CHAPITRE 50

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Le spectacle s'est passé comme il devait. 

Ennuyeux. 

Colleen n'était pas habitée par son personnage ni par les émotions que Carl voudrait transmettre au public au travers des figures. Le visage de sa danseuse étoile est resté inexpressif tout du long. C'est à se demander si Carpenter n'a pas payé tous les spectateurs pour qu'ils applaudissent comme des malades à la fin de la représentation.

Personnellement, je suis restée de marbre. Je l'ai trouvée nulle. Même moi, qui n'ai plus pratiqué depuis des années, aurais mieux fait. 

Sans me vanter.

En fait, je n'arrive même pas à comprendre que Carl n'ait pas cherché à recruter une autre danseuse. Dans mon souvenir, il ambitionnait de monter une troupe et un spectacle mais il avait du coeur à l'ouvrage et le goût du savoir bien faire. Je suis déçue et je reste sur ma faim.

D'une oreille distraite, j'écoute Gabriel qui ne tarit pas d'éloge. Quel bonimenteur, celui-là. N'importe quel néophyte en la matière a dû remarquer la nullité nullissime de Colleen, la nullissime nulle. 

J'exagère ? 

À peine.

Quoi qu'il en soit, Charles Carpenter n'en boude pas son plaisir et toute sa fierté ainsi que sa fatuité resplendissent sur son visage.

Gros porc.

Durant toute la soirée, j'ai remarqué que de l'insulter mentalement me donnait du coeur au ventre et du courage. Ce type est le fruit de la fornication d'un troll avec un gobelin... Il n'a de grand que la taille, pour l'âme, on repassera.

Dans la salle, le public commence à se lever et à se diriger vers les différentes sorties, d'un seul mouvement.

C'est mon moment à moi, celui où je préviens Gabriel que « c'était un superbe spectacle, merci de m'en avoir fait profiter, blablabla, mais je suis épuisée, je dois couver quelque chose et je tombe de fatigue, blablabla, qu'il ne s'inquiète pas, je vais rentrer par mes propres moyens, encore merci, blablabla au revoir et bonne soirée »

Emballez, c'est pesé !

Je me tourne donc vers mon manager, mon petit discours bien rôdé et m'adresse à lui avec un sourire où doit transparaître mon soulagement que cette soirée arrive enfin à son terme.

—Gabriel, je te remercie de m'avoir invitée à partager ce moment. J'ai passé une bonne soirée - menteuse - mais il se fait tard, je vais rentrer.

— Pas de souci, merci à toi d'être venue. Souhaites-tu que je te raccompagne ?

Ah ah, tu ne perds pas le nord à ce que je vois, mon mignon mais non, j'ai déjà un plan avec un mâle super sexy, brun, yeux noisette, sourire à tomber. Je souris encore une fois - je vais finir par en attraper des rides d'expression tellement c'est forcé et figé sur mon visage, à la façon des retouchées plastiques.

Qui veut du botox, qui ?!

— Ça va aller, c'est très aimable à toi mais je vais trouver un taxi. Ne te dérange pas.

Dans mon dos, une voix s'élève :

— Mais vous n'allez pas partir comme ça, enfin voyons ! La soirée ne fait que commencer. Je vous invite tous les deux à mon hôtel. Nous allons boire le verre de l'amitié, Colleen a prévu de nous rejoindre dès que possible et a exigé que je vous retienne pour qu'elle puisse parler du bon vieux temps avec vous, Tya !

Avec un A comme Am...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant