Chapitre XXII

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Mathilde :

Je ne veux plus mentir à l'homme que j'aime..... Je dois lui avouer la vérité et lui révéler ma véritable identité. Il va me détester. Je ne supporte plus d'être cette soeur que je n'ai pas connue. Je désire me dévouer à mon mari. Non ! Il ne l'est pas ! Il ne m'a pas épousée, moi ! Je panique à cette pensée.

Est-ce que je peux être sincère avec lui jusqu'au bout ? J'ai peur de sa réaction. Ne serait-il pas trop audacieux de ma part de penser qu'il puisse me pardonner ? Mes mains tremblent, mais pas autant que mon cœur. Puisque je ne peux plus avancer sur le chemin du mensonge, il ne me reste plus aucune autre alternative que la sincérité. Comprendra-t-il ? Puis-je faire confiance à l'amour que nous éprouvons l'un pour l'autre ? Il y a trop d'incertitudes dans le résultat de cette décision ! Je soupire fortement pour tenter d'évacuer un peu du stress qui remplit mon corps. Mais, cela ne me soulage qu'un laps de temps très court, et, mes pensées troubles refont surface immédiatement. Cette situation chaotique a suffisamment duré.

Je prends l'initiative de tout lui avouer, et, je constaterais le résultat. C'est toujours mieux que de rester ainsi. Lui mentir...... Je ne veux plus..... Il est plus important que ma propre vie pour moi. Comment en suis-je arrivée à ce stade émotionnel ? Je pensais ne pouvoir aimer que dieu ! L'amour est impulsif et imprévisible ! J'en fais le constat ! Je ne suis pas malheureuse de l'aimer, je suis juste consternée d'être autant tourmentée par mes sentiments. Il est devenu mon monde sans que je ne puisse réagir. Il a pris mon cœur, mon âme. Il a volé Dieu ! Je soupire à nouveau. Le destin c'est quelque chose..... Ne rien pouvoir contrôler parce que ton cœur est épris c'est très troublant, et traumatisant à la fois. Surtout pour une jeune femme naïve comme moi qui n'avait aucune idée de ce à quoi pouvait ressembler l'amour. Je suis dévastée par mon état actuel, notamment parce que je n'ai pas été sincère avec l'homme que j'aime.

Il entre pour me sortir de mes réflexions. Je panique. Il ressent le malaise en moi. Il s'approche et serre ma main dans la sienne. Je ne trouve pas les mots pour exprimer mes véritables pensées. Je suis bloquée, ma gorge est nouée, je ne parviendrais pas à m'exprimer. Je serre les lèvres, déçue par moi-même d'être aussi lâche. Je n'ai jamais eu à affronter quelconque situation complexe avant, je suis, par conséquent, totalement désarmée. Je réalise ô combien j'étais privilégiée et protégée auparavant parmi les religieuses de cet orphelinat. Je voudrais pouvoir trouver les mots pour m'excuser du mensonge, et pour ne pas être celle qu'il a épousée. Rien ne sort de ma bouche qui reste clouée par les émotions fortes qui me submergent. Je suis perdue. Que devrais-je faire ?

Il se lève, se penche vers moi, et caresse mon visage. Son geste affectueux m'achève et me fait culpabiliser davantage. Il dépose un baiser affectueux sur mon front. Mon cœur explose dans ma poitrine. Je ne peux pas retenir mes larmes traitresses. Je me sens heureuse et malheureuse à la fois parce qu'en raison de sa réaction, je pourrais perdre toute cette tendresse.

Puis, par une prise de conscience, je réalise que je me focalise sur mon histoire d'amour alors que je viens de me faire éjecter du trône par mes ennemis. C'est ce qui est plus important dans l'immédiat. Je dois reconquérir ma place, et, trouver mes adversaires pour pouvoir les contrer.

"- Je suis heureux que tu ailles bien !" Se confie mon époux.

Je lui souris rapidement. Les raisons réelles de ma réaction spontanée de le protéger, je les garde pour moi pour l'instant.

"- Nous allons devoir trouver un plan pour affronter nos adversaires !" Je change volontairement de sujet.

Il cligne plusieurs fois de suite des yeux, puis comprend l'urgence de la situation.

"- Tu as parfaitement raison ! Trouvons qui a osé agir de façon à retourner le gouvernement et chasser le gouvernant du pays !" Il retrouve ses esprits.

"- Vous pouvez rester ici, le temps nécessaire !" Intervient la mère supérieure en entrant dans la pièce.

