Chapitre 36

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Blake

Je suis dans l'avion depuis près de cinq heures. Je n'avais pas prévu de m'écrouler sur mon lit de chambre d'hôtel, pensant que la fatigue me rattraperait durant le vol.

C'est l'alarme que j'avais programmé qui m'a remis les pendules à l'heure . J'espérais avoir de nouvelles informations concernant Sibylle, mais ce n'en fut pas le cas. Malgré plusieurs appels et SMS, je n'ai rien eu. Maintenant que je suis dans cette saleté de boîte à sardine volante, je suis coupé du monde.

Autour de moi, le silence règne. J'ai choisi de prendre une place en classe affaire et je m'en félicite. Au moins, le calme règne, juste perturbé par le ronflement de certains passagers qui m'entourent.

Ne trouvant pas le sommeil puisque j'ai dormi à l'hôtel , je ne peux m'empêcher de me poser tout un tas de questions concernant Carotte. Je me refais le film de nos dernières rencontres et de cette soirée au restaurant juste avant mon départ. Quelque chose me chiffonne et me fait dire que je suis passé bel et bien à côté dun truc.

Est-ce que cela a un rapport avec le peu que Carotte m'a confié sur elle ? Si seulement, j'arrivais à assembler tous ces petits détails qui m'interpellent peut-être que je parviendrais à pointer ce truc qui m'échappe . Pour y arriver, je devrais prendre du recul mais je réalise que c'est impossible. Je suis trop impliqué sentimentalement pour mettre de côté cette inquiétude qui me ronge.

Rien que de penser que je pourrais ne plus la voir, déclenche une prise de conscience radicale. Mon cœur fait une embardée en même temps que la turbulence que nous venons de subir. Alors, que j'entends les murmures de mes voisins de fortune, je n'écoute que d'une oreille la voix du steward qui nous annonce que nous devons attacher nos ceintures et que nous entrons dans une zone de turbulences.

Dans la zone de secousses, j'y suis déjà. Mes mains tremblent alors que j'attache ladite ceinture. Je suis livide, pas parce que j'ai peur de me retrouver balloter en plein air, mais parce qu'un tsunami vient de renverser tout mon être. La première chose qui me vient à l'esprit pour rationaliser tout ça, c'est mon ancienne vie. Je tente de me dire, que je m'inquiétais tout autant avec mes soumises. Mais juste après la douleur que je ressens dans mes tripes me rappelle que je me mens à moi-même.

Je ne sais pas où, ni quand le désir que je ressens pour elle, s'est transformé en plus. Bien sûr, je suis conscient de ce que je lui ai dit avant mon départ. Je sais que je ressens beaucoup de choses pour elle. Je sais aussi que j'ai envie de voir jusqu'où ce truc qui rassemble va nous emmener. Jamais, je n'ai pensé que je pourrais ressentir plus, beaucoup plus.

Cette prise de conscience ne m'aide pas à retrouver mon calme. L'inquiétude me tord le bide, j'ignore ce qui va m'attendre une fois que l'avion se sera posé. L'attente est longue, interminable, rien ne parvient à me calmer, pas même le film que j'ai mis. Je me sens seul au monde en cet instant, comme l'acteur de ce film qui finit sur île par parler à un ballon quil a appelé Wilson*. En désespoir de cause et parce que je suis parfaitement conscient qu'il me reste de longues heures à poireauter, je me décide à commander à l'hôtesse un verre de whisky que j'avale d'une traite, avant d'en demander un second, que je ne terminerais probablement pas.

Il est vingt et une heures quand j'atterris enfin à Philadelphie. Ma correspondance entre New York et Phili a été plus longue que prévu. Je suis épuisé, le jetlag va avoir ma peau, d'autant que je n'ai pas pu fermer l'œil  ne serait-ce qu'une petite heure. Encore sur le fuseau horaire de Tokyo, je me crois mercredi, alors qu'ici nous sommes mardi. C'est un peu comme si j'avais remonté le temps.

Je n'ai pas prévenu Brent de mon heure d'arrivée, à quoi bon risquer de provoquer un esclandre parmi la foule. Trainant ma valise, je me dirige dehors pour appeler un taxi. Mon premier réflexe en allumant mon portable est de lui envoyer un message pour dire que je vais passer chez lui. Seulement je me ravise en voyant que ce dernier a pris les devants en me communicant, une adresse que je ne connais pas.

Through their shadowsWhere stories live. Discover now