XXIII. Le sort d'Erwin

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Hannah avait entraîné son second à sa suite mais à peine furent-ils de retour dans le grand hall qu'ils avaient perdu leur cible de vue. La masse des convives dansante et virevoltante au centre de la pièce rendait difficile l'identification des visages. Mais dans l'effervescence de la foule, la jeune femme reconnut sans peine le visage familier de son père qui, faisant tournoyer sa femme, lui pointa du doigt une porte attenante à la salle de danse. C'était un petit salon où les convives se retrouvaient généralement pour jouer aux cartes ou ouvrir des cercles de discussions.

Elle tira Syd par la manche et ils se dirigèrent vers la pièce en question, nul doute que son père avait vu le jeune homme passer. Arrivés à la massive porte qui avait été refermée, Hannah abaissa la poignée pour s'introduire dans un fumoir. Des boiseries sculptées ornementaient la pièce, des murs au plafond, offrant une atmosphère feutrée et très intimiste à la pièce.

Pauwels était assis sur un large sofa en cuir capitonné, sa compagne très proche de lui. Syd le détailla un moment. Il était mince mais plutôt grand, la tête droite et fière. Ses cheveux lisses blond platine et ramenés en arrière faisaient ressortir le vert éclatant de ses yeux. C'était pour sûr un très bel homme. Lorsqu'il vit Hannah s'insérer dans l'entrebâillement de la porte, son regard se fit dur. Il n'était pas ravi de la voir. 

- Ainsworth, casse toi de là, tu vois bien que je suis occupé. 

La jeune fille qui l'accompagnait jeta un regard peu amène à celle qui venait de les interrompre. Hannah ne l'avait jamais vue. Elle était jolie. Une dame de compagnie ? Peu importait. Le Sergent n'obtempéra pas et s'aventura au contraire dans la pièce pour se rapprocher de la cheminée. 

- Hans, fit-elle d'une voix qu'elle voulait douce, est-ce que ta compagne pourrait nous accorder un instant ? J'ai à te parler. 

La compagne en question n'avait pas l'air décidée à quitter les lieux et ne s'accrocha que plus au bras de son cavalier. Hannah soupira en se pinçant l'arête du nez. 

- C'est important, et privé, précisa-t-elle. 

- Je crois que tu as laissé passer ta chance pour ça, cracha la fille. 

Bien... Ça donnait le ton de la conversation. 

- Quoi que tu aies à me dire, Hannah, ça peut attendre, lâcha finalement Pauwels. 

Du temps, ils n'en avaient pas. Voilà déjà des plombes qu'ils tournaient en rond et le procès allait se dérouler dans quelques heures. Ils ne pouvaient pas se permettre d'attendre que leur ami ait terminé ses petites affaires. Hannah se tourna vers son second et ils se fixèrent un moment. Il leva un sourcil, elle haussa les épaules, sous l'œil interpellé du couple qui se demandait ce que signifiait cet échange silencieux. Après un signe du menton de sa cheffe à l'égard de la jeune perturbatrice, Syd décolla son dos de la porte pour s'approcher d'elle et la saisir brutalement par le bras. L'héritier Pauwels eut l'air choqué mais ne dit rien, bouche bée. Sans ménagement, il la traîna jusqu'à l'extérieur, faisant fi de ses vives protestations et autres insultes, avant de refermer la porte et de faire claquer le verrou. Hans râla de plus belle. Le bruit de la foule ne devint alors plus qu'un brouhaha étouffé. 

- Je peux savoir ce que c'est que ce traquenard ? Et c'est qui, lui ? 

Hannah se colla à la cheminée pour laisser la chaleur se diffuser dans son dos jusqu'à ce que sa peau se mette presque à la brûler.  

- Syd Barrett, des Brigades d'Ehrmich. Je ne vais pas y aller par quatre chemins. Je sais que tu es plein de rancœur envers moi et que je ne suis pas bien placée pour te demander le moindre service, mais pour le bien de l'humanité, je te demande de mettre ta rancune personnelle de côté. 

Ce qui ne nous tue pas - Livaï x OCWhere stories live. Discover now