VIII - Chapitre XXXIV

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Hélène marchait avec désespoir. Elle était complètement perdue. Elle n'avait aucun moyen de se repérer dans ce domaine immense qu'elle ne connaissait pas. Plus les minutes passaient et moins elle voyait. Le jour tombait, le soleil se couchait presque. Elle essayait de se rassurer en se disant qu'elle ne devrait pas mourir de froid. Même si la température baissait radicalement la nuit comparé à la journée, elle espérait que ce serait humainement supportable. D'ici demain, on aurait sûrement envoyé des gens la cherche.
Enfin... à moins que tous se soient faits tués. Philippe, Arthur, Guillaume... et Margot.
Elle chassait ses idées noires de son esprit. Elle ne devait pas penser à de telles choses.
En revanche, la douleur dans tout son corps c'était maintenant réveillée. Si l'adrénaline lui avait permis de courir, maintenant elle boitait. Sa chute de cheval avait blessé sa jambe droite et son bras, et la dégringolade de la pente avait fini le travail. Chaque pas était douloureux. Sans compter sa douleur dans sa vessie et dans son entre-jambe.

Soudain, elle entendit un bruit derrière elle, comme un pas. Elle fit volte-face, mais rien. Elle resta ainsi quelques instants, observant en silence. Mais toujours rien. Elle voulu reprendre sa marche, mais une ombre surgit devant elle. Elle essaya de hurler et reculer mais une main s'abattît sur sa bouche et elle se retrouva plaquée contre un arbre.

-Silence!

Deux verts lui faisaient face. Elle mit un instant à réaliser. Il lâcha sa bouche.

-Guillaume...
-Je ne voulais pas vous faire peur. Pardonnez-moi.

Hélène n'avait pas été autant soulagée de voir un visage connu depuis longtemps.
Elle remarqua que son arcade sourcilière était ouverte et que sa pommette avait changée de teinte. Il s'était prit un méchant coup de poing, au moins.

-...J'ai entendu un coup de feu.
-Elle m'était destinée. Mais c'est mon cheval qui en a été la victime. J'ai réussi à les battre suffisamment de temps pour fuir. Je vous cherchais. J'ai eu peur qu'il soit arrivé un malheur avec cet homme qui vous poursuivait. Que s'est il passé?
-Je me suis cachée. Je ne sais pas où il est maintenant. Que voulaient ces hommes?
-Nous voler sans doute. Dans le meilleur des cas.

Hélène eut un frisson d'horreur.
Soudain, un éclair trancha la nuit, et quelques secondes plus tard, un atroce bruit d'orage déchira le ciel.

-Il faut nous abriter. Nous ne pourrons jamais retrouver notre chemin en pleine nuit, et si l'orage nous tombe dessus je ne donne pas cher de nous. Venez.

Avec le peu de lumière du jour qu'il leur restait, ils avancèrent au hasard à travers les bois. Tout n'était plus que des ombres.
Hélène trébucha sur une racine. Guillaume la rattrapa in extremis, et ne lâcha plus son bras.
Finalement, une pluie abominable leur tomba dessus. En quelques instants ils furent trempés jusqu'à aux os, et la nuit était tout à fait tombée. La jeune femme était gelée et souffrait, mais elle refusait de se plaindre. Mais sous ses doigts, Guillaume sentait les tremblements de froids et les mouvements douloureux de sa compagne.

-Inutile de continuer. On s'éloigne peut être de quelque chose autant qu'on s'en rapproche.

Il attrapa au hasard des branchages lourds et solides et les mis contre un tronc épais. Il rajouta du feuillage par dessus, formant une cabane de fortune. Il reprit le bras d'Hélène et la guida pour s'assoit à même le sol. Il s'assit à côté d'elle, dans le tout petit espace.
Quelques gouttes continuaient de tomber sur eux, mais c'était plus supportable. Le froid ajouté au fait d'être trempé ne partait pas en revanche, et Hélène tremblait de tout son être.
Guillaume retira sa veste, puis sa chemise. Même dans l'obscurité, Hélène le devina. Elle se crispa lorsqu'elle réalisa qu'il était torse nu.

-Nous ne pourrons jamais nous réchauffer si nous restons habillés de vêtements trempés d'eau froide. Croyez-moi je sais de quoi je parle. La guerre a le mérite de vous apprendre certaines chose. Je ne veux pas vous effrayer, mais le peau à peau est notre meilleure chance de ne pas finir en hypothermie.

Hélène sentait bien qu'il avait raison. Mais elle ne pouvait s'empêcher de repenser à sa mère, à tout ce qu'elle lui avait dit...

-Si Philippe apprend que...

Il la coupa:

-Votre mari vous veut vivante. Il a beau être sévère, il ne punit pas le courage et l'instinct de survie. Vous n'allez pas le tromper Hélène. Tout comme il n'a pas tué votre jument...

Elle hésita encore un instant, mais finit par hocher la tête. Elle se pencha en avant pour laisser Guillaume défaire les lacets de sa robe. Il la lui retira, et elle se tortilla pour l'enlever intégralement. Il la balança hors de la minuscule cabane. Puis il dit de même avec son corset. Elle se sentit atrocement libérée et prit trois grandes bouffées d'oxygène. Elle était à présence simplement en chemise blanche - transparente car trempée-, en bas et en chaussures. Elle était heureuse qu'il fasse nuit maintenant, car ainsi il ne pouvait pas trop la voir, simplement deviner ses contours et ses contrastes. 
Lui resta en pantalon, et elle ainsi. Nu à nu était plus efficace, mais Guillaume ne voulait pas lui faire subir ça. Ce qu'elle était déjà en train de faire pour survivre était beaucoup pour elle, il en avait conscience.
Ils se collèrent l'un contre l'autre, enlaçant leurs jambes et leurs bras. Hélène avait sa joue contre le torse nu de Guillaume, et il avait reposé sa tête sur la sienne. Ils s'enveloppaient l'un l'autre, essayant au mieux de se transmettre de la chaleur. Et en effet, Hélène eut un peu moins froid. Mais elle tremblait toujours.
Elle savait déjà qu'elle ne pourrait pas fermer l'œil, et que la nuit serait longue. Très longue.
Elle priait Dieu pour que l'aube arrive le plus vite possible.

Épées et BaisersWhere stories live. Discover now