Kivari #1

By aIexkiz

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Après s'être aventurée dans une forêt interdite, une adolescente développe un étrange pouvoir lié à un peuple... More

1- Prologue
2- La fin de l'été
3- L'appel
4- La fille de la forêt
5- Meori
6- L'étau
7- Le lien
8- Havenly High
9- Ennemie ?
10- Petit meurtre entre amis
11- Résolutions
12- Sans issue
13- L'arbre brisé
14- Kila
15- La proposition
16- Marquée
17- Questions
18- Madame Personne et le chevalier servant
19- Un caractère de chien
20- Collaboration forcée
21- Le jour de Christophe Colomb
22- Equilibrium
23- Un grand honneur
24- Esprit animal
25- Liaison chimique
26- Dans le sous-bois
27- La proie
28- Kivari
29- Embrasée
30- Sous l'écorce
31- La porte secrète
32- Piégée
33- Logan Hoyt
34- Présentations
35- Émoi
36- À l'orée de la forêt
37- Fuis-moi, je ne suis...
38- Le noy'sat
39- L'homme à la couronne de fougères
40- Sur la voie
41- L'eirsha
42- Le Pacte
43- Transition
44- Première lune
45- Le jardin d'Eden
46- Fiévreuse
47- Brûlures
48- La langue morte
49- Entrelacées
50- Improvisation
51- Les Osborn
52- Du sang et des lames
53- L'étoile au bout du monde
54- La rumeur
55- Anonyme
56- Incertitudes
57- Homecoming
59- Le chat et la souris
60- Un être à part
61- Humain et animal
62- Révélations
63- À l'aube de l'hiver
L E X I Q U E

58- Axiome

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By aIexkiz

Je soufflai longuement sur le petit gobelet en plastique. De la fumée s'éleva lentement dans la pièce. Le chocolat était si brûlant que je ne parvenais pas en avaler une seule goutte. Le professeur White se délesta de sa sacoche en cuir, repoussant le porte stylos en métal aux limites du bureau. C'était la première fois que j'y pénétrais. Il n'y avait pas beaucoup d'espace, mais il avait été bien aménagé : une étagère en bois clair sur laquelle reposaient plusieurs manuels et essais dont la couverture ne me disait rien pour la plupart, un classeur à tiroirs qui se fermait à clé, un palmier en pot situé dans l'angle, près d'une fenêtre dont les stores vénitiens étaient abaissés pour la nuit. Je n'avais pas pu refuser. Lorsqu'il m'avait trouvée hagarde au deuxième étage, le professeur White m'avait instamment priée de le suivre dans son bureau, et je n'avais pas pu refuser. Pas plus que je n'avais pu quitter la pièce lorsqu'il était revenu armé d'un chocolat chaud pour me revigorer. Mes pieds grattaient la moquette beige. Le bureau, tout comme son occupant principal, respirait le calme et la douceur.

— Tu n'assistes pas au match ? s'enquit le professeur White en s'asseyant derrière son bureau. Je suis content de voir que tu vas mieux, en tout cas. Si tu as des soucis, tu sais que tu peux m'en parler.

Il était vêtu d'une chemise blanche aux manches retroussées jusqu'aux coudes. Il portait un simple pantalon noir et des chaussures de cuir marron. Sa barbe brune repoussait, mais elle était bien taillée.

— Je me suis sentie mal dans la foule, mentis-je aussitôt. Je voulais juste aller aux toilettes pour me rafraîchir un peu.
— Jusqu'ici ? demanda-t-il en haussant le sourcil. Pourquoi tu n'utilises pas celles du gymnase ?

Prise de court, je cherchai rapidement une réponde adéquate à fournir. Heureusement, il continua tout seul.

— Mais je dois dire que je te comprends, ça ne doit pas sentir la rose là-dedans !

Je lui rendis son sourire, simulant la connivence. Il dégrafa les boucles de sa sacoche et en sortit plusieurs feuilles noircies d'inscriptions et d'annotations. Je reconnus les dossiers que nous devions lui rendre. J'essayai d'entrevoir le mien – et la note qui allait avec – lorsqu'il les feuilleta, mais sans succès.

— J'ai lu votre dossier avec attention, Eden. Votre analyse était très pertinente, je dois dire que j'ai été agréablement surpris de voir deux lycéens approfondir autant leur réflexion. Sans vouloir te vexer, c'est plutôt inhabituel.

Allait-il vraiment me parler du dossier, là tout de suite ? Ce n'était pas du tout le moment, Liam était quelque part dehors et le tueur de la rivière était à ses trousses ! Je ne pouvais pas rester ici.

— Merci, monsieur White. Je crois que je vais rejoindre mes amis, j'aimerais voir la fin du match ! prétextai-je en me levant.
— Tu ne finis pas ton chocolat ?

Je me sentis gauche et impolie. Gênée, je repris place sur la chaise qu'il m'indiquait. Il m'adressa un sourire chaleureux. Je plongeai dans la contemplation de la boisson chaude : si je la buvais suffisamment vite... C'était un signe silencieux comme un autre. J'entrepris de souffler sur le gobelet afin de rafraîchir la température du chocolat : il était brûlant.

— Vous avez eu une approche singulière tous les deux, continua le professeur. C'est Liam qui l'a choisie, ou c'est toi ?
— C'est moi, admis-je en hochant la tête.
— Je m'en doutais un peu. Je l'ai sentie assez vite chez toi. Ton ambivalence, je veux dire.

Son regard détailla des lignes que je ne pouvais voir.

— Quand tu abordes les origines du conflit, par exemple. Tiens, ce passage est intéressant. Tu parles de la responsabilité des colons, mais aucunement de celle des kanashs.

