Chapitre 18 (Thétis)

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J'avais suivi les deux servantes jusqu'au bâtiment où se situaient les cuisines. Confiante. Croisant mon maître Caius en cours de route, je le saluai, intimidée. Je ne savais pas vraiment cerner cet homme. Mis à part qu'il s'était servi de moi pour faire battre Gwydion, il ne m'avait jamais fait aucun mal ni même donnée directement d'ordre dégradant. Peut-être n'en avait-il pas encore eu l'utilité.

– Je m'en charge, retournez travailler, fit-il aux deux autres femmes qui nous laissèrent sans se préoccuper de quoi que ce soit.

Il me poussa sans me brusquer, nul besoin d'ailleurs, car je n'allais pas prendre le risque de me faire battre, m'engageant vers une trappe au sol menant à des caves. J'appartenais à cet homme, mais également à Gwydion puisqu'il m'avait acquise à sa demande, il ne pouvait tout de même pas me faire de mal, n'est-ce pas ? Ni profiter de moi ! Se serait-il soucié de cela ? Après tout nous n'étions que des esclaves, qu'avions-nous à y redire ?

– Tu vas attendre sagement ici et surtout fermer ta si jolie petite bouche. Je ne veux pas t'entendre sauf si je t'en donne l'ordre.

J'acceptai d'un mouvement de tête et il m'enchaîna au mur. Me laissant assez de liberté pour faire quelques pas à la ronde, mais bien trop loin de l'issue. À proximité, une cruche d'eau était posée au sol. Était-ce une punition ? Dans ce cas, pour quel motif ?

Je ne trouvai rien d'autre à faire que de m'asseoir et espérer que ce ne soit rien de plus qu'une mise à l'écart. Peu à peu l'obscurité se fit totale. Jusqu'alors je n'avais droit qu'à un fin rayon de lumière passant entre les diverses imperfections des battants de la double porte, mais il devait se faire tard. Gwydion devait forcément s'inquiéter à présent. Me cherchait-il ? Quoi qu'il en soit, j'espérais sincèrement avoir commis une faute et que ce ne soit pas une fois de plus un piège pour le faire se battre et le fouetter ensuite.

Pourtant, les mêmes bruits que la veille venaient à se faire entendre au-dehors. Et plus les minutes s'écoulaient, plus il me semblait que la cour se remplissait. Des rires, des voix lançant déjà les premiers paris. Et parmi eux, un nom revint plus d'une fois. Callidromos ! Non !

Je me levai et tentai en vain d'apercevoir quoi que ce soit de loin entre les battants. Il allait l'obliger à se battre. Il allait se laisser faire pour y échapper et la, la punition serait une fois de plus terrible. La foule amassée scandait son nom. Était-il déjà là ?

– Gwydion !

Je ne pus m'empêcher de l'appeler, me souvenant aussitôt qu'il m'était interdit de me faire entendre. Dehors, j'entendis que l'on annonçait un premier combat et son nom revint de nouveau. Puis le silence se fit, des rumeurs, des plaintes. Il se fit huer et siffler, preuve qu'il avait tenu tête comme il l'avait annoncé.

Alors subitement les portes s'ouvrirent et on le poussa à l'intérieur et Caius coinça la torche qu'il tenait en main dans une applique vide au mur.

– Tu n'es toujours pas décidé à combattre ?

Il ne répondit pas, fermé comme il pouvait si bien le faire. Notre maître lui tourna autour, me rappelant celle à qui j'appartenais avant lui. Ce même air, n'annonçant rien de bon sinon des menaces et le désir de vouloir voir sa proie à ses pieds. À ceci près que Gwydion se retenait de lui montrer le visage qu'il souhaitait, lui offrant un regard noir tout en le suivant dans ses moindres mouvements, les lèvres pincées.

– Ce sera le fouet pour cela, tu en es conscient ?

– Que m'importe, j'en ai connu d'autres. Je ne participerai pas à cette comédie.

– Qui a dit que ce serait toi qui les prendras ?

Son visage changea alors qu'il me dévisageait, comprenant tout comme moi que Caius n'avait jamais eu l'intention, du moins cette fois, de le punir lui, mais bel et bien moi s'il refusait de se battre. Je reculai jusqu'au mur, ne pouvant m'empêcher d'observer celui qui tenait l'objet du supplice. Je n'avais encore jamais goûté au fouet. Sans doute que l'on évitait cela afin de préserver ma peau et que je ne perds ma valeur marchande.

Il le fit claquer à mes pieds et je ne pus m'empêcher de crier et reculer plus encore, terminant dans l'un des coins de la pièce. Terrifiée.

– Vous êtes des bâtards !

– Et toi bien trop insolent pour un esclave !

Caius le frappa au visage, profita du recul occasionné pour lui asséner un second coup sans risque. Et alors que son homme de main revenait vers moi, faisant claquer une seconde fois le fouet qui me toucha à la jambe. Une nouvelle fois je criais, mais cette fois la douleur provoquée par la morsure de la lanière me faisant tomber au sol. Voyant qu'ils ne plaisantaient pas, il finit par abdiquer.

– Je vais me battre. Arrête ça immédiatement Caius ! C'est bon ! Tu as gagné !

La muse de CallidromosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant