J'ai passé une folle nuit. Vraiment très excitant. Le comble de l'excitation. J'ai commencé mon tour de garde à 23 heures en rejoignant Léon dans le Hall, il m'attendait sagement avec l'air un peu fatigué.
« Salut Molly. »
J'étais tout à fait angoissée par la soirée et sur les nerfs, je n'ai pas répondu. Je suis quelqu'un de désagréable, ça me désespère. Un silence un peu gênant s'est installé alors qu'on commençait à patrouiller dans le couloir du premier étage. On a marché côte à côte et il a dû comprendre que je n'avais pas spécialement envie de lui parler. Je pense davantage à cet inconnu, celui qui a des informations sur ma mère. J'ai interrogé Tristan Claybrook pour savoir si c'était bien lui qui avait donné le mot à Lysander. Il a dit qu'il l'avait fait parce qu'une fille de Poufsouffle qui est au moins en Cinquième année lui avait dit de le faire. Il était trop tard pour que j'aille réveiller les blaireaux et leur demander aimablement de se rendre, pointant ma baguette vers eux. Je suis décidément très fatiguée.
« Tu vas bien ? demande Wilkes en me jetant un coup d'œil.
– Génial, j'adore ta compagnie donc ça va de mieux en mieux.
– Vraiment ? »
Il a l'air étonné. Je soupire, il a du mal avec l'ironie. Je lui apprendrais un jour à reconnaître les personnes qui utilisent régulièrement le sarcasme. Ou non, mieux, je le laisserais se faire avoir à chaque fois. Je le regarde avec des yeux las. Je vois enfin dans ses yeux une étincelle d'intelligence. Il a compris, merci Merlin de parfois lui accorder la raison. Il soupire, avec un léger sourire et en me pointant du doigt, il commente :
« Tu vois, Weasley, on dirait comme ça que tu n'es pas drôle mais tu as un peu d'humour quand même. Noir et bien caché mais c'est déjà ça. Tu n'es peut-être pas un cas désespéré.
– S'il te plaît ... Arrête de dire de telles choses. Je suis quelqu'un d'horrible et c'est très bien comme ça. »
Je jette un coup d'œil à ma montre et voit que minuit approche à grand pas. L'aiguille dorée laisse derrière elle une traînée de petites étoiles qui s'agglutinent pour former des constellations. Un cadeau de mon père pour mon passage à la majorité. Je lève les yeux vers Wilkes qui ouvre une salle pour voir si elle n'est pas clandestinement occupée. Il faut que j'aille tout de suite et rapidement au troisième étage.
« Wilkes, tu n'as qu'à continuer par là, dis-je en lui montrant le couloir devant nous. J'ai cru entendre un bruit vers de l'autre côté, c'est sûrement Peeves mais je vais vérifier. Je te retrouve dans une dizaine de minutes.
– Je peux venir avec toi, si tu veux, fait-il en avançant d'un pas vers moi alors que je commence à reculer.
– En fait, Léon, je suis désolée de te décevoir mais j'ai menti. Ta compagnie m'est tout à fait désagréable. Je préfère autant ne pas rester avec toi, pour ton bien. »
Il fronce les sourcils et hausse les épaules. Génial, je suis débarrassée de lui, je file vers le couloir du troisième étage, montant les escaliers quatre à quatre. Je suis arrivée à minuit tapante, ma montre est à l'heure. Et j'ai attendu, essoufflée, que l'inconnu vienne, assise contre le mur, sur le tapis moelleux. C'est après dix minutes à patienter avec un mauvais pressentiment que je me suis levée pour observer autour de moi. Mes yeux se sont enfin posés sur le casque relevé d'une armure d'où un papier semblait sortir. J'ai tiré dessus, ça a fait un peu de bruit mais ce n'est pas ça qui me préoccupe parce qu'un sentiment inexprimable m'envahit en lisant les quelques mots sur le papier.
Merci d'être venue, tu confirmes ce que je pensais : tu es bien plus amusante à regarder que quiconque d'autre. Je pourrais te donner un indice mais ce serait trop simple. Je t'embrasse de mon lit, ma chère Molly.
C'était une sorte de test, rien d'autre. Je suis écœurée. J'en ai pleuré. Ça faisait longtemps que je n'avais pas pleuré comme ça, des mois, peut-être même plus. Je ne m'en souviens plus tellement c'était loin. Mais là, le message entre les mains, à minuit, seule dans le couloir, j'étais fatiguée, mes nerfs ont lâché. J'ai fondu en larmes et le pire, c'est que Léon, inquiet de ne pas me voir revenir m'a trouvé dans cet état pitoyable. J'ai eu beau lui avoir lancé le pire regard que je pouvais faire, ça ne l'a pas empêché de s'approcher de moi. J'ai froissé le papier, le mettant dans ma poche pour qu'au moins il ne voie pas cela. Il m'a regardé, préoccupé, s'agenouillant près de moi :
« Weasley, qu'est-ce qu'il s'est passé ? Est-ce que Peeves t'a insulté ? Tu t'es pris un ...
– Dégage, Wilkes, éructé-je. Immédiatement, espèce de simple d'esprit ! »
Il a juste souri en me tapotant l'épaule et me tendant une main pour que je me relève. D'un ton amusé, il a fait remarquer :
« Oh, mais tu vas très bien, tu arrives encore à m'insulter.
– Casse-toi, abruti !
– Molly, tu es en train de pleurer. Je ne t'ai pas vue pleurer depuis le jour où tu as reçu un Désolant en potion en troisième année et tu n'en as jamais eu à nouveau après ça. Alors tu vas faire comme tu fais d'habitude, tu te relèves et tu deviens plus forte encore. »
Je rêve ou il est en train d'essayer de me remonter le moral. Je grimace, ignorant sa main pour me relever toute seule. Je me sens légèrement vaciller, il me tient par le bras pour que je ne tombe pas. Je le foudroie du regard. Il va penser quoi de moi maintenant ? Zéro crédibilité, il a de quoi m'attaquer. Je m'écarte de lui, reniflant quelque peu et je lui ai dit :
« Je vais me coucher.
– Attends, je t'accompagne, tu ne marches pas droit.
– Je marche comme je veux, d'accord ? Tu es bien gentil mais tu vas retourner tranquillement à ta salle commune, comme si rien ne s'était passé. Si j'entends quelque chose sur cette nuit, je saurais que ça vient de toi et je ne te raterais pas. »
Il a levé les mains en l'air et a reculé de quelques pas. Je suis partie de mon côté, m'essuyant discrètement les yeux avec la manche de ma robe. Qu'est-ce qu'il lui prend à Léon ? Être gentil se révèle presque suspect. Et s'il savait pourquoi j'étais comme ça ? Et si c'est pour ça qu'il avait accepté de déplacer la date du tour de garde. Je m'effondre sur mon lit, essayant de ne plus penser à rien. Quelle folle nuit.
Ce matin, je me suis levée particulièrement tôt pour un samedi, je me suis préparée tout à fait normalement, j'ai lancé un coussin sur Roxanne pour qu'elle se réveille, elle a grogné comme d'habitude et est restée couchée. Il est hors de question que je me laisse abattre. Je trouverai qui est cette personne qui m'écrit des mots troublants et qui a des informations sur ma mère. Je respire un bon coup et descends manger.
James est déjà assis à la table des Gryffondor, je m'installe à côté de lui. Il me fait un sourire en ne me regardant pas mais en surveillant du coin de l'œil un groupe de fille qui pouffe à l'autre bout de la salle en s'agitant. Mon cher petit cousin, ses parents sont si célèbres que ça le met mal à l'aise. Ça ne se voit pas de l'extérieur mais moi, je le connais bien. Il a beau être un jeune homme effronté qui fait des sourires charmeurs à toutes les bandes de filles qui soupirent en le voyant, il s'en fiche complètement d'elles. Il s'amuse juste à les regarder se battre pour lui. J'avoue que c'est assez drôle mais ça reste quelque chose de dangereux. Régulièrement, il doit déjouer les pièges et les guet-apens pour les éviter.
Il me regarde avec des yeux un peu fatigués et me dit en baillant :
« Salut Mo', comment ça va aujourd'hui ?
– Je pète la forme, dis-je en prenant un morceau de pain et en mordant dedans comme je mordrais dans la personne qui me tourmente.
– Tant mieux. »
Il hoche la tête en soupirant, ce qui me fait penser qu'il ne va peut-être pas si bien de son côté. Je me sers en jus de citrouille en lui demandant :
« Et toi ? Qu'est-ce que tu fais debout de si bon matin ?
– L'appel de la marmelade, s'exclame-t-il en tartinant son pain.
– Bien sûr. Et pour de vrai ? dis-je en plissant les yeux.
– L'envie de regarder le soleil se lever sur les montagnes. C'est un spectacle merveilleux, si poétique et d'une douceur surprenante. »
Je secoue la tête. D'accord, j'ai compris, il ne veut pas m'en parler. Un peu vexée mais souriante, je regarde à nouveau le groupe de fille qu'on entend ricaner d'ici. Je me tourne vers mon cousin qui garde un œil sur elles.
« Dis-moi, tu ne connaîtrais pas une Poufsouffle au moins en cinquième année qui pourrait rendre un service assez facilement ?
– Je connais des Poufsouffle, déclare-t-il amusé par ma question en levant les yeux en l'air pour réfléchir. Pourquoi ?
– Une enquête. »
Il hausse un sourcil étonné et se rapproche de moi, intéressé, délaissant sa tartine.
« C'est très mystérieux. Quel genre de service ? chuchote-t-il.
– Transmettre un message, par exemple.
– J'en connais quelques unes. »
Il affiche un sourire pensif et regarde en direction du groupe de filles qui se trémoussent toujours. Je hoche la tête en souriant.
J'ai passé ma journée en sa charmante compagnie et celle de Tristan, capturé pour l'occasion en échange de chocogrenouilles. On est allé à la recherche de la Poufsouffle messagère dans le but de remonter à la source. Ce n'est ni Jennifer Hopton, ni Rebecca Lemoine, encore moins Olga, la petite sœur de celle-ci. Au bout d'un moment, on est arrivé à Stella Van Elter. La dernière sur notre liste. La meneuse du fan club de James et la plus jeune capitaine de l'équipe de Quidditch de Poufsouffle depuis quelques temps. Une blonde, longues jambes, le teint brillant et les cils impressionnants. J'ai souri en jetant un coup d'œil à James qui grimaçait.
« Elle a tout l'air de la perle rare, ai-je déclaré en la regardant.
– Tu me charries, n'est-ce pas ? Elle est pire que toutes les autres, j'ai dû lui mettre un nombre invraisemblable de râteau et elle n'arrête pas.
– Et coriace, motivée et déterminée en plus. Tu rates certainement quelque chose,» commenté-je en haussant un sourcil moqueur.
Tristan a toussé pour attirer notre attention. Il hoche vigoureusement le tête en la regardant.
« C'est elle ?
– J'en suis à peu près sûr, répond-il avec sérieux.
– Parfait, les gars, votre mission est remplie. Vous pouvez disposer, ai-je conclu en leur tendant un sachet de chocogrenouilles chacun. Bon appétit ! »
Ils m'ont fait un sourire radieux en attrapant leur récompense et s'en sont allés vers d'autres horizons. Je me suis avancée vers cette Stella.
« Van Elter ! l'ai-je appelée en m'approchant d'elle et de son petit groupe. J'ai des questions à te poser, tu peux venir ? »
Un peu inquiète, elle a regardé autour d'elle et a acquiescé en me suivant, demandant :
« Que se passe-t-il ? Est-ce que ça a un rapport avec l'équipe de Quidditch ? J'ai demandé à McGonagall si je pouvais avoir le terrain la semaine prochaine pour les essais et ...
– Rien à voir, la coupé-je sans scrupule. C'est à ce propos. »
J'ai sorti le message de mon sac pour lui montrer. Elle a plissé les yeux en l'observant et son regard s'est éclairé. Je l'ai interrogée :
« Tu as donné ce message à un jeune garçon nommé Tristan Claybrook, exact ? Qui te l'a donné ? continué-je après qu'elle eut opiné du chef.
– Personne. Je l'ai trouvé dans mon sac l'autre jour avec un mot me disant de le faire passer à quelqu'un en lui disant de le donner à Lysander Scamander pour qu'il te le donne. J'ai trouvé ça très étrange mais comme je ne savais pas de qui c'était, j'ai préféré le faire. Après tout, ça avait l'air d'être important. »
J'ai soupiré en la remerciant. Je ne sais toujours pas qui est l'expéditeur, elle ne m'a pas trop avancée. Elle s'est excusée de ne pas pouvoir m'aider plus et est retournée vers ses amies. Je n'ai rien sur l'inconnu et plus le temps avance, plus j'ai l'impression d'aller droit dans le mur.