Elyssa Eléazar - Partie II

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"You are holding it in your hands - your power. Use it."

Seeker

Évidemment, Maria s'était attendue à cette question. Elle savait de qui sa sœur voulait parler.

         Emmanuel Sanra. Le fils aîné d'un des Représentants. Sa famille était riche et haut placée. Intelligent, très beau, et gentil, il était actuellement le jeune homme le plus demandé et le plus courtisé. Ses parents espéraient le faire épouser une fille des quatre Familles.

         Ravana Malkam, la dirigeante de la famille Malkam, qui avait mystérieusement  perdu son premier mari avant d'avoir pu engendrer d'héritier avait alors décidé de ne pas reprendre époux avant le jour où elle l'aurait décidé, avait tout de suite repéré le beau jeune homme. La belle et cruelle femme avait alors décidé de faire de lui le père de ses héritiers.

Malheureusement pour Ravana, le chemin du bel Emmanuel Sanra avait croisé la route d'Elyssa, et dès lors, son cœur ne fut plus qu'à elle.

         Elyssa et Emmanuel étaient tombés amoureux l'un de l'autre et rien n'avait semblé pouvoir les séparer.

         Rien. Sauf la mort.

         -Tous les jours. Il est venu tous les jours.

         Le visage d'Elyssa sembla rayonner. Mais soudain, une lueur s'éteignit dans ses yeux.

         -Lui aussi je vais l'abandonner...

         -Ne dis pas ça, tu ne vas pas abandonner personne !

         - J'espère qu'il ne m'en voudra pas...

         -Ne dis pas de bêtises, Ely! Il t'aime!

         -Et toi ? M'en voudras-tu ?

         Maria caressa les cheveux trempés de sueur de sa sœur et avec tendresse lui murmura :

         -jamais. Je t'aime, Elyssa, je t'aimerai toujours. Que nous soyons ensemble, séparés, mortes ou vives, je suis ta grande sœur et je t'aime.

         -Moi aussi je t'aime Maria.

         Les deux sœurs se regardèrent longuement. Maria avait toujours trouvé Elyssa très différente d'elle physiquement, mais alors qu'elle la contemplait silencieusement, elle repéra pour la première fois tous les petits détails qui prouvaient qu'Elyssa Eléazar était sa sœur à bien des égards. Les mêmes pommettes hautes, les mêmes mains longues et fines, la même expression de douceur dans les yeux, le même nez droit, les mêmes sourcils parfaitement dessinés qui m'étaient leur visage si bien en valeur.   

         -Tu ne mourras pas, Ely. Je ne le permettrais pas.

         -Même toi tu n'as pas ce pouvoir, ma sœur... je vais mourir, lança-t-elle, les yeux brillants. Je vais mourir et toi tu dois vivre. (Elle tourna soudain la tête vers le fond de la chambre.) Il y a encore quelque chose que je dois faire avant de partir...

         -Elyssa ?

         -Va au fond de ma chambre, Maria, près du mur des portraits, là où nous jouions enfants. Je... il y a une encoche sur le sol... c'est un lieu caché... prend la boîte à  l'intérieur, prends-la, Maria, prend la.

         Maria, confuse, s'exécuta. Lorsqu'elle réussit à soulever la planche et qu'elle eut entre ses mains une vieille boite noire, elle ressentit un regain d'adrénaline se répandre dans ses veines.

         -Elyssa... mais qu'est-ce donc ?

         -La réponse à tout, Maria. À toutes les questions que notre monde se pose depuis deux mille ans.

         Maria ouvrit la boîte sans plus attendre et trouva deux carnets abîmés par le temps. Elle les feuilleta rapidement, un contenait des croquis en tout genre et l'autre... Maria n'eut pas le temps de lire plus, mais elle comprit qu'il avait été rédigé en français.

         -Elyssa... c'est du français... c'est interdit...

         -Je sais, Maria.

         -Où as-tu eu ça ?

         -Tante Mallora. La cadette de notre père.

         -Je ne comprends pas...

         -Maria, ce que je vais te révéler est un des plus grands secrets de la Tour. Le plus gardé et le plus dangereux. Un secret que tu n'aurais jamais dû connaître.

         -Un secret que tu connais.

         -Oui.

         -Depuis combien de temps ?

         -Toujours. Depuis que j'ai été en âge de conserver ces ouvrages. Et de garder ma langue.

         -Raconte-moi.

         -Ces livres se transmettent de génération en génération au cadet Eléazar depuis le début de la Tour. Personne ne sait qu'il les a donnés à la femme d'Alexandre Eléazar, Eléonora, mais depuis, chaque cadet Eléazar le donne au cadet de la dynastie suivante. Moi-même, j'aurais dû le donner un jour à ton cadet, Maria, ton fils ou ta fille. Malheureusement, je ne vivrais probablement pas assez longtemps pour voir tes enfants naitre... Mais je te fais confiance, à toi plus qu'à quiconque, je sais que tu perpétueras la tradition et que tu garderas ce secret. Mon secret.

         -Et que racontent ces pages ?

         -Je ne pourrais te le dire. L'ironie du sort a fait que ces livres sont transmis au cadet... les seuls enfants des créateurs n'apprenant pas les langues d'avant, ce privilège revenant aux aînés... Aucun des anciens processeurs des livres n'en a jamais compris le sens, nous savons seulement deux choses...

         -Lesquelles ?

         -Que jamais aucun aîné ne doit apprendre leur existence et que leur contenu peut changer la face du monde.

La Tour d'Ivoire - Tome 2Where stories live. Discover now