« Cela fait six mois que nous sommes partis, pourtant cela me paraît être une éternité. Une longue et insupportable éternité qui ne cesse de m'éloigner de toi. L'espoir que l'on se retrouve bientôt commence à me faire défaut. Tous ces noms de disparus que nous entendons à la radio tous les jours emportent mon courage avec eux. Je... je n'en peux plus. Je suis à bout de force, Fred. Si tu savais. L'idée de tout plaquer et de te rejoindre est si alléchante... si réconfortante. Penser à toi comble l'ennui. Comble ton absence. Comble ce manque oppressant que je nous ai laissé en suivant Harry... »
Il neigeait.
La fine poudreuse blanche recouvrait chaque centimètre carré de la plaine qui l'entourait.
Elle n'était entourée que par du blanc. Les arbres, le sol, les branches qui virevoltaient doucement au grès du vent. Tout était recouvert de neige et cette vision, aussi idyllique puisse-t-elle être, ne faisait que laisser un goût amer au fond de sa gorge. Autrefois, elle qui appréciait particulièrement cette saison froide, signe de renouveau et de commencent, se retrouvait à présent avec la désagréable sensation que le temps était en train de lui filer entre les doigts.
Six mois avaient passé depuis leur départ. Six longs mois. Pratiquement cent quatre-vingt trois jours. Deux cents soixante-deux milles neuf cents quatre-vingt minutes. Une période si longue et si courte à la fois. Une demi année. Un temps incroyablement épuisant. Une quête éprouvante et sans fin. Une peur qui vous colle à la peau comme un insecte. Un espoir qui s'amenuise au fil du temps...
Un soupir lui échappa lorsqu'elle entendit Harry remettre la tente dans son petit sac brodé de perles. Il la rejoignit peu à peu, le visage aussi tendu que le sien. Une longue minute durant, ils restèrent ainsi, le regard perdu dans le vague, l'esprit envahit par cette sourde angoisse qui ne les quittait plus depuis le départ de Ron, près de deux semaines auparavant. Une absence qui leur pesait à tous les deux et qui ravivait de mauvais souvenirs pour l'un comme pour l'autre...
―Allons-y, souffla Harry.
Hermione se laissa faire lorsqu'elle sentit la main du garçon glisser dans la sienne, et l'entraîner vers une nouvelle destination. Un nouveau lieu. Un nouvel endroit, loin de tout, loin de leur monde, de leurs proches, de leur amour. Une journée de plus à arpenter le pays, à prier pour ne pas se faire prendre par des Rafleurs.
La première chose qu'elle perçut lorsque ses pieds touchèrent de nouveau la terre ferme, ce fut la musique. Au début, des marmonnements indistincts, puis de plus en précis à mesure que la petite chorale se rapprochait de l'endroit où ils avaient transplanné, sous un grand chêne recouvert de neige, à l'abri des regards curieux des moldus. La mélodie ne lui était pas inconnue et elle sentit son cœur louper un battement lorsqu'elle saisit pleinement le sens des mots.
―Harry... dit-elle d'une voix tremblante. Écoute... je crois que... je crois que c'est Noël.
En effet, c'était le soir du réveillon. De la lumière provenant de l'église du village indiquait à tous que la messe du soir avait déjà commencé. Des guirlandes de gui pendaient un peu partout le long des fenêtres mansardées des maisons de la rue principale. Un grand sapin décoré de boules multicolores trônait à l'entrée de la chapelle, et Hermione crut même distinguée quelques paquets à ses pieds.
―C'est Noël, répéta-t-elle.
La chorale s'éloigna et ils en profitèrent pour sortir de leur cachette. La lumière des guirlandes qui pendaient entre les maisons était si vive qu'elle donnait l'impression qu'ils étaient en plein jour.
―Joyeux Noël, Hermione, souffla Harry en lui pressant doucement la main.
Elle lui sourit et ils avancèrent prudemment dans la rue. Par mesure de précaution, ils s'étaient dissimulés sous les traits d'un couple de personnes âgées, grâce au Polynectar que la jeune femme avait récupéré dans la réserve de Monsieur Weasley en préparant leurs affaires. Ce souvenir semblait appartenir à une autre vie, à la vie d'une Hermione dont l'espoir était encore aussi solide que la roche.
Godric's Hollow lui donnait l'impression d'être un village suspendu dans le temps. L'ancien et le moderne se mélangeaient avec une telle finesse qu'au premier abord, on ne savait pas s'il s'agissait uniquement d'un village moldu ou d'un village sorcier. Ou bien les deux. Harry lui avait raconté que ses parents avaient vécu là avant leur mort, dans le manoir familiale des Potter, ainsi que la famille du professeur Dumbledore, bien des années auparavant. Une célèbre historienne de la magie y résidait encore, ce qui semblait presque surprenant, à en juger par les devantures de magasins typiquement moldus.
Ils dépassèrent l'église, dans laquelle de nombreux fidèles s'étaient réunis en cette soirée pour célébrer le réveillon. Leurs voix, s'élevant à l'unisson, reprenaient les mêmes paroles qu'ils avaient entendu à leur arrivée.
Elle fut la première à remarquer le cimetière, attenant à la chapelle. Comme le reste du monde, il était recouvert de neige, masquant à demi les stèles grises qui s'élevaient du sol, et qui contenaient en leur sein la dernière résidence de centaine de personnes. Cette vision lui rappela combien ses parents lui manquaient. Combien vivre sans eux lui pesait au fil des jours, puis, elle se souvint de qui s'y trouvait.
Le regard brillant, elle se retourna vers son meilleur ami, à l'instant où lui aussi apercevait le cimetière. Elle vit la surprise dans ses prunelles. La surprise mêlée à un sentiment qu'elle ne put identifier. Une émotion que seul un enfant orphelin depuis sa naissance pouvait ressentir.
―Tu crois qu'ils sont là ? chuchota Harry.
―Certainement, répondit-elle.
―Alors je veux y aller.
Un instant, elle fut tentée de lui demander s'il voulait s'y rendre seul, mais la poigne du garçon se raffermit sur son bras et elle le laissa l'entraîner au de-là du petit muret en pierre. Le silence se fit autour d'eux, comme si le cimetière était recouvert d'un sortilège de silence. Un léger vent souleva les quelques flacons tombés récemment.
―Séparons-nous, proposa-t-elle en constatant que les lieux étaient bien plus grands qu'il n'y semblait.
Harry acquiesça et s'éloigna sur la gauche. Elle l'observa se pencher sur la première tombe pour dégager la couche qui recouvrait l'inscription, avant de l'imiter.
Déambulant entre les allées du cimetière, elle vérifiait chaque stèle avec minutie, soucieuse de ne pas manquer celle des Potter. Elle savait combien cette visite était importante pour son ami, car la tombe marquerait un lien bien réel entre eux. Elle témoignerait de leur passage sur cette terre, des vies extraordinaires qu'ils avaient pu avoir, bien qu'elles furent brèves. Il aurait l'occasion de les découvrir, bien au de-là des souvenirs de Sirius et ceux de Remus. Ils deviendraient réels et ça, Harry en avait rêvé toute sa vie.
Ce ne fut pas le nom des Potter qui attira son attention sur la tombe suivante. Ce ne fut pas non plus l'emblème de leur famille qui figea son corps tout entier. Ce ne furent pas les dates gravées à jamais dans le marbre qui éveillèrent les souvenirs de son cerveau.
Non.
Ce fut l'étonnant triangle inscrit au-dessus du nom d'Ignotus Peverell. Une forme qu'elle avait déjà remarqué. Une forme qui revenait souvent dans le livre de contes pour enfants que le professeur Dumbledore lui avait légué. Un dessin manuscrit. Une marque qui n'aurait pas du se trouver-là. Un symbole qu'elle n'avait encore jamais vu.
Et pourtant.
Il se trouvait là, sous ses yeux. Un peu abîmé par les aléas de la vie, mais bien reconnaissable. Ce même triangle, contenant en son sein un rond parfait, barré d'un trait vertical.
Un symbole que Dumbledore tenait visiblement à ce qu'elle voit. Un signe qu'il leur laissait et elle l'espérait, qui les guiderait dans leur tâche.
―Harry... commença-t-elle.
Elle s'interrompit brusquement en le voyant devant une imposante stèle en marbre blanc, à une dizaine de mètres d'elle. Son rythme cardiaque s'intensifia et une boule de peine se forma au creux de sa gorge.
Le symbole et Ignotus Peverell s'effacèrent de sa mémoire et elle s'empressa de rejoindre son ami pour le soutenir.
