Ce qui ne nous tue pas - Livaï x OC

Prologue

Dans le calme du bureau du Sergent Ainsworth, seul le bruit délicat des traits de crayon sur le papier venait perturber le silence religieux. Penchée sur ses croquis, les doux rayons du soleil venaient filtrer au travers de la fenêtre, réchauffant son dos en une aura rassurante et chaleureuse, caressant les papiers éparpillés d'un éclat éblouissant. Parfois, la réfraction de la lumière sur la blancheur des pages de ses carnets lui faisaient plisser les yeux, aveuglée.

Faisant suite à un énième coup de crayon, elle se redressa pour se laisser aller contre le dossier de son fauteuil, la tête en arrière. Un long et profond soupir s'échappa de ses lèvres tandis qu'elle fermait les yeux un instant. Elle n'était pas satisfaite, elle était incapable d'offrir une représentation fidèle de ce qu'elle avait imaginé. Voilà deux heures qu'elle s'y essayait. Regardant une nouvelle fois le résultat sur la feuille devant elle, elle soupira encore, de lassitude et d'agacement, pour finalement froisser son travail et le jeter dans la corbeille. Elle allait recommencer, c'était mieux ainsi. Mais pas tout de suite. Pour l'heure, elle n'était plus capable de se concentrer et sentait un tiraillement au niveau de ses yeux, d'être restée concentrée si longtemps sur sa tâche.

Hannah se leva de sa chaise avec souplesse avant de s'étirer longuement les bras et faire rouler ses épaules. Dessiner était relaxant, mais pas toujours pour le corps. Sa tasse de café fumante vint se lover au creux de ses mains dans une chaleur rassurante alors qu'elle prenait place devant la fenêtre. Sirotant quelques gorgées, elle observa ce qu'il se passait dans la cour du QG des Brigades Spéciales. Son équipe était là en bas, en train de jouer aux cartes sur un muret. La seule fille de son escouade, Méryl, s'entraînait aux osselets à côtés des garçons. Elle lançait et relançait inlassablement les cinq petits items dans les airs pour les rattraper de la manière qu'elle jugeait appropriée, enchaînant figure sur figure.

Au-delà du patio, on devinait un vacarme inhabituel dans le centre du district d'Ehrmich. Les rues semblaient particulièrement animées ce jour-là, bien qu'Hannah ne saisisse pas tellement pourquoi. Il n'y avait rien de spécial, pas d'évènement particulier. En tous cas, par pour eux, car si sa mémoire était bonne, le bataillon d'exploration repartait aujourd'hui pour une nouvelle expédition. Elle en avait eu vent plus tôt dans la semaine, et avait surpris les éternelles railleries dirigées à l'encontre du Major Smith et de sa « pâtée pour titans ». En d'autres termes, ses soldats. En faisant le point sur le calme de sa vie au sein des brigades, et la sérénité qu'elle observait chez le reste de ses camarades, Hannah ne pouvait s'empêcher de se sentir coupable.

Il y avait toujours cette petite voix dans un coin de sa tête, la traitant inlassablement de dégonflée, qui lui rappelait jour après jour que, contrairement à d'autres courageux, elle avait choisit la voie de la facilité. Non pas qu'elle s'ennuyait, elle avait toujours de quoi s'occuper la tête et combler ses journées, mais elle avait quelque part cette impression de ne pas être à sa place. Comme si elle ne sillonnait pas le bon sentier de la vie ? Rien ne pouvait pourtant être moins rationnel, la vie est faite de choix, et ce choix elle l'avait fait consciencieusement. Personne n'est « destiné » à quoi que ce soit. Le destin, ce n'est bon qu'à rassurer la ménagère.

Tirant de ses pensées la jeune gradée, un tumulte peu commun se faisait entendre au sein du QG. Un groupe d'officiers, dont le Commandant Nile Dork, s'avançait à grande enjambée jusqu'à l'entrée du bâtiment, visiblement préoccupé. En l'espace d'un instant, le chaos s'était installé. Elle vit les visages interloqués des jeunes recrues, même son escouade avait arrêté de jouer pour se joindre à un autre groupe, probablement dans l'espoir de comprendre ce qui causait tout ce remue-ménage. Hannah n'eut pas le temps de se poser elle-même la question qu'une personne venait frapper à sa porte. L'invitant à entrer, elle fit face au cadet Syd Barret, dont la nervosité était plus que palpable. Il la salua, poing sur le cœur.