Annonce funeste

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         Suron explorait sa maison dans les moindres recoins, cherchant ce qu'il avait envie d'emporter avec lui. Des livres ? Inutile, il trouverait son bonheur à la bibliothèque du château. Des vêtements chauds ? Oui, c'était une bonne idée.

        Le maître d'arme saisit une sacoche et y rangea d'épais tissus, une cape d'hiver et un grand manteau de fourrure. Vouloir à tout prix récupérer des affaires chez lui n'avait été qu'un prétexte pour ne pas laisser son élève seule, il pensa d'ailleurs qu'il était temps de la rejoindre, cela faisait plus d'une heure qu'il l'avait quittée.

        S'apprêtant à quitter sa maison, il passa devant son meuble en bois où il posait tout un tas de bibelot. Son regard s'accrocha un objet particulier que sa famille traînait depuis des générations. C'était un petit rond de verre de diamètre cinq centimètres et épais d'un centimètre, sur lequel était tenue en équilibre une flèche d'argent grâce à une sorte de clou. Son grand-père, qui connaissait le monde magique, lui avait un jour expliqué que, si un puissant flux de magie noire était libéré dans le monde, la flèche deviendrait folle avant de pointer la direction de l'endroit où se trouvait cette magie noire.

        De toute son enfance, ainsi que sa vie d'adulte, Suron n'avait jamais vu cet objet fonctionner, et il n'y avait jamais prêté attention. Pourtant, il eut soudain une impression étrange et entreprit de ranger le petit rond de verre dans sa sacoche.


        Lorsqu'il arriva devant la maison des Ar-Feiniel, il trouva Aïkida assise devant la porte dégondée, le regard perdu dans le vide. Suron descendit du cheval avant de s'approcher de son élève en tenant l'étalon par la bride.

— Comment ça va ? demanda-t-il.

— Mal.

Le maître d'arme afficha un petit sourire triste avant de s'assoir à son tour dans l'herbe.

— J'ai reçu des menaces de Tarek, un parchemin posé sur mon oreiller.

Suron fronça les sourcils avant de tendre la main :

— Je peux voir ?

La Fille Gelée serra la mâchoire alors qu'elle sentait la haine renaître en elle. Fouillant dans la poche droite de sa cape, elle en sortit le papier et le tendit à son professeur de combat.

Ce dernier le parcourut rapidement des yeux avant de demander :

— C'est étrange, comment a-t-il su que tu viendrais ici ?

— Et comment a-t-il pu arriver avant nous ? Un cheval n'égale pas Athkor. Rien n'égale Athkor.

— Merci petite humaine, rit ce dernier.

Le vieil homme se gratta sa barbe blanche, le front plissé par ses réflexions intérieures.

— Quelque chose cloche. Il faudra lui en parler.

Aïkida échappa un rire nerveux avant de répliquer :

— Je vais m'en occuper personnellement.

— Kida, on ne peut pas être sûrs que ce soit lui, c'est étrange, ce n'est pas le genre à menacer avec un bout de papier.

La Fille Gelée explosa :

— Alors quoi ?! J'attends tranquillement au château qu'il me ramène ma sœur éventrée ?! J'ai tué Brusanth ! Il ne vit plus depuis, il erre ! Son regard est vide, je le vois, il se saoul jusqu'à ne plus se souvenir de la mort de son dragon ! Et à chaque fois que je croise son regard, je vois une haine profonde et destructrice ! Il a perdu la tête et n'aspire à qu'une chose : se venger ! Il veut me faire ressentir le vide qu'il vit tous les jours, il veut me voir perdre un être cher, de sa propre main ! Il veut me torturer jusqu'à ce qu'il n'en ait plus la force ! Il ne souhaite que me rendre la monnaie de la pièce ! Alors oui, je ne sais absolument pas comment il s'y est pris, mais il a réussi à nous devancer, et voilà qu'il me menace ! Je n'ai aucun doute, c'est lui qui a posé le parchemin ici. Il connaissait ma maison, il est déjà venu avec Leeroy ! Je ne laisserai pas cet enfoiré détruire ma vie et réduire ma famille en cendres !

La Fille Gelée et la Face CachéeWhere stories live. Discover now