Chapitre 16: Toucher le fond

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Installée derrière le bâtiment de l'école, assise sur une plateforme ronde, je profite de ce temps de midi calme, loin de tout le monde, loin de Damon et ses conneries. J'en ai eu assez aujourd'hui, je n'ai rien fait, je l'ai laissé faire, je n'ai eu aucune réaction ni émotion, il va sûrement se lasser, c'est la seule solution pour l'instant.

Mes cours éparpillés partout, lunettes sur le nez ( je profite que personne ne soit là pour les mettre, c'est mon petit secret), sourcils froncés, je suis plongée dans mes cahiers, je prends de l'avance, je fais des synthèses puis des fiches, j'apprends tout par coeur. J'aime apprendre, mémoriser, réfléchir, penser, régler et faire tout ce genre de choses qu'on fait à l'école, dommage juste que j'ai un gros problème avec l'environnement, le système scolaire et tant d'autres choses.

-Tu sais, j'ai l'habitude que les gens aient une mauvaise image de moi et j'aime ça. C'est d'ailleurs ce qui fait que je suis irrésistible auprès des filles.

J'enlève vite mes lunettes et les range dans mon sac, je soupire un bon coup puis regarde mon interlocuteur en analysant ses paroles. Qu'est-ce qu'il fait là ? Et pourquoi me dit-il ça?

-J'en ai rien a faire Zack, va t'en.

-Je ne suis pas une mauvaise personne dans le fond.

-Super, lâchais-je ironiquement.
-Qui essaies-tu de convaincre Zack? Toi ou moi?

Voilà un petit blanc qui s'installe, 1-0 pour Maya.

-La personne qu'on est à l'école et en dehors c'est très différent Maya.

1-1 égalité.

-Ah oui? Je ne savais vraiment pas, dis-je avec sarcasme.

-Ouais, j'avais oublié que tu étais une madame je-sais-tout-mieux-que-tout-le-monde.

-C'est l'image que tu as de moi, et je ne juge pas ton opinion alors pourquoi tu ne fais pas de même avec moi?

-J'en ai rien à faire de ce que tu penses de moi Maya.

-Ce n'est pas vrai, et tu le sais. Sinon tu ne serai pas venu ici pour m'assurer que tu es quelqu'un de bien au fond.

-Tu vois? Tu crois tout savoir sur tout le monde, tu crois que tu sais cerner les gens, que tu les connais mieux qu'ils ne se connaissent eux-même.

-Si tu le dis.

Je n'ai pas de temps pour rentrer dans son petit jeu, il a un avis sur moi et je le respecte. Je n'essaie pas de lui assurer que je ne suis pas ce qu'il croit, je n'ai aucun compte à lui rendre.

-Arrête! Avoue au moins.

-Si tu veux.

-Tu es vraiment très têtue !

-Oui je suis au courant.

-Pourquoi tu es sur la défensive avec moi ? Me demande-t-il.

-Es-tu vraiment en train de me poser cette question sérieusement?

-Oui, je te pensais plus mature que ça.

Alors ça c'est la meilleure ! Bien sure que je suis mature bien plus qu'eux d'ailleurs, il essaie juste de me faire rentrer dans son jeu débile.

-Quel retournement de situation incroyable !

-Comparé aux autres je suis celui qui a été le moins horrible avec toi.

-Que tu sois le plus ou le moins horrible ça ne change pas le fait que tu sois horrible avec moi.

-Je ne suis pas comme ça, je n'aime pas être ca et je ne prends pas plaisir contrairement à ce que tu crois, se défend-il.

-C'est ça, fais-toi passer pour la pauvre petite victime seulement. Décidément, tu as un talent incroyable pour retourner les rôles et les situations.

-J'en ai marre, je me casse.

-Tant mieux, ça commençait à puer le petit garçon en pleine crise d'adolescence.

Si je me permets de dire ça c'est parce que je sais pertinemment qu'il ne va pas me toucher.
Quand il est seul, il ne touche à personne.

-Et toi tu pue le cliché de madame je sais tout, la boutonneuse à lunettes, sauf que toi tu n'as pas d'appareil dentaire et tu es grosse!

Mais il peut faire très mal avec ses mots...

*

Arrivée chez mes tuteurs, je m'empresse de monter dans la chambre qui m'est destinée, de jeter mon sac par terre, de sauter sur le lit et prendre le coussin dans mes bras pour pleurer à chaudes larmes. Quelle vie de merde! Je déteste me réveiller chaque matin, je déteste aller à l'école, je déteste Damon, je déteste Zack, je déteste les adultes, je déteste mon passé mais aussi mon futur car je sais qu'il sera tout aussi pourri que mon présent. Victime un jour, victime toujours! Je déteste mes tuteurs, je me déteste, JE DÉTESTE LA VIE!

Je suis tombée tellement bas... Au début, je nageais juste, j'avais du mal à avancer, puis je me suis arrêtée , j'ai fais du sur-place puis j'ai commencé à me noyer ou plutôt on m'a noyée, j'ai coulé de plus en plus, me reprochant de plus en plus de la profondeur de l'océan et là j'ai touché le fond.

J'ai tellement honte...Honte de moi, de mon physique, mon comportement, je suis sans intérêt, je suis ennuyeuse, inexistante, pathétique, je ne suis qu'une merde quoi. Je n'existe pas, pour personne.

Ce qui est bizarre c'est que parfois j'ai tellement de sentiments qui se bousculent à l'intérieur de moi et que d'autres fois, j'ai juste l'impression d'être vide, sans émotions ni sentiments, c'est le noir à l'intérieur.

Y en a marre de faire semblant, de devoir garder la tête haute, devoir faire croire que je suis forte, que rien ne m'atteint, que je suis "heureuse". Il est vrai que je vois souvent le côté noir plutôt que blanc. Je suis devenue pessimiste, pleine d'ironie et de sarcasme.

Et puis qu'est-ce que je fais ici déjà? Je n'aime pas être là, je ne suis vraiment pas heureuse, nulle part d'ailleurs.

Et si je m'en allais? Après tout, ce ne serait pas la première fois. J'irai ou hein? Qu'est-ce que je deviendrai? Je n'ai même pas de quoi survivre une semaine dans la rue... Non, fuir ne servirai à rien même si vu d'extérieur ça pourrait être ma meilleure option. J'ai déjà beaucoup fuis, la première fois, j'ai fuguer et ça a été la pire décision que j'ai prise, je le regrette tellement... Si je ne l'avais pas fais je n'en serai pas là aujourd'hui.

MAYAWhere stories live. Discover now