Chapitre VIII

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Mathilde :

Je caresse du bout des doigts les objets appartenant à l'autre princesse. Je m'installe et m'accapare des lieux. Est-ce raisonnable ? J'ai accepté par la force de perpétuer ce rôle. Je reste sceptique sur l'ingéniosité de cette idée. Pour ce roi, il n'y a que le pouvoir qui compte, même au dépend du sacrifice de sa famille. Il m'est difficile de le contempler comme un père, il m'a abandonnée.... Je ferme les yeux, la cruauté dont il a fait preuve me sidère. Il ne peut pas être humain pour agir de cette manière, et ce, même si la faim justifie les moyens.

Je me remets de mes émotions, et de tout ce que j'ai appris dans un temps si court. Mon cerveau n'a pas tout emmagasiné. Ce rôle que je dois jouer, ce personnage dont je dois m'approprier et cette nouvelle vie m'effraient. J'ignore si je vais être à la hauteur. Or, je suis au courant de ce qu'il arrivera si j'échoue. J'avais décidé de vouer mon corps et mon cœur à Dieu. Il va falloir que je donne naissance à un héritier avec ce beau prince. Rien que l'idée me dévaste.

Je m'assois sur le lit et je caresse la soie du couvre lit. Je m'allonge et je ferme les yeux......

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Le prince Felipe Lopez :

La princesse m'intrigue. L'expression de son visage était différente. J'ai ressenti de la chaleur émanant d'elle quelque chose qui m'a bouleversé. Je ne me suis pas attardé, elle semblait exténuée. Je ne comprends pas ce qu'il m'arrive, mais j'ai des impulsions pour aller vers elle, pour prendre soin d'elle. Je secoue ma tête. Je dois me ressaisir. Il est impossible que je ressente ces émotions pour cette fille gâtée et arrogante.

Je frappe à la porte de sa chambre, elle ne répond pas. Je décide d'entrer, et, je l'admire allongée sur le lit. Elle s'est assoupie. Son visage est lumineux parce qu'il est détendu. J'avais déjà constaté sa beauté, mais à l'observer ainsi, sa poitrine qui bouge au rythme de sa respiration, je la trouve irrésistible. Je m'approche d'elle, la seule occasion que j'ai parce qu'habituellement, elle me chasse. Je meurs d'envie de la serrer dans mes bras, et de voler sa vertu.

Puis, je fronce les sourcils. Je la soupçonne de l'avoir donnée à ce palefrenier insignifiant. Je serre les poings, j'enrage les imaginant ensemble, unissant leurs corps. Elle me le paiera, je vais me venger pour la faire souffrir à son tour.

Cette femme que j'ai haï pour avoir mis fin à ma liberté de jeune célibataire, s'avère capable de retenir mon cœur à elle. Je secoue fermement la tête. Il est hors de question que je tombe amoureux. Mais, elle me plait, et j'aimerais la posséder, or, le contexte fait qu'elle est inaccessible, et surtout, elle me déteste. Tandis que moi, je recherchais à me rapprocher d'elle. J'ai déjà assouvi ma soif d'amour dans les bras d'autres femmes. Même ces tromperies, la laisse indifférente.

Je l'observe, à ma merci, endormie. J'aimerais la faire mienne. Je retiens ce désir qui me consume à chaque fois que je la vois. Je sais que je lutte en vain contre mes sentiments, parce que je l'aime depuis le premier regard. Mais son attitude détestable m'a maintenu loin d'elle. Je me penche et je caresse sa joue avec le dos de ma main. Je mordille ma lèvre inférieure, je résiste à cette tentation. Je m'éloigne, il vaut mieux, et je sors de la pièce. Ce qui émane d'elle est différent depuis son retour avec son père. Et cet innocent charme qu'elle déploie autour d'elle m'attire comme un aimant.

Je quitte la pièce totalement ensorcelé.

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Le roi :

La mort de ma petite fille Marie m'a pris au dépourvu. Mon cœur se resserre quand je pense à tous les bons moments que nous avons partagés ensemble. Elle était ma petite fleur des champs, la lumière dans ma vie. Je n'ai pas pu la pleurer comme je le devais. Il a fallu que je prenne rapidement une décision. Ce que je fais ne me plait pas du tout. Seulement l'honneur de ma famille passe avant tout le reste. Je ne veux pas être un roi déchu pour avoir caché l'existence d'un autre enfant. Je n'ai pas confiance en cette fille de substitution, elle parait tellement fragile. Saura-t-elle jouer le rôle de la princesse, et, surtout saura-t-elle séduire le prince ? Je connais la haine de Marie pour son époux. Mon erreur aura été de lui céder et de laisser sortir du cachot le palefrenier. Ce qui les a conduit à leur perte.

J'essuie mes larmes. Pourquoi, ce n'est pas cette fille qui est morte ? Je prends un grand risque en agissant ainsi. Le pouvoir est à moi, et, il sera à ma descendance. Je ferais tout pour conserver cela. La famille de mon demi-frère convoite ce que j'ai, je ne permettrais pas qu'ils héritent du trône. Elle n'a pas intérêt à me décevoir, je ne serais pas clément avec elle.

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Mathilde :

J'ouvre mes yeux. Je souris en me réveillant. Je me lève et marche jusque la fenêtre de la chambre. Le jardin semble très agréable, j'ai envie de m'y promener. Je sors en courant dans le couloir. Je me sens euphorique. Je n'ai jamais eu autant d'espace pour me défouler. Je rejoins le jardin où je m'arrête quelques secondes en tournant lentement sur moi-même et sentant les fragrances des roses mêlées à celle d'autres fleurs. Je respire à plein poumons. L'air est agréable et parfumé. Je décide de continuer droit devant moi. Je me promène seule, je découvre les lieux. Je crois que toutes les personnes que je croise, semblent surprises par mon attitude. Je salue tout le monde, ils baissent la tête en accélérant le pas. J'ai l'impression qu'ils ont peur de moi.

Je m'assois sur le banc en face de moi, et je lève mon visage vers le soleil en souriant. Je me sens bien. Je suis interrompue par quelqu'un qui se gratte la gorge à mes côtés. Je tourne la tête vers cette personne et je découvre le prince. Je lui souris avec sincérité. Il me fixe sans un mot. Je détourne le regard pour le poser sur l'environnement. Sans demander ma permission, il s'impose à côté de moi sur le banc. Je sais qu'il cherche à discuter. Je me tourne vers lui pour engager la conversion, il fait de même et nos lèvres manquent de se toucher. Je m'écarte de lui. Je pense avoir rougi. Il me contemple comme s'il me découvrait. Je suis pourtant son épouse.

« - Vous semblez radieuse, aujourd'hui ! » Il rompt le silence.

« - Pas autant que vous mon Prince ! » Je lui réponds en souriant.

Il est étonné de ma réponse, et surtout, j'ai remarqué ces petites rougeurs sur ses joues. Puis, il se redresse et se ressaisit.

« - Que recherchez-vous ? Votre jeu de séduction ne m'atteindra pas ! » Il répond agacé.

« - Mon jeu de séduction ? » Je m'étonne.

« - Vous pensez pouvoir m'attendrir ainsi ! » Il insiste.

Je ne réponds rien, et je me demande si sa relation avec ma sœur était si agréable. Je crois qu'il me hait, en fait.

« - Vous êtes celui qui s'est joint à moi ! » Je lui rappelle.

Il jette un regard noir vers moi. Je fixe son beau visage. Nous restons ainsi quelques secondes, puis, il pose ses doigts sous mon menton et m'oblige à tourne mon visage vers lui. Il se penche vers moi. Mon cœur bat la chamade. Je vais avoir mon premier baiser. Ses lèvres s'emparent des miennes. Je l'accueille avec émotion. Notre baiser s'éternise. Il écarte légèrement son visage pour me contempler, puis réitère son geste en embrassant ma bouche avec plus de vigueur. Je suis séduite. Il continue à harceler ma bouche jusqu'à ce que je lui permette l'accès. Il gémit en obtenant cela de moi. Son baiser se fait plus torride. Je suis transportée ailleurs, je suis accablée par le plaisir que je ressens à échanger ce baiser avec lui. Il dépose à présent, une multitude de baisers sur mes lèvres, avant de cesser, et de plonger ses yeux dans les miens. Je me noie littéralement ensorcelée par son charme dévastateur. A ce moment précis où mon cœur bat rapidement dans ma poitrine, je réalise qu'il me fera souffrir parce que je vais succomber à son charme immédiatement.

Et lui ? Il a semblé apprécier ce partage d'affection. Je me lève pour poursuivre ma visite, il me suit quelques temps, et me quitte prétextant un rendez-vous important avec le roi. J'observe sa silhouette quand il s'éloigne, et il me surprend à le dévisager. Je baisse les yeux quand il se retourne vers moi. Nos yeux rentrent en contact, et mon cœur s'emballe. Il est figé devant moi, incapable de bouger. Je lui souris à nouveau. Il ferme plusieurs fois de suite ses yeux. Puis, me tourne le dos. Je décide de poursuivre mon exploration du jardin.......


Pile ou faceWhere stories live. Discover now