Chapitre 17 (Gwydion)

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Je passai une nuit agitée durant laquelle je me réveillai et allai à la fenêtre plusieurs fois, tâchant tout de même de ne déranger personne. Les combats durèrent une partie de la nuit, impossible de fermer l'œil tout ce temps tant cela hurlait et s'excitait dehors.

Quel intérêt y avait-il de voir deux hommes s'entre-tuer ? Je cherchais encore la réponse. Même si j'en étais réduit à cela, il n'y avait pas de comparaison, c'était cela ou une vie de servitude. Même résultant d'un choix, ce n'était ni par plaisir ni par sadisme, juste une question de survie.

J'espérais que nous ne nous attardions pas ici, cela aurait eu pour preuve que nous n'avions rien à voir avec ces joutes sanglantes. Mais rien, le lendemain, ne présagea qu'on lève le camp. Peu avant midi, on vint chercher Thétis et malgré mes protestations, je dus la laisser suivre deux servantes d'un œil inquiet. Ordre de Caius.

Je tournais comme un lion en cage, allant parfois m'allonger pour passer le temps tandis qu'Amasis s'amusait à séduire l'une des esclaves du petit domaine. Au moins, Thétis n'était pas sa seule préoccupation de ce côté-là et je devais avouer que malgré ses tentatives, il l'avait toujours respecté. Je commençais à éprouver peu à peu de la confiance en lui. Il avait le don de m'agacer, me provoquant régulièrement dans ces stupides et inutiles duels, mais au fond, c'était un brave gars.

Je fus rassuré même si j'évitais de trop en montrer, de la voir revenir avec de quoi manger. Ce devait être jour de fête, nous avions droit à de la volaille en sauce aux raisins encore chaude. Elle m'assura d'ailleurs fièrement qu'elle avait participé à la cuisine. Au moins, nous n'allions ni mourir de faim ni empoisonnés.

– Gwydion ?

– Mmm ?

– Je crois que Caius souhaite que vous vous battiez cette nuit, cela ne parlait que de cela aux cuisines, me fit-elle timidement.

– Il peut le souhaiter autant qu'il veut, hors de question, fis-je tout en ne perdant rien de mon appétit.

– Mais... et si...

– Ne craint rien Thétis, je sais comment faire. Ce qu'ils veulent, c'est du sang, mais également d'être tenus en haleine avant la mise à mort. Or, ce n'est pas ce qu'il souhaite. Je n'aurai qu'a me laisser tomber dès le début du combat. Pas de spectacle, pas d'or et donc il y renoncera.

Mais si cette possibilité me semblait logique, ni elle ni Amasis ne semblaient convaincus et je commençai moi-même à en douter. J'allais une fois de plus sentir ma douleur, c'était certain, mais il pouvait me fouetter ou me faire battre, je ne plierai pas. Il n'était d'ailleurs pas dans son intérêt que je sois trop amoché. À quoi lui servirait un Callidromos boiteux face à l'Empereur le jour venu ? Mis à part connaître la plus grande honte de son existence.

Le soir s'annonçait et de nouveau l'on vint chercher la jeune femme. Sans doute pour aider aux cuisines, me dis-je. Puisqu'il y avait six bouches de plus à nourrir depuis notre arrivée, elle en prime, c'était un peu normal qu'elle y aide.

De son côté Amasis ne s'était pas ennuyé de la soirée. La petite esclave l'avait finalement suivi dans notre case et j'étais resté deux bonnes heures à patienter dehors, tentant de ne rien entendre de ce qui s'y passait. Entre le lit qui craquait sous les puissants coups de reins de l'égyptien et les petits cris satisfaits de la fille, il y avait de quoi être à fleur de peau. Au moins celle-ci était là de son plein gré et semblait même y prendre du plaisir. J'étais d'ailleurs étonné que personne ne s'inquiète de son absence des cuisines durant tout ce temps.

Lorsque finalement, elle sortit, je me montrais curieux.

– Votre maître ne sera pas fâché d'une si longue absence ?

– Non. Pourquoi ?

– Tu ne travailles pas aux cuisines habituellement ? Si oui, pourrais-tu demander à la jeune fille qui nous accompagne de rapidement rentrer ? Il va bientôt faire nuit et il est temps de nous coucher.

Elle se tourna vers moi, surprise.

– Aux cuisines ? Le soir ? Il n'y a pas de service le soir, les repas chauds sont préparés uniquement le midi.

Ce ne fut pas juste le doute, mais également la peur qui me prit subitement au ventre. Mais alors... où avait-on emmené Thétis ?

La muse de CallidromosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant