Chapitre 36

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Pressée pour reprendre le métro, je descends les escaliers de la faculté .

Scott et Lola m'ont abandonnée, séchant tout l'après-midi pour vaquer à leur occupation respective. Évidemment, j'ai assisté au cours de neuropsychologie et ai correctement pris notes. De toute manière, toute la matière est reprise dans le syllabus qui pèse une tonne dans mon tote bag.

Au détour d'une rue, mon regard croise celui de quelqu'un que je ne croyais plus jamais revoir. Mon sang ne fait qu'un tour. Je cherche autour de moi une échappatoire.

— Jo ! Attends !

— Laisse-moi, Arthur !

Je bifurque dans la direction opposée, préférant marcher plus longtemps que de passer près de lui. Je ne sais même pas pourquoi il est là. Et comment a-t-il su que je finissais à cette heure-ci ? 

Est-ce qu'il m'espionne ?

Je m'arrête net et tourne la tête pour le découvrir planté au même endroit. Il n'a pas bougé, me scrutant d'un regard aussi noir que son âme.

Je reviens sur mes pas et lui rentre presque dedans. Je ne sais pas ce qu'il me retient de lui en foutre une. Je le foudroie du regard.

Aujourd'hui, je ne suis plus intimidée. Je n'ai plus peur.

— Que fais-tu là, Arthur ? craché-je.

Ce dernier tente déjà de m'amadouer. Il essaie de capturer ma main, mais je la retire vivement avant qu'il n'ait pu la toucher. Un sourire moqueur se dessine sur ses lèvres.

— Toujours aussi féroce, Jo... souffle-t-il.

Il me répugne.

— Tu as deux minutes pour t'expliquer.

Je croise les bras, espérant dresser un bouclier entre lui et moi. Mais il semble toujours aussi amusé.

Je le surprends même à me mater. À croire que je lui plais encore !

— Tu es toujours aussi sublime ! s'extasie-t-il, m'arrachant une grimace. Après trois ans, j'ai eu le temps de réfléchir à la façon dont, nous deux, ça s'est terminé.

Je hausse les épaules, toujours sur la défensive. Je sens la chair de poule recouvrir mes bras, alors qu'il fait presque vingt-sept je degrés. Je suis frigorifiée.

— Je voudrais m'excuser. Et peut-être que je pourrais t'inviter à boire un verre ? poursuit-il.

Boire un verre ? Mes yeux s'écarquillent. J'ai envie de vomir. 

— Tu as oublié comment se terminent les soirées lorsque tu as trop bu !?

Il pâlit et passe une main dans ses épais cheveux noirs jais pour se donner une certaine contenance.

— Un dîner sans alcool ? Juste nous deux comme avant ? me supplie-t-il.

La fille que j'étais il y a trois ans aurait cédé. Elle aurait dit oui, croyant au grand amour. Mais on ne change pas les gens violents. On ne change pas son compagnon qui essaie d'abuser de nous, car celui-ci a un verre dans le nez. On le fuit. On porte plainte contre lui.

— J'ai eu le bras dans le plâtre durant deux longs mois parce que tu l'avais comprimé si fort, alors que tu essayais de t'insérer en moi, que le radius s'est brisé. Cette blessure physique n'est rien comparée à celle que tu aurais pu m'affliger si je n'avais pas alerté Harry avec mes cris. Aujourd'hui, je ne veux plus rien avoir à faire avec toi !

Je passe à côté de lui, lui donnant un coup d'épaule.

Je ne me sens pas du tout libérée. Le poids des souvenirs m'accapare toujours. J'ai l'impression que tout le monde peut lire en moi. Que tout le monde me dévisage bizarrement. Que tout le monde sait ce que j'ai subi le 23 août 2014.

Victoria Line (T1 de Thistly Heart)Where stories live. Discover now