🏹 Chapitre 4.2 🏹

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L'apprenti Traqueur reste inconscient pendant plusieurs heures. Lorsqu'il revient à lui, les dernières lueurs du soleil couchant inondent le sous-bois d'un éclat incandescent. La forêt paraît en feu. Il entrouvre les paupières, mais les referme aussitôt avec un gémissement, aveuglé. Puis il tente de bouger, mais doit là aussi y renoncer. L'adrénaline de son combat contre les deux animaux fous est retombée. Ses muscles le tirent et il se sent vidé de son énergie. Chacune de ses blessures lui donne l'impression que sa chair nue a été marquée au fer rouge, plusieurs fois d'affilée. Il lui est même compliqué de prendre des inspirations trop profondes.

Parler est l'une des rares choses qui ne le fait pas encore souffrir, et il ne s'en prive pas en insultant à voix basse en elfique le monde entier. Ses parents, qui lui ont dit que tout se passerait bien. Arëndrill Sylla'seth, qui l'a obligé à partir à la recherche de son Compagnon. Ethel, Edwyn et Hemma, par jalousie. Dyntaëll et Ötellan, ces deux obsédés qui ne pensent sûrement qu'à copuler sans se soucier de sa disparition. Nemen, cet idiot qui doit prier pour qu'il ne revienne jamais au village. La Brasseuse aux cheveux de neige qui ne cesse de repousser ses avances. Tous les autres apprentis Traqueurs, à qui son absence ne fait sûrement ni chaud ni froid. Même ces imbéciles d'Ellithir et d'Ayeden. Et pour finir, et c'est à eux qu'il réserve ses grossièretés les plus innommables, ce maudit loup et cette maudite chouette qui s'en sont pris à lui...

— Pas vouloir...

— C'est ça, à d'autres, grogne Soarën, les paupières closes.

— Noir dans toi, maintenant. Avant, noir dans nous. Pas vouloir...

Une voix plus calme aux accents féminins est venue s'ajouter au tableau. C'est autant ce fait surprenant que l'utilisation du pluriel qui pousse l'Elfe à essayer de rouvrir les yeux. Cette fois, il y parvient mieux, bien que la luminosité l'agresse toujours. Une ombre le recouvre soudain. Il tourne doucement la tête. Sa vision encore trouble reconnaît l'immense loup noir, qui vient de s'asseoir devant lui pour le soustraire aux rayons aveuglants. Soarën baisse les yeux. Entre ses pattes, presque bec à nez avec lui, il y a la chouette effraie ombrée.

Et ils ont les yeux d'un magnifique violet améthyste.

Tous les deux.

— Dites-moi que je rêve... bredouille Soarën. C'est impossible. Lequel de vous est mon Compagnon ?

Moi, répond avec évidence chaque animal, dans un chœur parfait avec l'autre.

— Mais... non ! Je ne peux pas avoir deux Compagnons, c'est imposs...

Une quinte de toux l'interrompt. Le moindre soubresaut lui arrache une plainte de douleur, et un liquide chaud envahit désagréablement sa bouche. Il le goûte du bout de sa langue pour grimacer avec évidence. Du sang, quoi d'autre ?

— Ghmn... Tu m'as bien amoché, le loup.

— Pas vouloir... couine de nouveau celui-ci en baissant piteusement les oreilles.

— Ça va... J'ai compris la rengaine, soupire Soarën, sans lui avoir pardonné pour autant. Allez, dites-moi, vous deux. Comment vous vous appelez ?

— Funest.

— Discorde.

— En voilà, de sacrés noms, marmonne sombrement l'apprenti Traqueur. Moi, c'est Soarën. En d'autres circonstances, j'aurais sûrement été ravi de vous rencontrer, mais je dois avouer que votre accueil m'a un peu refroidi. Vous ne m'en voudrez pas de ne pas vous porter dans mon cœur pour le moment, j'espère, grince-t-il avec une ironie mordante.

Soarën [MYSTIS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant