La Tour d'Ivoire - Tome 2

Le secret des temps perdus, Partie II

« The memory of you will haunt me for the rest of my days. »

Auteur inconnu

Elle se dégagea.

-Ne dis pas ça, Violette, tu ne sais pas ce que tu dis. Si Arianna est encore en vie, elle est prisonnière de la Tour et de ton père, et il hors de question que tu remettes les pieds là-bas. Si tu y retournes, Era, jamais tu n'en sortiras.

Elle baissa les yeux sur mon ventre.

-Surtout maintenant que tu portes son enfant. Ce n'est pas ton père, ni ta mère, ni ton frère, ni même Melech ton plus grand péril. C'est lui. Ayaan Malkam ne doit jamais apprendre qu'il est père. Il est déjà complètement obsédé par toi, mais là... (Elle secoua la tête.) Je n'ose même pas y penser.

-Il m'aime, il ne me fera aucun mal.

-Oh, ma petite, dit-elle d'une voix chargée de pitié, tu ne connais pas les hommes. Les hommes comme lui ne supportent pas qu'une femme leur échappe et encore moins si elles portent en elle leur héritier. Ce n'est pas de l'amour, ma petite, c'est un poison qui tue à petit feu. Et tu seras la première à en payer le prix, juste après ceux que tu aimes et qui voudront t'en protéger.

-Et que voudrais-tu que je fasse ? Ce n'est quand même pas ma faute !

-Non, ce n'est pas ta faute, mais tu peux éviter de faire certaines erreurs. Ne cherche jamais à le retrouver ni à marchander avec lui. Tu perdras, ma chérie. Tout. Ton enfant en premier.

-Jamais, rugis-je.

Elle hocha la tête.

-Contente de voir que ce bébé à réveillé la battante que tu es. Si tu ne le fais pas pour toi, fais-le pour l'enfant.

-Il va lui ressembler, grand-mère... dis-je, au bout de quelques instants. Il aura ses yeux, ses cheveux, son visage. Et s'il ne ressemble pas à son père, il aura les yeux violets d'Era Eléazar ou les cheveux caractéristiques de sa famille. Dès que cet enfant verra le jour, la supercherie sera révélée à tous. Ils comprendront qui je suis, et qui est le bébé.

-En effet. Il y a beaucoup de chance que cet enfant ressemble à ces parents et à ses ancêtres, dont les caractéristiques physiques sont connues de tous.

-Que lui feront-ils ? seraient-ils capables de le tuer ?

-Tu le sais très bien, Violette, répondit-elle d'un ton sec.

-Non, je ne sais pas.

-Alors tu es encore plus aveugle que je ne le croyais.

-Comment ça ?

J'étais perdue, je ne voyais pas où ma grand-mère voulait en venir.

-Ce n'est pas à moi de te dire ce que ton cœur sait déjà, mon enfant.

Voyant qu'elle ne m'en dirait pas davantage, je changeai de sujet.

-Je dois te parler de quelque chose, grand-mère... je... en partant de la Tour, j'ai laissé un livre derrière moi.

Elle se retourna vivement vers moi.

-Quel livre ?

Je la sondai du regard.

-Celui transmis depuis des générations à tous les cadets de la famille Eléazar. Une latte sous le plancher de la chambre des cadets dissimule un vieil écrin assez large pour contenir un livre.

-Un journal, dit-elle dans un souffle.

Je hochai la tête.

-Oui. J'ai compris récemment qu'il était écrit en français. Je n'ai jamais pu le lire, puisque cette langue m'était inconnue.