Chapitre 20 (Thétis)

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J'avais l'impression de me retrouver dans le salon privé d'une maison de joie à l'heure où les portes viennent tout juste de s'ouvrir. N'ayant reçu aucun ordre particulier, je me tins en retrait. À ceux s'approchant et m'invitant à les accompagner, je leur signalai que je ne pouvais les contenter. Usant du nom de Callidromos et m'annonçant comme étant à sa seule disposition afin de les éloigner. Et jusqu'ici, cette raison fut bien suffisante. Pourtant je ne savais ce qu'il était advenu de lui, mais si l'on me laissait en paix, c'était qu'il avait pu les impressionner jusqu'au bout.

J'avais été mise à l'écart durant toute la durée de ces combats, ne pouvant y assister, fébrile et inquiète, que depuis une fenêtre close. Jusque là, je n'avais encore jamais eu l'occasion de le voir réellement se battre et je devais avouer qu'il était terrifiant. Plus les jours passaient et plus il me semblait devenir plus agressif, plus meurtrier. Perdant toute notion de pitié. Je reconnaissais de moins en moins ce jeune homme que j'avais surpris devant l'âtre, à pleurer en silence il y a quelque temps et qui avait eu tant de patience et de sollicitude envers moi. Non, durant ces combats, il n'était bel et bien plus le même. Devait-il en arriver à cela pour survivre ?

Je le cherchai du regard dans la salle. Des poitrines se dénudaient, je reconnus parmi ces impudiques, l'une des servantes des lieux. Une autre se cambra sur les cuisses d'un homme bien plus âgé qu'elle. Devais-je assister à ce genre de spectacle encore une fois ? De nouveau, un homme se proposa et je me dérobai, mais celui-ci sembla se moquer du nom que je lui servis. Il me parlait d'un pari perdu, d'une compensation bien méritée et vint à vouloir me toucher. Je me reculai un peu plus, mais il me coinça entre lui et le mur. Insistant.

Subitement, il grimaça de douleur et s'écarta avant d'être jeté à terre. J'en restai figée sur l'instant puis me surpris à sourire lorsque je le vis, enfin. Gwydion. Une fois de plus, il était venu à mon aide et... mais... Il n'avait pas ce regard d'habitude. Quelque chose avait changé dans sa façon de se tenir également, ses yeux ne mentaient pas, ils ne le faisaient jamais, il me détestait en cet instant et m'effraya tout à coup.

– Tu viens avec moi !

Il me tira afin que je le suive et même en y résistant de toutes mes forces, je ne parvins pas à l'empêcher de me conduire vers l'une des alcôves longeant un petit couloir donnant sur la salle. Il n'y avait pas de porte, mais un rideau de perles pour toute séparation et la disposition de cet endroit étriqué annonçait clairement ce à quoi il était destiné. Une paillasse épaisse, des coussins, quelques peaux. Et uniquement une table basse pour y accueillir nourriture et boisson.

– Gwydion je...

Mais il ne me laissa pas le temps de lui parler, me jetant sauvagement sur la couche. J'y rebondis sans pouvoir comprendre ce qui l'animait. Décidément je ne le reconnaissais plus. Moins encore lorsqu'il se vautra à demi sur moi, se retenant in extremis à la force de ses bras. Il empestait le vin et la sueur et n'avait rien de cet homme qui m'avait sauvée du fouet quelques jours auparavant. Il était plus... bestial... comme tous les autres finalement. Ne se préoccupant pas que je le repoussai et le suppliai d'arrêter.

Pire encore, il releva ma robe jusqu'à la taille, se cala entre mes cuisses et se pressa contre mon ventre. Je paniquai. Plus encore que ce qu'il comptait me faire, c'était ce qu'il allait détruire qui me broyait le cœur. La confiance que j'avais mise en lui, aveugle et inconditionnelle. Mon attachement. Sa simple présence me faisant espérer, imaginer que ma vie n'était pas aussi terrible, pas tant qu'il serait la à me défendre. Il allait briser tout cela en quelques instants.

M'empêchant de me débattre, il en vint à me saisir par les poignets, se redressant pour le coup. Je croisai alors ses yeux. Ils avaient beau être toujours aussi bleus, aussi clairs, ils me semblaient plus sombres qu'avant. Et j'y lus de la rancœur, voulait-il me faire du mal ? Réellement ?

– Non pas ça... Gwydion... Pas comme ça...

Je ne pouvais m'empêcher de pleurer sur ce que j'allais y perdre, partant dans un sanglot que je n'arrivais plus à contrôler. Pas juste ma vertu, mais bien pire. J'allais le perdre lui. Ce qu'il était pour moi. Mais il sembla se calmer, fronça les sourcils et ne bougea plus bien qu'il me maintenait toujours fermement. Sa ceinture pressée contre moi me faisait mal, plus que mes bras tenus au-dessus de ma tête. Je lui appartenais pourtant alors pourquoi fallait-il qu'il soit si violent ? Il n'avait qu'à m'en donner l'ordre, juste m'en donner l'ordre.

– Gwydion... je vous appartiens, vous pouvez faire ce que vous voulez de moi. Me prendre si vous le désirez, mais je vous en prie... pas comme cela, pas si brutalement. Je vous en prie.

Il se figea, sembla m'observer comme s'il revenait à lui, intrigué. De nouveau son visage changea, se mut en une étrange grimace qu'aussitôt il me cacha, enfouissant son visage entre mes seins. Ses mains desserrèrent son emprise et je le sentis qui sanglotait à son tour. Mais plus violemment que je le l'aurais jamais imaginé pourvoir faire. Je ne savais plus que penser si ce n'est que cette peine subite me touchait au plus profond de mon cœur. Il était si déroutant. Tour à tour un homme prêt à tuer pour survivre, se transformant subitement tel un enfant, en larmes.

À présent ce n'était plus à cause de lui que mes larmes coulaient encore, mais pour lui, je l'enlaçai doucement, passant une main dans ses cheveux, tentant de le consoler d'un chagrin que je ne comprenais pas. Était-ce la pression des combats ? Était-ce autre chose qui fit que ses nerfs lâchèrent ?

Au bout de longues minutes, il s'apaisa enfin et je tentai de me glisser de dessous lui. Il se redressa à genou, essuyant rapidement ses joues encore trempées et reniflant, cherchant sans doute comment regagner sa dignité. J'imaginai que si son instinct l'avait poussé à vouloir me prendre de force c'était que, même si la raison m'échappait, il devait en avoir besoin. Pour se calmer, pour enfin évacuer la pression, pour se sentir serein. Je ne savais pas, mais ce qu'il souhaitait, j'allais le lui offrir. Je me dénudai complètement le laissant m'observer et vins à lui ôter ses vêtements ensuite. Maladroite, intimidée, mais décidée.

Je ne me serais jamais crue capable de cela et pourtant, ce soir c'était que je souhaitais moi aussi. Pas par désir ni même par devoir, mais parce je ressentais son besoin. Je m'allongeai, l'incitant à le faire avec moi et contre moi. Il se laissa faire, silencieusement, hésita puis me toucha, m'explora de ses mains. Ma poitrine en premier lieu et sur laquelle il s'attarda, palpant puis y goûtant, jouant avec elle. Mon corps frissonna, mais contrairement à tout ce que j'avais pu imaginer, je ne ressentis pas de dégoût. Juste son contact qui se fit de plus en plus agréable, je fermai les yeux.

Il me poussa sur le dos, s'allongea sur moi, pressant sa verge au creux de mes cuisses et touchant un point si sensible que je ne pus m'empêcher de réagir par un léger gémissement. Surprise par la sensation que cela me procura. Il s'y attarda encore, se faisant plus doux que tout à l'heure. Il n'ira pas plus loin que cette caresse, de nos intimités qui se touchaient, faisant monter un plaisir inespéré en moi. Je l'entendis alors qu'il s'essoufflait, accéléra ses mouvements et je l'accompagnai dans ses plaintes sans pouvoir me contenir. Ce, jusqu'à ce que mon ventre se couvre d'un liquide chaud et qu'il ne retombe sur moi, épuisé. Tant par ces nuits interminables que par la jouissance qui l'aura terrassé.

La muse de CallidromosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant