🌲 Chapitre 9.2 🌲

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Après s'être reposés pendant un moment, les trois Compagnons finissent par reprendre leur voyage. Ils s'éloignent de la Dhakerissaa pour s'enfoncer dans les terres et découvrent ainsi les Steppes. Il leur a suffi de traverser la rivière pour changer radicalement d'ambiance. La plaine de Telendriss était verte et vivante : le vent y faisait onduler les herbes hautes et la faune y grouillait. Mais plus ils avancent vers l'est et plus ce paysage se fait oublier. Les Steppes sont des étendues de terre sèche et craquelée, désespérément assoiffée. Par endroits, le granite des profondeurs affleure à la surface pour créer de petits plateaux rocheux sur lesquels Soarën évolue avec prudence. Sa constitution d'Elfe ne le rend pas particulièrement sensible aux changements de températures, sauf cas extrêmes, mais il sent néanmoins qu'il fait un peu plus froid.

Depuis qu'ils sont arrivés dans les Steppes, Funest est perdu dans ses pensées. Soarën a d'abord cru que c'était le contrecoup de sa traversée de la Dhakerissaa. Mais au bout d'un long moment, surprenant ses deux camarades, le loup prend la tête de leur groupe. Il s'éloigne de quelques mètres en trottinant, le museau au vent, puis escalade un amoncellement de rochers plats et s'arrête au sommet. Ainsi posté, il surplombe les étendues sauvages qu'ils s'apprêtent à traverser. Sa truffe frétille et ses oreilles sont aux aguets.

— Qu'y a-t-il ? l'interroge Soarën à voix basse en se rapprochant de lui, sur ses gardes. Tu perçois un danger quelque part ?

La réponse de son loup n'est pas du tout celle à laquelle il s'attendait.

— C'est chez moi. Cet endroit, c'est chez moi !

Le jappement ravi de Funest fait froncer les sourcils à Soarën avec perplexité. Rassuré, il escalade à son tour les rochers pour se dresser aux côtés du canidé et parcourt les Steppes désertiques du regard. Il se rappelle la brève description que lui avait fait Funest de son environnement natal. Des plaines froides et sèches, où il y a beaucoup de gros animaux avec des poils très longs. Limité par son langage et ses souvenirs, il n'avait pas su lui en dire plus. Le paysage correspond bien à cette modeste représentation. Il se penche vers Fun.

— Tu es sûr ?

— Oui ! Je ne sais pas où, mais ma meute est quelque part là-dedans !

Le jeune loup se fige soudain, réalisant ce que tout cela signifie. Son enthousiasme retombe et il baisse la tête avec tristesse. Il commence à redescendre des rochers sans regarder Soarën, ni Discorde.

— Non... C'est vous deux, ma meute. Les autres loups ne doivent pas me trouver. Ils m'ont chassé... le noir les tuait avec moi, alors ils voulaient me tuer aussi.

— On fera tout pour les éviter, promet Soarën en le suivant. Tu as raison. Nous sommes ta meute, Dix et moi.

Les trois Compagnons continuent à marcher à travers les Steppes pendant plusieurs heures. L'Elfe va de découverte en découverte. Il voit, touche et goûte de la neige pour la première fois de sa vie : le froid lui picote désagréablement la langue et lui brûle la gorge lorsqu'il avale. Dans la soirée, des pas lourds et pesants font trembler la terre. Fasciné, il observe passer au loin les fameux gros animaux aux poils très longs que Funest lui a décrits. Les créatures font la taille des maisons des villages humains, voire davantage. Leur cotonneux pelage gris est un parfait camouflage dans les Steppes. Il est si dense et épais qu'il est impossible de distinguer leurs yeux, l'emplacement de leur bouche, et bien d'autres caractéristiques. Deux grandes pointes couleur d'os dépassent de chaque côté de ce que Soarën pense être leur tête.

Ces bêtes sont vraiment étranges. Il n'en a jamais vue de pareilles. Mais avec la taille qu'elles font, elles paraissent impossibles à chasser. Il interroge Funest à ce sujet, une fois que le troupeau s'est éloigné. La lune s'est levée dans le ciel nocturne. Discorde est partie chasser, les laissant seuls pour un moment.

Soarën [MYSTIS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant