclamé.

Je vous aurais bien passé les détails tellement c'est elle, la personne dont l'entreprise pourrait se passer volontiers. Néanmoins, il nous fut extrêmement exaltant quand elle se rendit compte que Ryan Carter avait fait son entrée dans le bureau, sans s'être annoncé préalablement, créant la surprise sur le visage de notre harpie préférée, suivi d'un sentiment de panique quand le big boss prit la parole :

— Ce qui justifie un tel traitement de faveur ? Peut-être le fait que c'est grâce à mademoiselle Carlyle que vous avez encore un travail ?

Tya et moi nous sommes regardés, prêts à exploser de rire en la voyant se décomposer sous nos yeux et se confondre en excuses vis à vis du grand patron.

— C'est plutôt à celle que vous appelez "gratte-papier" insignifiante, que vous devriez les faire, a-t-il rétorqué du tac au tac. Je ne saurais que trop vous conseiller, mademoiselle Sparke, de vous tenir à carreaux car il m'a été fait part d'informations concernant votre propension à vous promener dans les couloirs afin, comble de l'hypocrisie, de reprocher aux employés de ne pas assez travailler.

Ô ultime jouissance.

Exultation intense.

Moment de pur bonheur orgasmique.

Il existe une justice en ce bas-monde !

Les bruits de couloir circulent finalement plutôt bien et remontent là où il leur est nécessaire d'être entendus et surtout écoutés. De retour à notre poste, nous avons été accueillis par des oeillades bienveillantes, parfois même admiratives.

La reprise pour ma belle s'est donc faite dans de bonnes conditions. Gabriel nous a même félicités pour nos fiançailles. Si je n'avais pas été assis...

Bref.

Aujourd'hui, je rentre seul à l'appartement où Tya doit déjà m'attendre. Elle a pris son après-midi car les spécialistes qui la suivent devaient lui faire repasser une batterie de tests et autres examens afin de valider définitivement la fin de son parcours de soins.

Elle fait de moins en moins de cauchemars, ne sursaute plus quand elle entend une porte claquer ou un bruit de vaisselle se briser, comme ça a été le cas lorsque j'ai cassé un verre en le posant beaucoup trop au bord du plan de travail de la cuisine. Je l'avais retrouvée prostrée dans un coin de salle de bain, les mains sur les oreilles et les yeux effrayés.

Les médecins, surtout le psychologue qui la reçoit en consultation deux fois par semaine, disent qu'elle progresse à une allure inespérée. Pour ma part, je n'ai jamais douté. Je sais qu'il faut laisser le temps au temps, comme on dit, lui laisser celui de faire son oeuvre et d'effacer, de permettre d'oublier. Mais je sais aussi qu'elle a une force de caractère en fer forgé. Qu'elle est déjà passée par là, et qu'elle sait ce qui lui arrive, qu'elle sait comment faire pour aller mieux, plus vite que la première fois. Elle connaît les mécanismes.

Avec un A comme Am...Where stories live. Discover now