Je me mordis la lèvre. J'allais subir un cours d'histoire impromptu, en plein match. Je pris une gorgée de chocolat chaud et me brûlai la langue dans la foulée, mais je ne m'en souciai pas : il fallait que je termine cet entretien imprévu au plus vite.

— Tout simplement parce qu'ils ne sont pas responsables de la venue des colons, répondis-je avec aplomb.

Le professeur White se leva. Il effleura plusieurs livres rangés dans l'étagère avant d'en extraire un en particulier. Je reconnus alors le livre que m'avait montré Liam à la bibliothèque du lycée : le professeur White en personne en était l'auteur.

— J'ai longuement étudié la culture kanash, dit-il en feuilletant son propre livre. On peut même dire que c'est le travail de toute une vie pour moi. Et je n'en suis qu'au début, c'est assez fascinant.

Je fis de mon mieux pour masquer l'absence d'intérêt que me provoquait cette conversation. Je n'avais aucune envie de servir d'auditoire à un enseignant en manque de reconnaissance, aussi gentil fût-il. Je me bornai donc à hocher poliment la tête.

— Et le moins que l'on puisse dire, reprit-il en contournant le bureau. C'est que la question kanash, comme tu l'appelles, est loin d'être simple.

Il s'était assis sur le rebord de son bureau. Ethan White n'avait jamais eu de soucis particuliers avec les élèves, il était au contraire très populaire parmi ces derniers. Mais cette proximité soudaine me mit mal à l'aise. Je plongeai le nez dans ma boisson chaude. Le chocolat avait un goût fort et amer.

— Si je te disais que les kanashs sont peut-être à l'origine de la guerre, me croirais-tu ? termina le professeur en croisant les bras.
— Je ne vois pas comment, répliquai-je malgré moi. Ils n'ont jamais demandé à être colonisés.

Il me sourit comme un adulte s'émouvant des tâtonnements de son enfant. Pour la première fois, je le trouvai agaçant et condescendant. Je reposai le gobelet sur le bureau. Il était encore à moitié plein, mais tant pis.

— Merci pour le chocolat, monsieur White. Je vais vous laisser à présent. Mes amis me...
— Tout n'est qu'une question de regard, Eden.

Le professeur quitta le bureau pour s'approcher de la fenêtre.

— Le travail du chercheur est complexe, continua-t-il en me tournant le dos. Il doit rassembler tous les éléments, isoler les données pertinentes, effectuer des tests, se tromper, trouver l'angle qui convient... Tout cela dans le seul but de parvenir à la vérité.

Cette discussion commençait à m'ennuyer sérieusement. Je profitai de son laïus pour consulter mon téléphone portable : toujours aucune réponse de Liam. Je songeai à Kila et à son refus obstiné quant à l'acquisition d'un portable.

«Je n'ai personne à contacter à part toi. Et j'ai des moyens bien plus efficaces à disposition pour le faire.», répétait-elle à chaque fois que je soulevais la question. J'aurais bien aimé qu'elle le fasse à présent : savoir Liam tout seul m'inquiétait.

— Mais sais-tu sur quoi repose la vérité ? demanda le professeur White en se retournant à moitié.

Il attendait visiblement une réponse de ma part. Mais je n'avais pas à me creuser la cervelle pour lui répondre, il semblait bien parti pour discuter tout seul.

— Elle est propre à chacun, expliqua-t-il avec un grand sourire. Ça veut dire qu'une même situation peut en contenir plusieurs en fonction de celui qui la raconte. Tu comprends ?

La moquette du bureau était épaisse. La chaise n'émit aucun bruit lorsque je me levai.

— Je comprends, monsieur White. Mais je dois vous laisser, mes amis m'attendent. Merci pour le chocolat.

La main du professeur se plaqua soudainement sur la porte lorsque je tentai de l'ouvrir. À quel moment s'était-il rapproché ? «Je crois que tes amis peuvent attendre un quart d'heure de plus, Eden.
— Monsieur White ?», m'enquis-je à voix basse.

Il me fixa sans un mot. Le picotement familier se manifesta au niveau de ma nuque. Dans ma poche, l'amulette s'échauffait progressivement.

— Je n'ai pas terminé, reprit-il en se plaçant devant la porte. Est-ce que tu te souviens de ce débat que nous avions eu le mois dernier ? Au sujet de la guerre rouge ?

Je m'en rappelais vaguement, mais je me fichais de ses cours d'histoire. À cet instant, le professeur White semblait plus intrusif et insistant qu'autre chose, et je n'avais que Liam en tête.

— J'aimerais sortir, s'il vous plaît.
— Tu as dit qu'il était important d'en parler parce qu'une fille a perdu la vie, continua-t-il sans la moindre considération pour ma requête. Tu t'en rappelles ?

Sa main se posa lourdement sur mon épaule. Je ne bougeai plus. Mon corps entier s'était immobilisé à l'évocation silencieuse de Meori. Pourquoi la mentionnait-il maintenant ? Tous mes sens me criaient de quitter cette pièce au plus vite.

— Mes amis m'attendent, je dois...
— Mais tu n'étais pas dans le vrai, coupa le professeur en baissant la tête. Tu vois, on en revient toujours à la notion de vérité. C'est ça, le secret de l'histoire !
— Monsieur White ? appelai-je sans succès d'une faible voix.

Il ne m'entendait pas, et je ne distinguais plus ses yeux. Tête basse, la respiration rauque et lente, le professeur White semblait perdu dans une réalité que je ne pouvais atteindre. Il releva lentement la tête, un sourire malsain accroché aux lèvres : il était méconnaissable.

— Sourace. C'est une sourace que j'ai tuée ce soir-là. Les mots ont leur importance, jeune fille...

L'homme au visage dément se jeta sur moi.

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