James et Lily Potter reposaient devant eux, sous une tombe aussi haute qu'un homme, à demi ensevelie sous la neige.
―Ils sont là... renifla Harry. Hermione, tu te rends compte, ils sont là. Ils sont vraiment là...
Retenant difficilement ses larmes, la jeune femme se glissa aux côtés de son ami et accepta sa main tendue.
" Le dernier ennemi qui sera détruit est la mort " disait l'épitaphe.
Elle espérait de tout son être que ce serait vrai.
[...]
Où es-tu ?
J'ai si mal.
Es-tu saine et sauve ?
J'ai l'impression qu'on me déchire de l'intérieur.
Es-tu en sécurité ?
Le venin du serpent incendie la chair à vif de mon bras.
Pourquoi es-tu partie ?
L'essence de dictame me brûle et j'ai du mal à me retenir de hurler.
Tu devrais être là, avec nous, à fêter Noël. Vous devriez y être tous les trois.
Les larmes coulent le long de mes joues tandis que les bords de la plaie se referment.
Noël n'a pas la même saveur sans toi.
Il ne reste rien. Plus aucune balafre, ni aucune plaie. Comme s'il ne s'était rien passé.
Maman se retient de pleurer, je le vois bien. Et elle n'est pas la seule.
Harry dort encore sans son lit d'appoint. Merlin, faites qu'il aille bien...
Tante Muriel marmonne dans sa barbe que nous sommes trop nombreux pour son si petit salon.
Il a été plus amoché que moi. J'ai tellement peur. Je ne pourrai pas le perdre non plus.
Papa essaie de détendre l'atmosphère en augmentant le son de la radio, mais personne n'a le moral. Personne n'a le goût de la fête.
Ron et lui... Sans eux, je n'y arriverai pas. Sans eux... sans toi, je ne suis plus rien.
Je m'imagine que tu es là, dans mes bras... que ton sourire réchauffe la pièce.
Fred, j'ai tant besoin de toi. J'ai tant besoin de ton soutien. De ton amour. De ta confiance en moi.
Ginny raconte quelques anecdotes sur notre enfance, avec l'espoir de redonner un peu de joie à tout le monde ; en vain.
Tu me manques... Ce Noël sans toi est le pire que j'ai jamais connu.
J'ai entendu Papa dire qu'il était hors de question qu'elle retourne à Poudlard à la rentrée.
J'aimerai tant être dans tes bras, en train de regarder les autres se chamailler pour savoir qui aura le privilège d'ouvrir son cadeau en premier.
George s'inquiète pour Luna, je le vois dans son regard.
J'espère que nous nous reverrons bientôt.
Je prie chaque jour pour que tu me reviennes.
Fred... je t'aime.
Je t'aime tellement que ça m'en fait mal, putain.
« Noël. Ce soir, c'est Noël. La neige tombe sans discontinue depuis quelques jours et cela apaise un peu la douleur de mon cœur. Ron n'est toujours pas revenu, nous n'avons pas trouvé le moindre indice de l'endroit où il pourrait être. Pas la moindre nouvelle. Harry s'en veut terriblement... il ne dit rien, mais je ressens son angoisse comme si c'était la mienne. Nous continuons de voyager, mais plus les jours passent et plus nous réalisons que nous fonçons droit dans un mur. Un mur si haut, si solide, que même tout le courage du monde ne pourrait faire s'effondrer. »
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Hello, et bon dimanche !
Nous voici donc avec le chapitre 7 (plus que deux avant d'atteindre la moitié des chapitres) et je tenais à m'excuser car je sais que je publie rarement les mercredis comme c'était prévu, mais ma sœur s'est fait opérée il y a pas longtemps du genou et elle ne peut pas rester seule pour s'occuper de sa petite d'un an, donc je passe autant de temps que possible avec elle pour l'aider avec le bébé. Donc, c'est pour ça que je publie pratiquement que le dimanche en ce moment.
Je voulais aussi vous dire que durant ces longues heures clouée au fond de son canapé, elle a décidé de créer une page facebook à mon intention, dans laquelle elle souhaiterait que je parle de ce que je fais et de ce que j'écris, alors si l'envie vous prend, n'hésitez pas à aller voir :
https://www.facebook.com/HeilenBlackHP/
Encore merci pour votre soutien, car sans vous, je ne serai jamais arrivée au bout de cette histoire. <3