Mon Amérique à moi,

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Tandis, que je profitais de cette fin d'après-midi pour m'assoupir honteusement dans le sofa de Milo, je repensais à notre rencontre il y a de cela dix ans. J'eus l'effet de la madeleine de Proust en entendant en fond sonore une chanson de Jacques Brel. Tout en fermant les yeux, je fis défiler nos premiers instants d'amitié, d'abord lointain, ils me revinrent comme une douce souvenance, emprunt de rires et de délicatesse.

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" Début septembre 2005, l'été jouait les prolongations, mais sonnait sans le savoir mon premier jour de lycée dans un nouvel établissement scolaire. J'avais toujours détesté l'école, j'étais servie à foison par la nouveauté qui me rebutait encore plus. J'allais devoir me familiariser avec un monde qui n'était pas le mien, mes parents ayant décidé que poursuivre ma scolarité dans un endroit qui ressemblait plus à un hospice pour vieux qu'à un campus rempli d'adolescents rayonnants, allait faire de mon avenir un lendemain qui chante.

Et parce que mes précédentes années scolaires n'avaient jamais été teintées par ma popularité décroissante, j'avais décidé bêtement de monter sur mes grands chevaux quitte à paraître arrogante et froide histoire de ne pas me faire marcher sur les guiboles une fois de trop. C'était sans compter sur le fait que ces deux adjectifs péjoratifs ne faisaient pas vraiment partie de ma personnalité encore inexploitée que je fus contrainte de me radoucir à la vitesse de la lumière. Soyons honnêtes, ce qui m'importait le plus, c'était surtout de me faire des amis que je n'avais pas encore.

La première personne que j'ai aperçue ce jour-là en entrant de ma salle de cours, c'était Milo. Il portait des baskets jaunes comme celles de Kill Bill et ses yeux furent impossible à distinguer tellement ses longs cheveux désordonnés à souhait lui couvraient la moitié du faciès. Je me souviens encore de sa dégaine sur sa chaise, les jambes repliées en position du lotus, les bras posés sur la table de bureau. Il ne manqua pas un regard pour toutes les personnes qui franchissaient le pas de la porte, un sourire désarmant sur le visage. Et tandis que je cherchais une place pour m'asseoir, je fus bousculé par une grande blonde aux cheveux bouclés qui n'était autre qu'Axelle, mais ça je le sus plus tard. Nos regards se confrontèrent à ce moment précis et je me pris à penser que cette grande girafe pouvait se damner pour que nous engagions des copineries. Comme quoi, ne jamais dire, jamais.

Pendant ce court instant où mes yeux dérivèrent de ceux de Milo, celui-ci n'avait pas loupé une seule pauvre miette du spectacle. Ce qui nous vaut aujourd'hui encore bon nombre de plaisanterie. Axelle à qui mon œillade dédaigneuse n'avait pas échappé, me toisa de son bon mètre soixante quinze et s'installa à côté de ledit Milo. Préférant m'écraser pour l'occasion, je pris place quelques tables plus loin à côté d'une petit brune au visage avenant et rieur qui s'appelait Zoé.

En repensant à tout cela, j'entends encore la voix mielleuse d'Axelle et le brouhaha qui régnait dans la pièce juste avant que le professeur principal ne vienne prendre ses quartiers.

Par un incroyable jeu d'aimant, je me pris à observer Milo avec plus de détails qu'à mon arrivée. Je le trouvais follement attirant, surtout quand il se mordait la lèvre supérieure à chaque supplique d'Axelle. Je crois d'ailleurs que je n'étais pas la seule dans la pièce à taper une fixette sur ce beau brun charmant, à en juger le nombre de gamines que nous étions, qui se retournaient sans cesse pour capter le moindre fait et geste de la nouvelle coqueluche de la classe.

Le professeur principal, qui n'était autre qu'un professeur érudit de français, fit l'appel comme il est bon ton de faire à chaque début de cours, vint le tour de l'élu : Alexander Milosavljevic. 

Même sa dénomination avec quelque chose de mystérieux, ce qui expliquait à mon sens son allure de Tsar qui sied à merveille avec la résonance de son prénom. Mais il n'en fut rien, mais ça aussi je le sus plus tard.

20 ans et quelques | Terminée |Where stories live. Discover now