Avis de tempête

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Richard

Je pénétrais seul dans la demeure plongée dans l'obscurité alors que personne ne venait me saluer. Pas un palefrenier pour soigner mon cheval, pas un valet de pied ni intendant pour réceptionner mes effets.

Je m'approchais du grand salon d'apparat et fus médusé par une scène qui se jouait devant moi, confirmant les pires craintes de Georgiana.

Je découvris Lady Catherine dans un conflictuel face à face avec une jeune personne, elles se tenaient toutes deux debout, inflexibles.
La vielle dame brandissait devant elle une lettre d'un air dédaigneux alors que sa cadette regardait droit devant elle, bien déterminée à ne pas plier, avec un aplomb qui ne lui était pas familier.

Tout cela est de votre faute, ma pauvre fille ! Si vous aviez fait preuve d'un peu de discernement, ce dont vous semblez incapable, rien de ceci ne serait arrivé !

Je regardais, subjugué, la posture de ma cousine Anne, car il s'agissait bien d'elle. Ses pieds étaient bien ancrés au sol et ses deux poings refermés à en faire blanchir ses jointures. Sa mâchoire était serrée et son regard fixait un point avec détermination. Elle était méconnaissable. Malgré un léger balancement de nervosité, elle restait stoïque au insultes que sa mère lui infligeait.

Qu'avez-vous donc fait pour éveiller son intérêt ? Vous ne disposez d'aucun des accomplissements qu'on attend d'une héritière. À force de vous languir et laisser les années détériorer votre jeunesse, vous vous êtes faite évincée par une roturière qui n'a aucune qualité à faire valoir à part sa fraîcheur et son impertinence. Regardez-vous donc ! Vous me faites honte. Inapte à vous tenir en société, incapable de sourire...

C'est alors que le regard d'Anne croisa le mien et qu'un sourire, dont sa mère venait de lui reprocher d'en être dépourvu, illumina en un instant son visage.

Petite effrontée !

Sa mère avait d'abord cru à une insolence de sa part puis chercha ce qui pouvait bien attirer son regard. C'est alors qu'elle me vit.

Colonel ! Quelle bonne surprise! Fit Anne guillerette en trottinant vers moi, le visage soudainement complètement détendu.
Fitzwilliam, nous ne vous attendions pas. Vous entrez séant sans être annoncé. Rétorqua ma tante en guise d'accueil.
Comment l'aurai je été? Je n'ai croisé aucun domestique en arrivant et vous faisiez suffisamment de tapage pour ne point m'entendre entrer. Bonjour votre Seigneurie. Bonjour Anne, fis je en rendant le sourire à celle-ci.

Êtes vous au courant de l'épouvantable nouvelle? Fit Lady Catherine en me montrant le papier chiffonné dans sa main ridée.
J'ai été informé de la merveilleuse nouvelle du futur mariage d'un membre de notre famille mais rien de funeste. De quoi s'agit-il, Lady Catherine? Fis je avec ironie. Quelqu'un est-il décédé ?

C'est alors que je vis Mrs Jenkinson arriver dans la pièce avec le traditionnel plateau de l'heure du thé. A son regard circonspect, je compris qu'elle avait dû attendre l'accalmie avant d'oser entrer. Cela promettait un séjour mouvementé !

Le lendemain, afin d'éviter de nouveaux cris, j'eus l'idée d'accompagner Anne rendre visite aux Collins. Je m'étais souvenu qu'elle entretenait une relation amicale avec la femme du pasteur et pensais qu'une sortie loin de ces hostilités pourrait à tous les deux nous être bénéfique. Dans la calèche que je guidais, faute d'écuyer, elle me dit en souriant :

Voila plusieurs jours qu'ils ne sont plus venus à Rosing. Je serais heureuse de revoir Mrs Collins. Je me demande si elle a beaucoup grossi.

Interloqué, je me permis de dire à ma cousine que ses propos n'étaient guère aimables.

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