Carotte ne me réponds pas et me tourne le dos pour aller fouiller dans sa table de nuit. Si jamais, elle me sort une nouvelle seringue, je ne jure plus de rien. Je ne sais même pas ce qui me retiens encore ici. Je devrais déjà être loin, à chercher comment me défouler, avant de la quitter proprement, non sans lui avoir proposer mon aide. Un bruit sourd, me fait lever les yeux vers elle. Sybille a jeté sur son lit, une sacoche qui ressemble à ce que j'ai vu dans sa salle de bains. Une feuille vient rejoindre la cette dernière . Carotte l'ouvre en grand et en vide le contenu, avant de passer à côté de moi en me bousculant.

–Vu que tu ne me crois pas, je te laisse le plaisir de te rendre compte de ta connerie.

Je voudrais la retenir, lui dire que je m'en fous, mais ce n'est pas vrai. Face à sa réaction, je suis pris dun doute affreux. Et si je me trompais sur toute la ligne ? Il ne me reste que deux options, soit je regarde ce quil y a dedans, soit je prends le tout et lui demande de mexpliquer. Dans les deux cas, je sais que je lui ai fait du mal et que je ne suis pas certain quelle me pardonne. La seconde option, me paraît être la meilleure. Dans toutes les relations de soumission que jai pu avoir, jamais au grand jamais, je n'ai laissé s'installer une situation où la confiance ne tenait pas une grande place. Au fond de moi, je sens que je peux et que je dois lui faire confiance.

Me saisissant du papier et de la pochette, je sors de la chambre et vais à la rencontre de ma flamboyante rouquine. Cette dernière est assise sur canapé ses membres repliés sous elle. Elle ne regarde pas dans une direction en particulier, Carotte a l'air de s'être retranchée dans un monde bien à elle.

Ne prenant pas de précautions, je m'assois face à elle sur ce qui fait office de table basse, et dépose sur ses genoux, les objets quelle a balancé sur son lit.

–Tu veux bien m'expliquer , s'il te plait ?

Je lui pose cette question à deux reprises. Sybille est plongée quelque part où visiblement, je ne l atteins pas. Je l'ai blessé, je le sais et je men veux.

–Carotte, s'il te plait, expliques moi, j'ai besoin de comprendre. Je n'ai pas regardé dedans, je veux que ce soit toi, qui m'en parles.

–Qu'est-ce que ça te faire ? Tu t'es déjà fait une idée tout seul. Fini-t-elle par me dire sans me regarder.

Son attaque justifiée me fait mal. C'est un sentiment que je n'ai pas ressenti depuis longtemps, pas même lorsque j'étais avec ma dernière soumise. Je me sens honteux de ma réaction disproportionnée. Ce que Carotte me fait ressentir ces dernières semaines, me ramène à la vie, rallume en moi cette envie de redevenir un homme bien dans sa tête.

–Je sais que ça n'excusera pas mon comportement, que ma réaction était un peu trop vive. Ça m'a rappelé une situation que j'ai vécu et qui s'est mal terminée.

Peut-être que mon excuse a porté ses fruits, car sybille me regarde droit dans les yeux, avant de porter ses mains sur la petite trousse. Toujours en me regardant droit les yeux, elle ouvre cette dernière posée près de moi . Dedans s'y trouve un petit appareil, un genre de lecteur, une petite boite, une sorte de seringue qui pourrait passer pour un crayon, une fiole et une vraie seringue. Je ne comprends pas à quoi peut bien servir tout cet attirail, si elle se drogue. Les informations ont encore du mal à se frayer un chemin jusqu'à mon cerveau. Ma conscience me hurle que je ne suis qu'un connard, alors que mon cerveau continue à me dire quelle se pique.

D'ailleurs , c'est visiblement ce que Sybille s'apprête à faire. Ses mains tremblantes sortent le lecteur de la trousse, ouvrent la petite boite de laquelle elle sort une sorte de languette qu'elle peine à fixer sur l'appareil . Je finis par comprendre de quoi il sagit lorsque je la vois prélever une goutte de sang au bout de son doigt et la déposer sur le lecteur.

