CHAPITRE 3

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CHAPITRE

3


Je ne pus m'empêcher d'afficher une grimace dégoûtée sur mon visage. Le crâne luisant, la peau terne et les ongles noirs ressemblant plus à des griffes, Grozrik pénétra dans le salon vêtu d'une longue cape noire. Quand il posa ses petits yeux de porcins sur moi, il m'adressa un grand sourire dévoilant ses dents pointues et sales. J'eus soudain la nausée. Que venait-il faire là ? À cette heure-ci ? Je me tournai brusquement vers Orphyll prête à l'incendier mais il paraissait tout aussi surpris que moi.

– Grozrik ? Je ne t'attendais pas avant deux semaines.

– Bonjour quand même, rétorqua Grozrik en s'asseyant sur le canapé sans y avoir été invité.

Je plissai le nez. Il puait le sang, c'était infect. Je reposai aussitôt le pain au chocolat que je venais de prendre dans le panier à viennoiseries.

– Que se passe-t-il ? Lui demanda Orphyll en fronçant les sourcils.

– Bonjour princesse, me salua Grozrik le regard brillant.

Je me sentais comme un steak saignant à chaque fois qu'il me regardait. Les crokatlas étaient un peuple qui vivaient sous terre, et qui aimaient se nourrir de viandes crues. Et par viandes crues, je ne parlais de tartare de bœuf mais de nous, humains ou atlazasiens. Grozrik m'avait un jour avoué qu'il avait un faible pour les jeunes atlazasiennes de sang noble, le regard inquisiteur sur moi. Je réprimai mon envie de vomir et lui rendis un semblant de sourire. Il ne fallait pas que j'oublie que Grozrik m'avait en quelques sortes sauvé la vie en prévenant Orphyll que Kei me retenait bel et bien dans une chambre au repaire de Darken. Alors faisant preuve d'indulgence, je lui accordai un sourire aussi peu radieux fût-il. Grozrik rapprocha un peu sa tête de moi et huma mon odeur.

– Que tu sens bon, je rêve toutes les nuits de goûter ta chair, grogna-t-il.

Mon indulgence avait des limites. Réprimant un haut-le-cœur et l'envie de lui enfoncer mon poing dans la figure, je me levai.

– Bon, je monte dans ma chambre.

Il se renfrogna, frustré.

– Si la princesse s'en va, je ne dis rien.

Quel petit enfoiré...

– Kaya, s'il te plaît ça peut être très important, dit Orphyll.

Grozrik était en réalité l'informateur, l'espion d'Orphyll dans le repaire de Darken. Grâce à lui, nous pouvions nous tenir informés des faits et gestes de ce dernier. Cela dit, jusqu'à présent ses renseignements n'avaient été que très abstraits et pas très instructifs. Je le soupçonnai de nous mener en bateau.

– Bien, dis-je les dents serrées.

Lentement, je me reposai mes fesses sur le fauteuil en foudroyant des yeux le crokatla dont les lèvres quasi- inexistantes s'étirèrent en un sourire radieux. Ravi, Grozrik se détendit et osa même demandé à Phyllis de lui apporter un petit met. « Bien saignant s'il te plaît ! ». Après lui avoir jeté un regard écœuré, Phyllis obtempéra de mauvaise grâce en marmonnant des insanités en atlazasien dans sa barbe et traîna des pieds jusqu'à la cuisine. Je ne pus que compatir. Ôtant sa cape crasseuse, Grozrik s'installa face à nous avec un soupir d'aise et posa ses deux mains sur ses genoux en jetant un regard appréciateur à la salle. Je lui jetai un regard incrédule. Quelle idée de porter un manteau si chaud avec ce soleil ?

Atlazas, Le Secret des Abysses T.2Where stories live. Discover now