13. Echo du passé

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La ville était constituée d'un grand centre-ville où affluaient les habitants des quartiers alentours. Certains bourgeois, d'autres plus modestes. Au-delà s'étendaient les champs de céréales et de légumes. La périphérie avait autrefois attiré bon nombre de familles qui aspiraient au calme de la nature. Mais, quelques années plus tôt, l'expansion dévastatrice de l'homme avait contrarié bien des administrations. Un projet de construction d'une deuxième école avait suscité de nombreux désaccords : le bâtiment allait empiéter sur le joli parc au bord de la ville. Or les habitants étaient attachés à cet espace de verdure devenu si rare dans cet univers de béton.


À son inauguration, l'école primaire Jeanne d'Arc n'avait pas rencontré un grand succès. Les parents n'avaient aucun plaisir à déposer leurs enfants. L'enseignement n'y était pas très satisfaisant, prodigué par des instituteurs inexpérimentées ou démotivées, transférés de leur ancienne affectation pour réduction de classes. La moitié des enfants de la ville profitait toujours de l'ancienne école. Elle plaisait beaucoup en raison de la présence d'une professeure en particulier : Caroline Spencer. Cependant, la situation s'inversa au transfert de cette dernière à l'école Jeanne d'Arc.


*


À la limite de la ville, le bâtiment gris et austère s'élevait au milieu des champs. De la pelouse fraîchement tondue en faisait le tour. La cour qui s'étendait face à l'entrée était parsemée de jeunes arbres aux troncs encore chétifs. L'école primaire Jeanne d'Arc était encadrée par de hauts grillages blancs.


Dans l'une des salles de classe résonnait une voix claire et enjouée. La façade vitrée ouvrait grand le passage aux rayons matinaux du soleil, baignant la pièce d'une lumière chaleureuse. Les murs se coloraient gaiement d'un jaune chaud. Celui qui faisait face à la baie vitrée était couvert de dessins d'enfant, celui qui portait le tableau était décoré de posters représentant le cycle de l'eau, le Portrait de Louis XIV en costume de sacre, les tables de multiplication. Oubliée parles rayons du soleil, une frise chronologique longeait le fond de la salle. C'était la première chose vers laquelle les enfants se ruaient le premier jour d'école. Sûrement étaient-ils fascinés par sa longueur.


Cette classe, cette école était son refuge. Pour se libérer des soucis, certains se plongent corps et âme dans une passion, d'autres ont besoin d'évacuer par une activité physique intensive. Caroline, elle, n'aimait rien de mieux que prodiguer son savoir aux enfants. Les échanges qu'elle créait avec eux lui offrait à la fois de la plénitude et de l'enthousiasme lié à l'envie de transmettre. Dès qu'elle franchissait les murs de l'école, tous ses problèmes disparaissaient. Elle laissait à l'entrée ce sac lourd d'idées noires pour retrouver la joie de faire comprendre aux enfants et de les émerveiller par des cours qui pouvaient en ennuyer plus d'un... Elle oubliait ainsi ses nuits sans sommeil pour redevenir la souriante et accessible maîtresse de CE2 de l'école Jeanne d'Arc.


Les aiguilles de l'horloge progressaient lentement alors que la leçon prenait forme entre les lèvres de l'institutrice. 8 h 50. La femme était debout, dos au tableau noir. Les enfants étaient captivés par sa façon de parler et par ses gestes. C'était comme s'ils vivaient le cours qu'elle contait. Elle, passionnée par son sujet, n'entendait rien d'autre que l'écho de sa voix.


- Vercingétorix fut forcé de déposer les armes devant Jules César. Dont le vrai nom serait d'ailleurs Caius Iulius Caesar IV.

Sorciers, T1 : Le fils du corbeauWhere stories live. Discover now