Chapitre 24

Depuis le début
                                    

J'ai senti des larmes rouler le long de mes joues. J'ai voulu les essuyer mais mes bras refusaient eux aussi de m'obéir. 

- Si je n'avais pas eu aussi peur de me retrouver à la rue et sans argent après que mon père ait perdu une grande partie de notre fortune dans de mauvais investissements, je n'aurais eu aucun de vous deux. Mais je dois dire que ta soeur a été un réconfort pour moi.

Une nouvelle douleur, plus sourde, toujours dans la poitrine, m'a coupé le souffle. Le ciel au-dessus de moi avait des reflets dorées qui semblait se tendre vers moi pour venir m'emporter. 

- Quand tu es né, j'étais inconsciente. J'avais perdu trop de sang et ton père... ton père était avec sa maitresse. Alors, il t'ont mis dans les bras de ta grand-mère. C'est elle qui a choisi ton prénom. Sans rien demander à personne bien sûr. Elle a cru avoir tous les droits sur toi avant même que tu ne sois dans mon ventre à m'arracher les entrailles. 

Malgré la sensation d'étouffement qui m'envahissait, j'entendais tout ce qu'elle disait. Je n'arrivais pas à comprendre pourquoi elle me confiait tout ça. Quand elle s'est enfin tourné vers moi, elle n'affichait aucune émotion. Juste une totale indifférence. 

- Je crois que si je te déteste autant c'est parce que tu n'es rien d'autre qu'une pâle copie de moi-même a-t-elle dit d'une voix neutre.

- Je suis bien plus qu'une pâle copie de ce que tu as pu être à mon âge.

J'étais enfin sorti de ma léthargie. J'ai pris de grandes bouffées d'air, je respirais à nouveau. 

- Tu n'as jamais été qu'une arriviste, ai-je continué. Tout ce qui t'a toujours intéressé c'est ton statut social, l'argent, le regard des autres. Et c'est parce que tu ne supportais plus que tout le monde sache ce que tu es vraiment que tu as fini par épouser Colin. Si tu épousais un homme avec un statut social bien inférieur au tien, alors tu devenais une femme au grand coeur. Mais dans ton monde, vous êtes tous pareils, c'est juste que tu le cachais moins bien. 

Elle ne m'a pas répondu. Bizarrement, c'est contour avait l'air d'être flou. J'avais la tête qui tournait et j'allais sûrement m'évanouir. J'ai quand même achevé de lui dire ce que j'avais sur le coeur.

- Je ne te déçois pas parce que je suis une pâle copie de toi-même, je te déçois parce que je ne rentrerai jamais dans le rang. Parce que je suis capable de prendre mes propres décisions et de m'y tenir. En fait, je ne crois pas que ce que tu éprouves pour moi soit de la déception. Je crois que tu es juste envieuse de voir que je suis capable d'évoluer à la fois dans le monde de l'aristocratie et en même temps dans le monde normal. Que je suis capable de tout remettre en question, de sortir de ma zone de confort. Tu aurais voulu pouvoir faire comme moi en arrêtant de paraître pour être. Tu as essayé de le faire avec le père de Catherine mais lui rappeler continuellement que sans toi il ne pourrait même pas s'offrir des soins médicaux corrects, ce n'est pas être, c'est juste toi étant celle que tu as toujours été en affirmant ta supériorité aux autres.

Bip. Bip. Bip.

A nouveau ce bruit. A nouveau j'étouffe. Je me retourne pour essayer de voir d'où cet infernal son trouve sa source mais je n'y arrive pas. Quand je retrouve enfin mon souffle, ma mère n'est plus là, les fleurs non plus. 

Je sens la panique me gagné en même temps que je me souviens où est-ce que j'ai déjà entendu ma mère dire toute ces choses horribles. C'était lors d'une réception chez l'une de ses amies. Une marquise si mes souvenirs sont exacts. Elles parlaient de leurs enfants respectifs et j'ai surpris leur conversation sans le faire exprès. 

J'ai cligné plusieurs fois des yeux en espérant empêcher de nouvelles larmes de s'échapper à ce souvenir. 

Un souvenir. Oui, c'est ce que c'était. Est-ce que j'étais mort ?

Entre deux océans - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant