(Gratuit le 3 Janvier) APTITUDE : Le Chaos Et La Couronne.

CHAPITRE 30 : Pas De Répit.

Le son de mes pas claquant sur le sol en marbre était l'unique son qui venait briser la troublante quiétude régnant dans les couloirs. Mon regard demeurait fixé sur la nuque de Thobias, qui marchait d'un pas rapide quelques mètres devant moi. Le souverain et moi n'avions échangé aucun mot depuis que nous avions rejoint l'intérieur du Bâtiment Principal. Je n'oubliais pas la manière dont s'étaient déroulées les choses la dernière fois que je m'étais retrouvée seule en compagnie du roi. Je me souvenais parfaitement de ses menaces, de ses doigts enserrant ma gorge et de la manière dont il avait torturé Kian avant l'intervention d'Élise DeCalonne. Aussi, ma méfiance ne me quittait pas. Je ne pouvais m'empêcher de me demander ce que Thobias me voulait encore. Son étonnant acte envers le prince avait beau avoir l'air sincère, je ne pouvais pas être sûre que le roi n'avait pas une énième idée tordue à l'esprit.

Prenant mon courage à deux mains, je lançai d'une voix forte :

— Où allons-nous ?

Ma voix résonna de manière désagréable sur les murs du Bâtiment désert. Et je tressaillis en entendant la réponse de Thobias, qui ne prit même pas la peine de se retourner :

— Dans mon cabinet personnel, évidemment, dit-il tranquillement. C'est l'endroit où se déroulent toutes mes conversations.

Gravissant une nouvelle volée de marches, nous débouchâmes effectivement à l'étage où se trouvait le bureau du roi. Ce dernier se dirigea calmement vers la porte en bois, la déverrouillant posément.

— Je refuse d'entrer, dis-je en croisant fermement les bras.

Thobias ouvrit la porte à la volée avant de vriller son regard bleu sur moi. Sous sa barbe rousse, je vis ses lèvres se retrousser en un rictus amer.

— Voyez-vous cela, railla-t-il. Vos pouvoirs semblent vous être montés à la tête, mademoiselle Taylor.

— Peut-être bien, rétorquai-je avec une dangereuse insolence. Mais au moins, je pourrais aisément m'en servir contre vous si je me sens menacée. En revanche, l'Aptitude n'a aucun effet sur moi.

— Soyez prudente, gronda aussitôt le roi en levant son index en l'air. Je suis votre souverain, vous me devez respect et obéissance ! Votre impertinence pourrait facilement vous coûter votre tête, Kylie.

Je ne relevai pas, surtout en remarquant l'arme en or massif que mon interlocuteur portait à la ceinture, sous son luxueux manteau en velours rouge. Je m'humectai nerveusement les lèvres avant de pénétrer dans la pièce. Je frémis en entendant la porte claquer derrière moi.

Je balayai rapidement le cabinet du regard. L'endroit n'avait pas changé d'un pouce. Le même bureau en acajou trônait au centre de la pièce, et les rideaux de brocart avaient été légèrement tirés, révélant ainsi le ciel d'un noir d'encre dénué d'étoiles.

Me dépassant, Thobias alla s'installer à son bureau avant de désigner un fauteuil sombre posé dans un coin de la pièce.

— Asseyez-vous, ordonna-t-il d'un ton sec.

Serrant les dents, je m'exécutai à contrecœur, les muscles crispés. Ma réaction n'échappa pas au monarque, qui haussa un sourcil cuivré en m'observant froidement.

— Vous êtes ridicule, lâcha-t-il. Je ne compte pas vous mordre.

— Non, répliquai-je en m'enfonçant à l'intérieur du fauteuil. Simplement me torturer et menacer ceux que j'aime.

Je m'attendais à ce que le roi entre dans une colère noire. En réalité, c'était ce que j'espérais, cela m'aurait au moins permis de deviner ce qu'il me voulait. Mais mon interlocuteur n'en fit rien, se bornant à pousser un profond soupir.