Chapitre 42

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« C'est dieu qui a créé le monde, mais c'est le Diable qui le fait vivre. »

Paul Tristant Bernard.

Le réveil est dur ce matin, j'ai à peine fermé l'œil cette nuit. Je ne suis pas du tout motivée pour faire quoi que ce soit, et en plus, je ne pense qu'à ce fichu bal de ce soir, ça me travaille encore l'esprit. Quelle perte de temps !

Si seulement je pouvais m'y rendre avec Louis...

Le problème, c'est que je ne suis pas censé être en couple pour mon entourage, alors je ne sais pas avec qui je vais m'y rendre. Le pire, c'est que j'ai accepté d'y aller rien que pour Lilith.

Je suis aussi très angoissée du fait que je vais devoir me libérer des projets que j'avais prévu pour mon week-end. Or si renonce au bal, Lilith m'en voudra à mort.

Je me prépare un bon chocolat chaud, et dépose mes céréales sur la table. Ce n'est vraiment pas mon genre de solliciter quelqu'un pour m'accompagner quelque part, encore moins à une soirée de cet acabit. Malheureusement, vu que je n'ai pas été mise au courant plus tôt et que je n'aurais jamais cru aller à un événement de la sorte, je n'ai plus vraiment le choix. À moins d'y aller seule...

Mais un éclair me traverse l'esprit. Je comprends alors ce qu'a pu ressentir Einstein dans son bain. J'ai une idée qui me semble parfaite pour égayer ma soirée.

Après avoir fini de manger, je prends mon courage à deux mains et compose le premier numéro qui me vient en tête. Faire un pacte avec le Diable, ce n'est guère mon genre, mais je le fais pour ma copine.

Canaân est gentil, mais je ne me sens pas trop d'y aller avec lui, il ne me met pas à l'aise et il est faux. Quant à Seth, avec ce qui s'est passé au lac, j'ai aussi eu ma dose et je pense que je ne suis pas encore au bout de mes surprises.

– Allô ? bégayé-je, faiblarde.

– Une revenante ? Je ne savais pas que je t'avais donné mon numéro, dit-il, d'un ton morne.

Il a vraiment l'air heureux de me parler. L'ironie mit à part je lui réponds :

– Pourtant, ça fait un moment.

– Tu n'es plus grincheuse ? Qu'est-ce que tu veux ?

Ouah ! Ça semble bien parti...

– Tu... Tu comptes aller au bal de ce soir ?

– Non, sans façon. La danse et moi, nous ne sommes pas très amis.

– Oh, bredouillé-je, déçue, très bien.

– Pourquoi ? me demande-t-il, quelques secondes plus tard. Tu veux quoi au juste ?

Son ton si amical me donnerait presque envie de lui sauter dans les bras...

– Eh bien, je cherche quelqu'un pour m'y accompagner. Je l'ai promis à Lilith, ce que je regrette d'ailleurs.

– Je vois, se moque-t-il, au bout du fil, Lilith n'est pas du genre à se démonter, quand elle veut quelque chose, elle l'obtient toujours. C'est une dure à cuir.

Eh ben ! Il la connaît bien pour des personnes qui affirment se détester.

– Tu as tout compris, affirmé-je, tendue.

– Et qu'est-ce que j'ai à voir avec tout ça, moi ?

À quoi joue-t-il ? Il semble énervé au bout du fil.

– Tu sais, Heavan, je n'ai pas trop le temps de bavasser là.

– Oh ! D'accord, je comprends. Désolée de t'avoir dérangé.

– Juste une chose : je peux savoir qui est le chanceux ?

– Le chanceux ? Personne. Je n'ai trouvé personne. C'est ça mon véritable problème.

– C'est un peu embêtant, en effet, ricane mon interlocuteur, peut-être que personne ne veut de toi.

Je ne sais pas quoi répondre à ce genre de remarque puérile, ça me déconcerte. Devrais-je réagir ?

– Heavan, je rigole. C'était pour rire. Détends-toi.

Pourtant, sa voix ne semblait pas du tout amusée, mais plus sérieuse qu'autre chose.

– Je voulais juste savoir si tu serais partant pour venir avec moi à cette satanée réunion scolaire ? Histoire de faire acte de présence. Tu vois le genre ?

– Aller a ce bal avec toi ? répète-t-il, en se raclant la gorge.

– Je ne t'y oblige pas.

Je ne sais pas s'il a raccroché, car plus aucun son ne me parvient.

– Allô ?

– Ça me va. Et puis tu t'y prends un peu tard, je veux bien sauver les meubles.

– Je n'étais pas au courant ! Lilith me l'a dit hier soir en sortant des cours.

– Ne t'en fais pas, je n'ai rien d'extraordinaire à faire de toute façon.

– C'est vrai ?

– Non, mais je vais te dire oui. Je vais mettre mes tueurs à gages en congé pour ce soir. Ils en profiteront comme ça eux aussi.

– Pardon ?

– Je viens ! Mais sois à l'heure, sinon je repars aussitôt.

– C'est vrai ? Tu me sauves la vie !

– Ne me remercie pas si vite. Je veux juste ne pas avoir ta mort en plus sur la conscience.

" En plus ? "

– Elle m'aurait peut-être arraché la tête lundi, qui sait ? prédis-je, ironiquement, soulagée d'un poids.

– C'est certain. Tu m'en devras une, j'ai laissé tomber le ciné, mais ça ne sera pas le cas pour cette fois. On se dit à quelle heure là-bas ?

– Au bal ?

– Bien sûr au bal ! Tu es sûr que tu suis la discussion ?

– Oui, oui ! Euh, c'est à vingt heures, alors disons un quart d'heure plus tôt.

– Très bien. Je te tiens au courant si j'ai du retard.

Ben voyons !

– D'accord. À ce soir alors.

– C'est ça, conclut-il, en raccrochant alors que j'entends des voix crier derrière lui.

J'ai finalement trouvé mon cavalier. Maintenant, il faut que je me trouve une tenue adéquate, mais pas trop non plus. On verra bien où ça me mènera, Seth se montrera peut-être un peu plus complaisant et surtout bavard. Il n'y a plus qu'à espérer.

***

L'après-midi est passée extrêmement vite, il est déjà presque dix-huit heures lorsque je commence tout juste à me préparer. J'ai opté pour une robe couleur saumon et des converses blanches. Je dois avouer que ça paraît un peu trop simplet pour un bal, mais les robes et moi à la base, ce n'est pas trop ça. J'ai déjà ma dose la semaine avec ma jupe d'uniforme, mais bon, c'est une soirée et je me dois de faire un minimum d'effort.

Par la suite, j'envoie un sms à Louis, dans le but de l'informer de cette sortie inopinée. Je sens que je vais m'amuser, car je pense que ce dernier ne se contentera pas d'attendre sagement de son côté.

Devil's Lake T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant