Chapitre 29

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Elsa finit par y arriver, et atteignit enfin à nouveau la cour pavée. Elle grogna, et s'appuya contre le mur. Elle espérait en avoir fini, lorsque Loki lui fit signe de le suivre. Il avait rejoint les gardes du château, qui étaient en train de s'assembler face au capitaine Halv. Ils formèrent des rangées espacées, pour avoir la place, et la reine eut soudain l'impression que le palais était envahi. Elle se glissa non-loin de son tuteur, et lui lança un regard interrogateur.

– Pour le reste de l'échauffement, expliqua-t-il, on va se joindre à vos soldats. Ce sera plus simple, vous verrez dans quelles conditions ils sont préparés.

Elle acquiesça... puis tiqua soudain.

– Pour le reste de l'échauffement ? répéta-t-elle.

Il lui offrit un sourire sadique.

– Vous pensiez vraiment qu'après avoir parcouru trois minables kilomètres – à peine – j'allais vous laisser vous en tirer comme ça ?

Elle se mordit les lèvres. Les deux prochaines semaines promettaient d'être intenses.

– La maîtrise s'acquiert dans la douleur. Plus ça fait mal, mieux on apprend, compléta-t-il.

– Vous parlez par expérience personnelle ? railla-t-elle.

Il n'eut pas le temps de lui répondre ; le capitaine Halv exigea le silence. Le calme tomba aussitôt sur la troupe de soldats. Il y eut encore quelques discrets chuchotements, quelques plaisanteries, puis plus rien. Halv leur avait préparé un discours qui insistait sur la nécessité de cet entraînement, et Elsa n'écouta que d'une oreille, puisqu'elle l'avait partiellement écrit. Elle préféra s'immerger dans le mouvement de groupe qu'elle perçut dès que les gardes commencèrent à faire des exercices. Elle ressentait l'unité de l'équipe comme jamais auparavant. Et elle souffrait des étirements de groupe qui mettaient à mal ses muscles déjà fatigués. Mais le plaisir général qui se dégageait des autres gommait assez bien sa fatigue.

Après l'échauffement, le dos raide, les pieds lourds et les bras pendants, Elsa rejoignit Loki dans l'une des salles d'entraînement que le capitaine leur avait gentiment laissée. Le sol et les murs étaient couverts de matelas, sans qu'un carré de pierre ne soit découvert. Elle fit un tour complet sur elle-même. Elle n'était jamais venue ici, et pour cause, elle avait déjà trop à faire avec la gestion du royaume. Mais maintenant qu'elle avait été décrétée « malade », elle avait tout son temps. Elle se pivota ensuite vers son tuteur, qui la jaugeait de haut en bas avec un sérieux qui la mit soudain mal-à-l'aise.

– Bon. On va commencer par du combat rapproché, sans armes. Et sans pouvoirs.

Elle gémit intérieurement.

– Et vous prévoyez de faire combien d'heures par jour, environ ? osa-t-elle.

– Sept, répondit-il avec un haussement d'épaules. Voire huit ou neuf en fonction des jours.

– Ha, ha, ha.

Son ricanement sarcastique n'eut pas l'effet désiré, puisqu'il laissa le dieu de marbre.

– C'est à prendre ou à laisser. Je ne fais pas les choses à moitié.

Elle soupira, et hocha la tête, en sachant pertinemment qu'elle allait le regretter. Il s'approcha d'elle d'un pas soudain souple, félin. Il marchait légèrement replié sur lui-même, les épaules voûtées. Elle eut un mouvement de recul. Il lâcha un bref éclat de rire.

– C'était pour voir votre réaction, se justifia-t-il.

Il se glissa dans son dos, attrapa ses bras, et commença à lui montrer les différentes positions de combat. Elle suivit tant bien que mal, en essayant de paraître la moins ridicule possible. Mais lorsqu'il posa les mains sur son ventre en lui murmurant de contracter les abdominaux, elle frôla la crise cardiaque. Ses doigts, pourtant froids, lui parurent soudain brûlants au travers du tissu glacial. Elle se concentra sur sa respiration. Les doigts reculèrent.

Les Ténèbres dans nos Cœurs / Partie 1 : Love above the realmsWhere stories live. Discover now