(Gratuit le 3 Janvier) APTITUDE : Le Chaos Et La Couronne.

L'Atout Secret Du Prince Déchu (Partie II)

La nuit venue, je ne cessais de fixer avec appréhension les aiguilles de mon horloge murale. Une inquiétude particulière me nouait les entrailles...

— Respire, Kylie, me lança Devonne depuis le canapé près de la fenêtre. Tu irradies d'émotions négatives, et ça m'empêche de me concentrer.

Je poussai un profond soupir et observai la princesse verser quelques gouttes d'un liquide ambré à l'intérieur du flacon de romarin. Je fronçai les sourcils.

— Est-ce que tu peux m'expliquer ce que tu fais ? interrogeai-je.

Sans me répondre, je la vis saisir le petit sac en cuir dont elle s'était munie, avant d'en extirper plusieurs fléchettes. J'écarquillai les yeux lorsque Devonne attrapa calmement l'un des étranges objets, en imbibant la pointe à l'aide de l'intriguant mélange qu'elle venait de créer.

— C'est juste une petite astuce que Calvin m'a montrée, dit-elle simplement en remettant la fléchette à sa place. Tu verras plus tard...

Poussant un profond soupir, je fis tourner entre mes doigts le masque blanc que la princesse m'avait fait parvenir. Je le plaçai sur ma peau et l'attachai à l'arrière de ma tête, avant de me planter face à mon miroir. L'objet me recouvrait l'intégralité du visage, rendant impossible de distinguer mes traits. Seules mes prunelles marrons luisaient d'angoisse à travers les ouvertures qui laissaient paraitre les yeux.

Derrière moi, Devonne se leva en rangeant soigneusement les fléchettes à l'intérieur de son sac noir. Puis, la jeune fille revêtit à son tour un masque identique au mien, relevant au passage ses cheveux châtains.

— C'est l'heure, m'annonça-t-elle. Dans une demi-heure exactement, le Chef des Gardes aura fini sa ronde nocturne. À ce moment-là, il regagnera ses appartements tandis que les Gardes de nuit rejoindront leur poste.

Je hochai la tête, me repassant mentalement la totalité de notre plan.

— Première étape, ajoutai-je, emprunter le passage qui nous conduira directement à l'arrière de la Tour.

Devonne acquiesça. Je me mordis la lèvre inférieure. En réalité, il s'agissait de la partie que je redoutais le plus. Car l'emplacement du passage en question n'avait rien de banal.

— C'est parti, marmonnai-je en éteignant la lumière de la pièce.

J'ouvris alors la porte de ma chambre en m'efforçant de faire le moindre de bruit possible. Jetant un œil dans le couloir désert, j'adressai un signe à la princesse.

― La voie est libre, murmura-t-elle. Parfait...

C'est à toute vitesse que nous traversâmes le couloir plongé dans la pénombre. Puis, je vis Devonne se débarrasser de ses chaussures avant de s'engager dans l'escalier de marbre menant à l'étage suivant. Comprenant son désir de faire le moins de bruit possible, je l'imitai. Malheureusement, mes pupilles peinaient à s'habituer à l'obscurité, et je trébuchai un nombre incalculable de fois. Aussi, la princesse ne cessait de se retourner pour me fusiller de ses prunelles vertes.

— Je fais de mon mieux, protestai-je à voix basse en empoignant la rampe froide de l'escalier, m'efforçant de ne pas me prendre les pieds dans le tapis en velours rouge.

Devonne se contenta de secouer la tête, son masque évoquant une tâche immaculée dans la pénombre.

Nous reprîmes notre progression, tous les sens aux aguets. Nous ne tardâmes pas à déboucher au quatrième étage, tout aussi endormi que le précédent. Cependant, je sentis la princesse me retenir par le poignet lorsque je m'apprêtai à gravir la nouvelle volée de marches. Je lui lançai un regard interrogateur auquel elle répondit en me désignant une sculpture en plâtre posée à l'entrée du petit hall rond, assez imposante pour nous dissimuler toutes les deux. Face à l'air insistant de Devonne, je me glissai derrière la statue.