Les tracas du maître

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Bon, ce chapitre est mieux ici! 😂
Désolé pour le temps d'attente entre deux chapitres, j'ai été fort occupée.

Darcy

Au tournant de Park Lane, je croisais le petit Tom, haut comme trois pommes courant à perdre haleine. Je l'apostrophais. Il s'immobilisa et se retourna, surpris de se retrouver face à moi. Je l'interrogeais vers où il s'encourrait.

– Une dame est blessée chez vous sir! Je m'en vais chercher le docteur.

Ce fut à mon tour de presser le pas qui m'emmena jusqu'à chez moi. Dans ma tête qui tournait, les idées se bousculaient. Qui donc était blessé ? Je priais que ce ne soit pas Elisabeth ou Georgiana, mais bien vite je me repris, ce n'était guère courtois d'espérer qu'une autre ce soit.

Devant la maison, Charles saluait un homme qui partait dans un cabriolet.
Charles, dis-je essoufflé, que s'est-il passé ? Il semble que quelqu'un ait besoin d'un médecin?

Il tenta de me rassurer, il s'agissait de Mrs Annesley qu'on venait de raccompagner. Égoïstement rassuré, je rentrais et demandais, à Charles qui me suivait, comment se portaient Georgiana et nos fiancées.
– N'ayez crainte, elles n'ont rien. Seule Mrs Annesley a été blessée, une simple petite chute d'après ce que je sais. J'ai pris l'initiative de faire appeler un médecin.
– Vous avez bien fait, Charles.

Je cherchais en vain.
Les demoiselles ne sont pas ici?
– Non, elles sont toujours de sortie. C'est un jeune homme qui a reconduit Mrs Annesley.
– Et où est à présent la dame de compagnie?
– Votre employée a été portée jusqu'à sa chambre, Darcy. Répondit Charles en toute simplicité.
Je le regardais, étonné.
– Est-ce vous qui l'avez porté jusqu'au deuxième étage? Lui demandais-je, en regardant mon frêle ami de la tête au pied.
– Non, c'est ce gentil monsieur qui...
– Vous voulez dire que vous avez laissé un inconnu monter seul mon employée accidentée jusqu'au palier des chambres ?
– Oh mais c'était un gentlemen, Darcy, n'ayez crainte!
– Le connaissez-vous ? Repris-je un peu irrité.
Non, mais il s'est montré très avenant et bien de sa personne!

Je tournais des talons en grommelant et montais à grandes enjambées le grand escalier alors que mon esprit gambergeait, il me fallait savoir ce qu'il s'était passé. Charles peut être... si niais !

Mrs Annesley était allongée sur son lit, et mon entrée soudaine fit sursauter la femme de chambre qui veillait à ce qu'elle soit bien installée. Cette dernière eu juste le temps de replacer les jupons sur la cheville blessée.

Je me suis montré quelque peu cavalier d'interroger ainsi mon employée qui souffrait. Elle m'expliqua, embarrassée, sa malencontreuse glissade et que les demoiselles avaient proposé de la ramener mais qu'elle avait souhaité ne pas les priver de leur promenade.

– Je suis confuse, Mr Darcy, de vous causer des soucis. Je suis certaine que Miss Bennet et votre sœur sont en sécurité auprès de Mrs Gardinier...
– Je connais à présent suffisamment Mrs Gardinier et sa fiabilité, soyez tranquille Mrs Annesley. Tentai-je de la rassurer.

Nous fûmes interrompus par l'arrivée du médecin et je ne pus en savoir davantage. De retour au salon, Charles m'attendait circonspect, scrutant mes réactions.
Que pouvez-vous me dire sur cet homme, Bingley?

Ce dernier tressaillit légèrement. Je le nomme ainsi lorsque je suis mécontent.
– Il est assez jeune, je dirais dans la vingtaine. Fit il, concentré. Il portait une tenue de qualité et était bien éduqué. Aussi, il semblait bien connaître Mrs Annesley. Oh, et il m'a donné sa carte, la voici!

Je regardais perplexe ce bout de papier aux lettres dorées.
Earl Graham de Belfort... ce nom m'était familier mais il s'agissait d'un homme âgé, vague connaissance de feu mon père, aux idées très arrêtées et peu accommodant. L'opposé de la description que m'en avait fait Bingley.
Êtes-vous sûr que ce soit lui?

Bingley me regarda béatement, puis réfléchit comment il pouvait me rassurer.
Oh, l'emblème là, sur le dos de la carte, c'est celui qui ornait la portière de son cabriolet, s'exclama t'il fièrement.

Lorsque le médecin descendit, il nous informa qu'il s'agissait d'une vilaine entorse et que le pire avait pu être évité. Afin d'atténuer sa douleur, la patiente avait été sédatée. Il lui faudrait le repos et ne plus mettre le pied à terre de sitôt.

Cloîtré dans mon bureau, je suis resté longuement à regarder cette carte, attendant impatient le retour de ma sœur. Je suis de nature prudent, voir suspicieux, surtout quand on connaît la perfidie de certains êtres vicieux.

Par le passé, j'ai déjà été abusé par une employée à qui j'ai confié ma sœur adorée. Or voici qu'aujourd'hui un inconnu proche de Mrs Annesley faisait irruption en mon absence dans mon propre foyer. Je n'étais guère serein à cette idée. Une calèche empruntée, une carte volée, tout était plausible, il me fallait enquêter pour connaître la vérité.

Ma sœur rentra à Darcyhouse sans encombre, ravie de sa journée mais aussi inquiète pour sa dame de compagnie. Je n'ai guère voulu la questionner sur ce qui s'était passé, elle en vint d'elle même sur le sujet.

À mon grand étonnement, l'évènement du jour qui l'avait le plus marqué était tout autre. Elle m'informa que la chute malencontreuse de Mrs Annesley était la conséquence d'une altercation avec une commerçante, fournisseur de notre famille depuis de nombreuses années. Le reste de son récit m'a profondément scandalisé.

J'avais conscience qu'en choisissant Elisabeth pour moitié cela allait provoquer quelques froissements et mépris auprès d'une partie de la bonne société. Je n'étais cependant pas préparé à ce que le rejet puisse subvenir avant même que notre mariage soit officiellement annoncé. Qui plus est de la part d'une simple boutiquière et de cette manière !

Je comptais aborder le sujet avec ma fiancée, je m'en voulais de ne pas l'avoir encore fait. Je ne suis pas sans ignorer que ma position sociale et politique, mes biens et mon physique ont fait de moi une cible, un sujet des conversations de salons. Mais ils ne font pas uniquement de moi ce que je suis et je chéris chaque jour Elisabeth de l'avoir compris.

En la faisant mienne, j'entraînai ma dulcinée au devant de la scène, l'exposant aux regards et jugements d'une communauté dont elle ignore encore le fonctionnement. Je maudissais mon manque de clairvoyance et d'avance ceux et celles qui oseraient la critiquer.

Dès demain, la première chose que j'entreprendrai, sans aucun remord, sera la clôture du compte à la Maison Taylor. Puis de m'enquérir sur l'inconnu que Bingley a reçu, et enfin espérer avoir un moment en tête à tête pour parler à Elisabeth.

Ce séjour à Londres sera bien plus chargé que me l'étais imaginé...

Orgueil & Conséquences Où les histoires vivent. Découvrez maintenant