LA LOUTRE ET LE RENARD [terminée]

[CHAPITRE 4] Mépris et secrets.

La porte de la salle de Défense contre les Forces du Mal s'ouvrit brusquement, et Rogue sortit dans le couloir, le visage cireux encadré par deux rideaux de cheveux noirs et graisseux. Le silence tomba aussitôt dans la file d'élèves qui attendaient, et du coin de l'œil, Hermione vit son meilleur ami relevait effrontément la tête et fusillait le professeur du regard, avec une haine si perceptible qu'elle semblait enveloppée Harry comme un manteau épais.

―Entrez, leur ordonna-t-il sèchement.

En pénétrant dans la salle, Hermione constata que Rogue n'avait pas mis longtemps a imposé sa personnalité à la pièce. Elle était plus sombre qu'à l'ordinaire, à cause des rideaux qui masquaient les fenêtres, et éclairée par des chandelles flottant au-dessus des tables, comme dans la Grande Salle. De nouvelles images étaient accrochées aux murs ; la plupart montraient des gens qui souffraient, exhibant d'horribles blessures ou des parties du coprs étrangement déformées. Personne ne fit le moindre commentaire, et la jeune fille s'installa à une table, l'estomac noué, prêt à rendre le maigre petit-déjeuner qu'elle avait réussi à avaler.

―Je ne vous ai pas demandé de sortir vos livres, fit froidement remarquer Rogue en refermant la porte.

Hermione rougit violemment en croisant le regard perçant et cynique du professeur, et s'empressa de remettre son exemplaire de Affronter l'ennemi sans visage dans son sac, sous les ricanements de certains Serpentard.

―J'ai certaines choses à vous dire qui exigent une pleine et entière attention, ajouta Rogue.

Ses yeux noirs se promenèrent sur les élèves tournés vers lui, s'arrêtant une fraction de seconde de plus sur Harry, et Hermione remarqua sans peine la haine qui se mit à luire dans les prunelles du professeur - si identique à celle de son meilleur ami.

―Je crois que, jusqu'à présent, vous avez eu cinq professeurs différents pour assurer ce cours...

Il y eut quelques murmures dans la pièce au souvenir de tous les professeurs ayant obtenus le poste d'enseignant de Défense contre les Forces du Mal et qui avaient tous quitté l'école au bout d'une année scolaire - pour diverses raisons, et parfois pas les meilleures, ce qui amenait à se demander si le poste n'était pas manipulé par une malédiction.

―Bien entendu, ces professeurs ont tous eu leurs propres méthodes et leurs sujets de prédilection. Etant donné la confusion qui en a résulté, je suis surpris que beaucoup d'entre vous aient réussi à décrocher une BUSE dans cette matière. Je serais encore plus surpris si vous parveniez à travailler suffisamment pour suivre le programme de l'ASPIC, qui sera beaucoup plus avancé.

Rogue quitta son bureau et entreprit de faire le tour de la salle, parlant maintenant d'une voix plus basse. Les élèves durent tendre le cou pour ne pas le perdre de vue.

―Les forces du Mal, poursuivit-il, sont nombreuses, diverses, toujours changeantes et éternelles. Les combattre, c'est comme combattre un monstre aux multiples têtes. Chaque fois qu'on en tranche une, une autre repousse, bien plus féroce que la précédente.

Un silence pesant planait dans la classe, chaque étudiant semblant écouter avec une attention particulière les propos de Rogue. Son ton caressant, amoureux, témoignait de son adoration, et un instant, Hermione se demanda comment un homme tel que lui avait pu succombé à la noirceur. Certes, il n'avait pas eu une enfance et une adolescence facile, comme Harry leur avait appris suite à son intrusion dans les pensées du professeur, mais dépasser ce point de non-retour sans éprouver le moindre remord ne devait pas être une décision facile.

Elle espérait sincèrement ne jamais être confrontée à ce choix radical.

―Vos défenses, continua Rogue, doivent par conséquent être aussi flexibles et inventives que les forces à vaincre. Ces images donnent une assez bonne idée de ce qu'il arrive lorsqu'on se confronte au Mal pur.