Je crois bien que je viens de décrocher la palme d'or du connard de l'année . Carotte aurait pu me hurler dessus, que je ne me serais pas senti aussi mal qu'à l'instant présent. Les mots passent souvent, mais ne nous heurtent pas toujours comme ils devraient. Le silence de ma compagne et ses gestes ont bien plus dimpact que tous les mots quelle aurait pu prononcer. Et pendant, que je la vois galérer tellement elle tremble, je me sens de plus en plus mal et ne trouve pas les mots pour me faire pardonner.

–Tu es ?

–Diabétique, parvient-t-elle à articuler tremblant de plus en plus.

–Laisse-moi t'aider , lui dis-je en posant une main sur les siennes qui sont glacées.

–No...Non !

Je sens la moutarde me monter au nez face à son refus. Elle est pas bien, je le vois et me dis que cest de ma faute. Je n'y connais rien au diabète, mais je sais une chose sur cette maladie, c'est que si elle ne prend pas son traitement, elle risque un malaise.

La culpabilité me ronge plus encore, quand je réalise que ce quelle faisait dans sa salle de bain ce matin, n'était rien dautre que ce quelle ne parvient plus à faire là maintenant tellement elle tremble.

–Ecoutes ! Je suis désolé Carotte, désolé d'avoir tirer des conclusions hâtives tout à l'heure . Tu es fâchée, soit ! Mais maintenant, ça suffit ! Laisse-moi taider. Dis-moi ce que je dois faire !

La voyant hésiter, je lui arrache des mains son lecteur. Ce dernier indique un taux à 0.59. Pour avoir fait un bilan sanguin dernièrement, je sais que le taux normal est plus proche de un. J'en déduis donc que la rouquine est en hypo et que cela peut être dangereux.

–Ça indique 0.59, c'est bas non ? Je lui demande afin de vérifier mes suppositions.

Sybille hoche la tête et me désigne l'espèce de seringue dans la pochette. Je m'en saisis et la regarde dans les yeux. J'ignore comment cela fonctionne et me sens complètement perdu face à sa détresse et ma capacité proche de zéro à laider.

–Tourne la bague deux fois, ça, ça doit faire un « clic » quand c'est bon, me dit-elle difficilement. Enlève le bouchon et donne-la moi.

Je lui obéis et m'empresse de lui donner le stylo. Carotte repousse le plaid qui la recouvre et soulève son t-shirt dévoilant son ventre. Lorsqu'elle approche le crayon-seringue d'elle sa main tremble tant que j'ai peur qu'elle n'y parvienne pas. Me relevant de la table, je bloque sa main et m'installe près d'elle . Ma main sur la sienne, je l'aide à maîtriser son mouvement pour qu'elle puisse faire son injection correctement.

–Merci, fini-elle par me dire.

Je me sens tellement con, que je ne dis rien et me contente la recouvrir du plaid et de la serrer contre moi. Je sens que jaurais beau lui dire à quel point je suis désolé, que rien ne changera. Nous restons là, un moment. Progressivement, les tremblements cessent et je la sens se réchauffer contre mon corps. C'est quand, je la sens s'écarter de moi, que je comprends que tout est fini. D'ailleurs la sentence ne tarde pas à tomber et moi comme un imbécile, je cherche encore à m'attarder .

–Tu es sûre que ça va aller ? Je peux rester encore un peu, si tu as besoin.

–Non ça ira.

–Bien, comme tu veux.

–Aurevoir Blake.

–Aurevoir Sybille.

Quand je referme la porte derrière moi, un poids me tombe sur les épaules. Je me sens mal et le sentiment que je viens de passer à côté de quelque chose bien se fait bien présent.

Through their shadowsUnde poveștirile trăiesc. Descoperă acum