Chapitre 23

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TW: DEUIL

Quelques jours plus tard.

Voilà déjà deux jours que nous sommes ici, nous repartons déjà demain. C'est passé vite, trop vite. Mais je devrais revenir cet été plus longtemps normalement et je pourrais profiter de la piscine. Maman est restée à la maison mais moi et Mathis sortons du fleuriste. Nous ne discutons pas vraiment et empruntons un petit chemin que nous connaissons bien. Le même chemin que nous avons pris en voiture le jour où mon père a été enterré. Je suis rarement revenue ici depuis, c'est plus fort que moi, Mathis à sans doute raison, j'ai toujours eu du mal à faire mon deuil. Et ma réaction chaque douze Mars ne fait que le renforcer.

« Pourquoi t'as choisi spécialement ces fleurs ? »

« Papa adorait les Bégonias, il en voulait toujours dans le jardin, nos mères en riait parce qu'il parlait que de ça. Le souci c'est qu'elles ont du mal à survivre l'Hiver, celles-ci proviennent surement de serres intensives quelque chose comme ça. »

Il souffle du nez, je crois qu'il s'en rappelle aussi puisqu'il évoque son jardin.

« On en avait dans le jardin. »

« C'est vrai. »

Il fait beau, ça change de Paris.

Nous entrons dans le cimetière en continuant de discuter d'un ton bas. J'ai beau ne pas passer souvent ici, je sais exactement où la tombe de mon père se trouve. Nos pieds foulent le gravier dans un silence bizarre. Je lis les noms sur les tombes, j'en reconnais certains mais sans plus, j'ai toujours retenu celui de mon père, logique dans un sens. Nous croisons un homme accompagné de sa fille qui nettoie une tombe -probablement celle d'un proche-. Nous lui offrons un signe de tête en guise de bonjour qu'il nous rend dans le silence.

Quelques tombes plus loin, j'aperçois des fleurs fraîches. Je reconnais forme de la pierre. Je m'arrête sans rien dire, le cœur serré. La photo qui repose sur la pierre est une vieille photo que nous avions prise lors d'un Noël. Je relis les mots gravés dans la pierre, la gorge nouée.

« A notre bien aimé Arnaud Courtois Siudek, Fils, Père et Ami,

Repose en Paix.

6 Janvier 1972-12 Mars 2017 »

Quand mes parents se sont mariés ils ont repris le nom de ma mère car elle voulait pouvoir garder son nom de jeune fille, elle a toujours été fière de ses origines, ça me fait sourire. Je dépose les fleurs sur la tombe propre, maman est probablement venu la nettoyer. Il y règne quand même quelques fleurs dont celles que je viens de déposer, je reste un instant accroupis devant la pierre, silencieuse.

Il y a sept ans, quand ma mère m'a appelé pour m'annoncer que mon père avait eu un accident, je suis restée toute aussi silencieuse, incapable de faire face à la réalité. Ce sont les parents de Mathis qui m'ont amenés à l'hôpital car ils avaient été mis au courant. Mathis n'était pas là, il était encore en cours. Je suis restée silencieuse jusqu'à arriver au chevet de mon père. Ma mère pleurait déjà et plus aucune machine ne fonctionnaient. Il n'avait pas survécu, et je n'ai jamais pu dire au revoir à mon père.

Je me relève, la vision brouillée. Ma gorge me fait mal. Je n'aime pas me retrouver ici, devant cette tombe. Je déteste cette manie qu'il avait de toujours accélérer sur les routes. Je déteste cette manie qu'il avait de ne pas respecter les vitesses. Je déteste qu'il soit mort. Je me déteste parce que je n'ai pas dit mot quand il est mort. Je me déteste car Mathis était en cours et que nous ne lui avons rien dit. Et j'ai détestais les gens hypocrites qui sont venus à son enterrement alors qu'ils ne se parlaient plus. A quoi est-ce que tout ça leur a servi ? Je renifle. Je sens des bras entourer mes épaules délicatement. Je déteste le fait que mon père n'est jamais pu voir ce que moi et Mathis étions devenu. Ce que nous sommes devenu. Je pleure en silence parce que j'ai toujours été douée pour rester silencieuse.

Merci pour la douceurWhere stories live. Discover now