Elle stoppe net quand elle découvre mon mari. Je suis étonnée par sa réaction, mais je ne reprends pas. Je hoche affirmativement la tête, et, je pose mes yeux sur mon voisin. J'avale difficilement ma salive quand je songe à tout ce que je lui cache. J'imagine sa colère et sa déception quand il sera informé. A le contempler agir avec intensité pour la couronne, j'imagine qu'il n'appréciera pas d'avoir été trompé. Je suis quasi certaine qu'il mettra fin à notre mariage. Et au final, il me quittera comme toutes les personnes qui auraient dû m'entourer. Je baisse la tête de désespoir. En final, je ne suis rien qu'une copie de ma soeur. Moi, en tant que Mathilde, je suis insignifiante, personne n'a eu connaissance de mon existence. Je n'avais que pour ambition de vivre aux crochets des autres et donner mon amour et ma foi à Dieu. Là, je dois aller de l'avant, me montrer combattive pour récupérer ce qui revient à ma famille. Mais, à mes yeux, ils ne sont pas ma famille. Je ne les ai connu que depuis quelques semaines. La souffrance engendrée par ma blessure ne sera rien à celle que je ressentirais quand il m'abandonnera à son tour. Je ne me fais pas d'illusions, personne n'a jamais voulu de moi. En fait, je ne mérite pas qu'il m'aime.......

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La mère supérieure :

Je suis confuse. J'ai trahi le secret de Mathilde. Le roi de France, époux de Marie, enfin Mathilde, m'a questionnée à son sujet. Je n'ai pas pu mentir, et je lui ai tout révélé. Il a mal réagi, il a été très en colère par la supercherie. Je suis surprise de le retrouver auprès d'elle ce matin, en entrant pour la soigner. J'ignore ce dont ils ont discuté, mais, je pense avoir fait une monumentale erreur. Ce matin à bien des égards, il semble s'être calmé. Il ne répond pas à mes salutations, et prévient ma petite Mathilde qu'il doit partir. Quelles sont ses intentions ? Il va la quitter ? Je suis très embarrassée. J'imagine qu'il devait nourrir des suspicions, et, il a voulu creuser pour connaître la vérité. Je ne peux pas mentir, il en a profiter pour apprendre tout ce qu'il souhaitait. Je pense avoir fait l'erreur en premier, en l'appelant par son véritable prénom à son arrivée. J'ai alimenté les doutes, et il a voulu savoir.

Une fois qu'il a quitté la pièce, je m'attarde sur la blessure de ma petite protégée. Celle-ci est très profonde. Elle aurait pu mourir. Je crains qu'il ne faille beaucoup de temps avant qu'elle ne guérisse. Je vais prendre soin d'elle comme je l'ai toujours fait. Elle a toujours été dans mon cœur, l'enfant que je n'ai jamais eu. Je l'ai prise en affection quand j'ai réalisé le destin qu'elle s'apprêtait à vivre, sans famille, sans soutien, et, surtout sans amour. Je sais que j'ai comblé un manque affective, mais pas en totalité. Elle est une personne très solitaire, et esseulée. Elle n'a pas eu le choix. On l'a chassée de son milieu, elle a découvert une autre vie que celle qu'elle aurait dû vivre. Je retiens mes larmes, la situation est assez cruelle ainsi. Et, je sais qu'elle aime le mari de sa soeur, j'espère juste, ne pas avoir gâché ses chances d'être enfin aimée et heureuse.

Puis, on entend un cheval partir au galop. Elle me fixe surprise. Pense-t-elle qu'il s'agit de son époux ? Je baisse la tête avec beaucoup de culpabilité. Elle s'aperçoit de mon malaise. Je ne parviens pas à dissimuler que je suis troublée.

"- Vous semblez perturbée ! Ma blessure est plus grave que vous ne le pensiez ?" Elle m'interroge.

Elle est loin de se douter l'origine de mes tourments. Mais, en évoquant sa blessure, elle vient de me rappeler qu'elle doit effectivement guérir avant toute chose. Il ne serait pas bénéfique pour sa santé de l'accabler davantage en lui avouant que son mari est au courant pour l'échange d'identité. Je vais prendre soin d'elle. Je simule l'indifférence devant elle, mais je suis persuadée que son époux s'est enfui à cheval. Je devrais trouver une répartie quand elle posera la question sur son absence. La priorité est sa guérison.

J'administre les soins, et, je lui conseille de dormir un peu pour récupérer des forces. Je sais que la blessure est douloureuse, et qu'elle doit lutter pour supporter cette souffrance. Mathilde a toujours été une personne très courageuse, je ne doute pas de ses capacités à se remettre d'une blessure aussi grave qui aurait pu lui être fatale. Tout cela pour l'amour d'un homme qui finira pas lui tourner le dos........................................



Pile ou faceWhere stories live. Discover now